Interrogée par la radio France Inter, la haute représentante de l'UE aux affaires étrangères s'est également dite "convaincue" que négocier l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne "est la seule façon qu'on a pour aider la Turquie à moderniser son Etat" et "à respecter les droits fondamentaux".
"Sur la libre circulation, ça va être fait seulement une fois que tous les critères seront respectés, comme pour tous les pays avec lesquels on négocie la libre circulation des citoyens pour une période limitée", a-t-elle souligné, en évoquant les précédents réalisés avec la Géorgie ou l'Ukraine. "Il y a des critères très stricts, très techniques qu'il faut mettre en place, une vérification très sévère qui doit être faite".
La Turquie a fait de l'exemption des visas pour ses citoyens une condition indispensable à la mise en application d'un accord controversé sur les migrants conclu avec l'Europe.
Pour l'exemption des visas, Ankara doit s'engager à respecter 72 critères très divers, qui vont de garanties sur la sécurité des documents d'identité au respect des droits fondamentaux, en passant par un alignement sur la politique de visas de l'UE vis-à-vis de pays tiers.
Concernant la reprise des négociations d'adhésion, la responsable européenne a estimé que c'est "la seule façon qu'on a pour aider la Turquie à moderniser son Etat" et "à respecter les droits fondamentaux, y compris la liberté de presse et la liberté d'association et aussi entrer dans une conversation plus large, par exemple sur la nécessité de relancer le processus de paix avec les Kurdes".
La Turquie "est un pays avec lequel on parle de tout, y compris ce qu'on appelle je pense aussi en français la gouvernance, l'Etat de droit", a-t-elle ajouté. La Turquie a "bien sûr" vocation à entrer dans l'UE, a-t-elle estimé en réponse à une question, mais "on est loin de ça. Cela dépend des négociations".
Lundi, le président du Parlement, Ismail Kahraman, a estimé que la prochaine Constitution turque doit être "religieuse" et la laïcité ne devrait "pas (y) figurer", a rapporté l'agence de presse progouvernementale Anatolie.
"En tant que pays musulman, pourquoi devrions-nous être dans une situation où nous sommes en retrait de la religion ? Nous sommes un pays musulman. Par conséquent, il faut faire une Constitution religieuse", a déclaré M. Kahraman qui s'exprimait lors d'une conférence à Istanbul.
"Avant toute autre chose, la laïcité ne doit pas figurer dans la nouvelle Constitution", a ajouté ce député du Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur).
Depuis son arrivée au pouvoir en 2002, l'AKP du président Recep tayyip Erdogan est accusé par ses détracteurs de vouloir islamiser la société turque.
"Le chaos qui règne au Moyen-Orient est le fruit des mentalités qui, comme vous, font de la religion un instrument de la politique", a vivement réagi sur Twitter le chef de l'opposition kémaliste, Kemal Kiliçdaroglu. "La laïcité existe pour que chacun puisse vivre sa religion librement, M. Kahraman !", a-t-il ajouté.
La présence de la religion dans la politique a longtemps été taboue en Turquie. Gardienne autoproclamée des principes laïques de Mustafa Kemal, fondateur de la République turque, l'armée est intervenue à plusieurs reprises pour prévenir tout "péril islamiste".