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Tel est le principal enseignement d’une récente étude effectuée par le ministère des MRE et des Affaires de la migration (MMREAM) auprès de 2.146 jeunes MRE de 15 à 30 ans résidant dans six pays, à savoir l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, l’Italie et les Pays Bas.
Selon ce document, 68,8% de ces jeunes maîtrisent les langues nationales, trois-quarts d’entre eux se rendent dans le Royaume au moins une fois par an et 75% de leurs séjours dépassent les 16 jours chacun. En termes de retour, 62% d’entre eux envisagent de revenir au Maroc pour y investir, 48% pour y occuper un poste et 50% pour y passer leur retraite. D’un autre côté, 85% des jeunes MRE préfèrent que leurs conjoints soient marocains. Cependant, 75% des enquêtés disent ressentir fortement le sentiment d’appartenance à leur pays d’accueil et 57% s’identifient comme porteurs de deux cultures à la fois.
Les résultats concernant l’intégration dans les pays d’accueil révèlent que 23% de ces jeunes MRE se sentent discriminés au niveau de l’accès au marché de l’emploi et 36% ont des difficultés à poursuivre leurs études. Par ailleurs, seulement moins de 10% des sondés militent dans un parti politique ou une association et 38% participent aux élections.
Que peut-on dire de ces résultats ? D’abord, les conclusions n’ont rien de nouveau. Un récent sondage commandité par le Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME) à l'Institut BVA a débouché sur les mêmes résultats. Mené auprès de 2.610 jeunes Marocains âgés de 18 à 34 ans et résidant dans six pays européens, ce sondage les décrit comme attachés à leur pays d'origine – 94% se sentent Marocains et 43% soutiennent financièrement un proche au Maroc – tout en étant pleinement insérés dans les sociétés d'accueil.
Des conclusions qui nous poussent à nous interroger sur le bien-fondé de l’étude du MMREAM alors qu’elle n’a fait que reprendre les mêmes axes déclinés par le sondage du CCME, à savoir la situation des jeunes MRE dans leurs pays de résidence respectifs (Italie, Espagne, France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne), les repères identitaires au Maroc et les liens tangibles avec le Royaume. Une question des plus légitimes puisqu’une troisième étude sur les jeunes MRE a été réalisée en août dernier dans le cadre du projet Sharaka, une initiative conjointe du ministère chargé des Marocains résidant à l’étranger et des Affaires de la migration et l’Agence publique Expertise France.
Ensuite, de quels jeunes parle-t-on ? Est-ce qu’il s’agit de personnes nées au Maroc ou en Europe ? Est-ce qu’ils sont naturalisés ou pas ? S’agit-il des descendants de primo-migrants nés en Europe ou de jeunes venus poursuivre des études et qui, une fois arrivés au bout de leur cursus, se sont insérés dans le marché local du travail et ont décidé de rester sur le Vieux Continent ? Les appeler tout simplement jeunes MRE ne serait-il pas, comme l’a bien affirmé le chercheur Mahieu Rilke, à la fois juridiquement erroné et incorrect concernant des personnes nées en Europe mais d’origine marocaine ?
Enfin, la question de l’attachement à la mère patrie pose également problème. En effet, nombreux sont les chercheurs qui estiment que l’analyse du sentiment d’appartenance d’une personne demeure malaisée. « Tous les indicateurs mesurables trahissent en quelque sorte ce sentiment profond qui existe chez tout le monde, qui change, évolue, régresse selon les circonstances. Comment analyser donc un objet « éphémère » dont la substance la plus palpable se résume en quelques mots ou actes souvent séparés ?», s’interroge le sociologue Youssef Sadik. En outre, cette notion d’attachement demeure polémique dans la mesure où ces jeunes sont plutôt partagés entre deux cultures parfois très difficiles à assumer. Les différences de comportements sont de plus en plus multiples comme en attestent, à titre d’exemple, certaines pratiques religieuses (conversion au chiisme de jeunes MRE de Belgique et des Pays-Bas alors que le dogme marocain est sunnite achaârite).
La question de l’intégration suscite également la polémique. En effet, les conclusions de l’étude du MMREAM vont à l’encontre de celles présentées dans l’ouvrage collectif de la Fondation Hassan II pour les MRE intitulé « Marocains de l’Extérieur 2013 », qui estiment que « les jeunes Marocains ou descendants des Marocains se sentent plus chez eux et s’engagent fortement dans les débats sur les questions qui affectent leur vie quotidienne, alors que l’ancienne génération pense toujours sa présence dans les pays européens comme temporaire, et elle est considérée comme ayant fait peu d’efforts d’adaptation culturelle pour vivre dans les pays d’accueil ».
Mieux, le sondage BVA sur les jeunes MRE avait notamment révélé que nombreux sont ceux qui participent à la vie politique de leurs pays de résidence, et seuls les MRE d'Espagne estiment qu'il est plus important de s'engager au Maroc que dans la péninsule Ibérique.