Lors d'une conférence-débat à Casablanca : Le rapport de la Cour des comptes revisité


Hassan Bentaleb
Jeudi 3 Juin 2010

Lors d'une conférence-débat à Casablanca : Le rapport de la Cour des comptes revisité
Sous le thème « Lire le rapport de la Cour des comptes de l'année 2008 », l'Instance nationale de protection des biens publics au Maroc a organisé une table ronde, le mardi  1er juin à Casablanca. Au début de cette rencontre, Mohamed Tarek Sbai, président de l'INPBPM, s'est interrogé sur la valeur réelle de ce rapport en l'absence de condamnations et de poursuites judiciaires. Il s'est également demandé pourquoi les Cours des comptes manquent jusqu'aujourd'hui de Chambres criminelles. Il a rappelé que le poste de procureur au sein de la Cour des comptes demeure vacant depuis 2007.  
Par, ailleurs, M. Sbai a réclamé que le contrôle de ladite Cour porte également sur les associations et les établissements qui reçoivent de subsides de l'Etat sous forme des dons ou de subventions. Le président de l'INPBPM a donné l'exemple de l'INDH et de  l'Association Fès 12 siècles d'histoire qui a dépensé 35 millions de DH sans que personne ne sache comment ce budget a été géré, a-t-il conclu.
Pour sa part, Mohamed Harakat a indiqué que le rapport  du Cour des comptes porte sur la régularité des opérations et leur conformité (jugement des comptes, gestion de fait et discipline budgétaire et financière). Il s'agit plutôt d'une synthèse des observations, effectuées par des juges, concernant la gestion des établissements publics, axée sur l'appréciation des performances des entités contrôlées en termes d'efficacité, d'économie et d'efficience. L'intervenant a souligné que l'article 75 de la loi n°62-99 portant Code des juridictions financières stipule que le « contrôle de la Cour porte sur tous les aspects de la gestion », à savoir « la réalisation des objectifs assignés, les résultats obtenus ainsi que le coût et les conditions d'acquisition et d'utilisation des moyens mis en œuvre ». Le contrôle de la Cour porte également sur « la régularité et la sincérité des opérations réalisées ainsi que sur la réalité des prestations fournies, des fournitures livrées et des travaux effectués. La Cour s'assure que les systèmes et procédures mis en place dans les organismes soumis à son contrôle garantissent la gestion optimale de leurs ressources et de leurs emplois, la protection de leur patrimoine et l'enregistrement de toutes les opérations réalisées ». L'intervenant pense néanmoins que ce rôle de la Cour  nécessite la vulgarisation de la jurisprudence et  l'application de sanctions répressives.
Même son de cloche du côté d'Abdallah Cherkaoui, journaliste, qui pense que la mission de la  Cour est compromise vu les lacunes qui entravent son travail. L'orateur a mis à l'index  le manque de moyens matériels et humains mis à la disposition de la Cour. Il a noté que le nombre de fonctionnaires de cet établissement ne dépasse pas les 432 personnes et précisé que  le travail de la Cour restera sans effet vu le nombre de poursuites judicaires engagées et les sommes d'argent récupérées. Notre confrère a estimé que la question qu'on doit se poser aujourd'hui est  de savoir qui est responsable de cette situation de dépravation et de détournements des biens publics que connait le Maroc. Il pense que c'est aux partis politiques et aux organes de contrôle d'y répondre.
De son côté, Mohamed Kerkab, professeur d'économie à l'Université Cadi Ayad a saisi l'occasion de cette rencontre-débat pour revenir sur le contrôle effectué par la Cour des comptes à l'Université de Cadi Ayyad en 2008. Il a rappelé que cet établissement dispose d'un budget annuel de 262 millions de DH, mis à la disposition du président et de son équipe. Cette manne financière attise, selon lui, les appétits et ouvre la voie aux détournements de fonds et aux malversations comme noté dans le rapport lorsqu'il évoque des dysfonctionnements. A en croire Mohamed Kerkab, plusieurs présidents et doyens se seraient enrichis sur le dos de l'université. La preuve : plusieurs d'entre eux possèdent des villas à l'intérieur et l'extérieur du pays. L'universitaire a indiqué que la Banque mondiale a pris note de ces informations, mais refuse d'intervenir par respect du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats. 


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