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Si la violence de la décennie 1990 a reflué, la rébellion s’est radicalisée, faisant allégeance à Al Qaïda, et l’état d’urgence instauré il y a 17 ans reste en vigueur, ce qui n’empêche pas la frustration de la population de dégénérer régulièrement en émeutes dans les villes de province.
Le ministre algérien de l’Intérieur a estimé il y a trois semaines que le “terrorisme” reculait dans ses principaux bastions, mais qu’il était encore en mesure d’organiser des attentats “spectaculaires” afin de profiter de la caisse de résonance de la campagne électorale.
Professeur d’administration publique à l’Université d’Etat de Californie, Hamoud Salhi doute toutefois que le scrutin, qui se déroule dans un climat d’apathie générale, débouche en lui-même sur un retour aux violences des années 1990 qui ont fait jusqu’à 150.000 morts.
“Je m’attends à un accroissement de la violence, mais je pense que l’Etat est aujourd’hui très fort”, déclare-t-il. Le pouvoir actuel est crédité d’avoir replacé le pays sur le chemin de la stabilité, grâce notamment à sa politique d’amnistie de milliers d’ancien rebelles.
Le président Bouteflika, qui n’a pas de concurrents à sa mesure parmi les cinq candidats qui se présentent face à lui, a promis de consacrer après sa réélection 150 milliards de dollars au redressement du secteur économique non-pétrolier déclinant, au logement et aux infrastructures.
Mais les rangs des chômeurs grossissent chaque jour parmi les jeunes, qui forment l’immense majorité de la population, et le pouvoir a du mal à s’attacher une population désabusée et à priver les islamistes armés de tout soutien populaire.
“Le problème aujourd’hui, c’est l’absence de confiance entre les représentants de l’Etat et les citoyens. Les groupes prônant l’extrême violence seront probablement en mesure de recruter tant que l’espoir de la jeunesse continuera à diminuer”, analyse Khadija Mohsen- Finan, de l’Institut français des relations internationales (Ifri).
Le ressentiment de la jeunesse éclate parfois en province, mettant aux prises les forces de sécurité à des émeutiers armés de pierres et de bâtons qui érigent des barricades de pneus enflammés, s’en prennent aux véhicules officiels et saccagent des immeubles. Les partisans de Bouteflika, qui comptent dans leurs rangs de nombreux citadins laïques, espèrent qu’une forte participation, ce jeudi, lui donnera un mandat clair pour continuer son entreprise de redressement national après 17 ans d’islamisme armé. L’Assemblée nationale populaire a modifié la constitution en novembre pour supprimer la limitation à deux du nombre de quinquennats présidentiels et permettre à Bouteflika, dont la carrière politique a débuté dès l’indépendance de l’Algérie, en 1962, de se maintenir au pouvoir à 72 ans.
Cette initiative, dans laquelle ses détracteurs voient le prélude à une présidence à vie, implique nécessairement l’aval des “décideurs” militaires, mais le recours au parlement plutôt qu’à un référendum a creusé le fossé entre Bouteflika et la société civile, estime un analyste.
Pour Amel Boubakeur, du Carnegie Middle East Center de Beyrouth, “le fait qu’on n’ait même pas respecté une façade de démocratie a perturbé un grand nombre de gens”.