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« Elle n’a pas eu l’effet escompté. Pis, elle a eu comme effet pervers des suspensions de coopération consulaire et d’aggraver les blocages. Ainsi, en 2023, parmi les 137.730 étrangers de toutes nationalités visés par une OQTF (Obligation de quitter le territoire français), plus d’un tiers sont originaires du Maghreb, selon un récent rapport parlementaire français qui a affirmé qu’« une politique migratoire basée sur des représailles diplomatiques s’avère donc peu viable à long terme ».
Le poids des Maghrébins dans les OQTF en France
En détail, ledit rapport explique qu’ « en 2023, 34% des 137.730 OQTF en France concernaient des ressortissants du Maghreb, soit 47.535 personnes. Ce chiffre dépasse largement la moyenne européenne, où les Maghrébins représentent 22% des personnes ciblées par une OQTF (484.160 au total).
Le rapport explique, en outre, que « malgré le nombre élevé d’OQTF, les résultats concrets restent faibles. En 2023, seuls 7,6% des migrants en séjour irrégulier visés par une OQTF ont effectivement quitté le territoire français, contre une moyenne de 19% dans l’Union européenne.
Les blocages consulaires jouent un rôle central dans cette situation, indiquent les rédacteurs dudit document qui révèle que « 96% des annulations d’éloignement sont dues au refus de délivrance de laissez-passer consulaires, nécessaires pour renvoyer les clandestins dans leur pays d’origine. Les pays du Maghreb, particulièrement l’Algérie, figurent parmi les principaux obstacles. Les tensions diplomatiques, exacerbées par des désaccords, compliquent encore davantage la coopération ».
Selon certains observateurs, la coopération consulaire, lorsqu’elle existe, est souvent sporadique et insuffisante pour atteindre les objectifs fixés par la France. Par ailleurs, les refus massifs de laissez-passer traduisent une résistance systématique des pays du Maghreb, qui rejettent les méthodes perçues comme coercitives.
Les autres obstacles aux expulsions
Outre les blocages consulaires, plusieurs autres facteurs entravent les éloignements forcés, ajoute le rapport qui cite « les contraintes du trafic aérien international, notamment avec des pays en conflit ou en crise ; l’impossibilité physique d’éloignement forcé, incluant des actes d’automutilation ou des refus d’embarquer ; les situations géopolitiques instables dans certains pays comme la Syrie, la Libye, l’Afghanistan ou encore le Mali qui refusent toute réadmission ou sont inaccessibles en raison de l’insécurité ; la pression juridique et administrative des recours et protections légales complexes qui prolongent les délais et réduisent l’exécution des OQTF.
Les CRA, censés faciliter les expulsions, peinent à remplir leur mission, poursuit le rapport. « En 2023, la durée moyenne de rétention a augmenté à 30,4 jours (contre 23 jours en 2019), mais les libérations de migrants en situation irrégulière explosent, avec 500 cas par mois en moyenne ». Le document parlementaire souligne que même une extension de la durée légale de rétention au-delà de 90 jours ne garantirait pas de meilleurs résultats, les pays d’origine jouant souvent la montre pour retarder la procédure.
Une présence constante en tête des nationalités éloignées
A rappeler qu’en 2022, les Algériens se trouvaient en deuxième position avec 1876 cas, tandis que les Marocains et les Tunisiens occupaient respectivement les 5e et 6e places avec 980 et 785 cas. Une dynamique similaire a été observée en 2021 et en 2018, où les ressortissants de ces trois pays étaient régulièrement classés parmi les nationalités les plus éloignées. L’Algérie enregistre une hausse significative de +148,8% en 2022 par rapport à l’année précédente, retrouvant ainsi son niveau de 2018. Cette augmentation est directement liée au renforcement de la coopération consulaire entre Alger et Paris.
Malgré des variations ponctuelles, la liste des dix principales nationalités concernées par les mesures d’éloignement demeure remarquablement stable sur les trois années étudiées (2018, 2021, 2022). On y retrouve des nationalités non seulement maghrébines, mais aussi albanaise, roumaine, géorgienne, soudanaise et afghane, témoignant de l’hétérogénéité des flux migratoires. En 2022, des nationalités ivoirienne et pakistanaise ont fait leur entrée dans cette liste, remplaçant la Moldavie et le Mali.
Une diplomatie migratoire conflictuelle
Mohammed Zaoui, chercheur en sciences politiques, rappelle que la coopération consulaire entre la France et les pays du Maghreb reste un point de discorde majeur. Les Etats maghrébins, notamment le Maroc et l’Algérie, persistent dans leur refus de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires au retour de leurs ressortissants expulsés de France.
« Le Maroc insiste pour que les retours soient strictement limités à ses citoyens, rejetant la responsabilité d'accueillir des ressortissants d'autres nationalités ayant transité par son territoire. Cette position traduit une volonté de préserver sa souveraineté et de refuser le rôle de sous-traitant des politiques migratoires européennes. Rabat exige un traitement égalitaire dans ses relations avec Paris, une revendication que la France peine à accepter, oscillant entre coopération et imposition de conditions unilatérales », nous-t-il expliqué.
Les enjeux sous-jacents : pression migratoire et externalisation des frontières
La question des éloignements ne se limite pas à un simple désaccord diplomatique. Elle reflète une stratégie plus large de gestion externalisée des flux migratoires. En réduisant les quotas de visas, la France cherche à exercer une pression sur les pays maghrébins pour qu’ils acceptent davantage de retours. Cependant, cette approche punitive a ses limites. Non seulement elle fragilise les relations bilatérales, mais elle alimente également un sentiment de méfiance mutuelle et de déséquilibre.
Hassan Bentaleb