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«Essais poétiques», tel est l’identifiant générique pour lequel a opté l’écrivain. Afin, semble-t-il, de donner libre cours à sa plume. De ne pas se cantonner dans une aire créative cloisonnée par les supposées frontières hermétiques entre la rythmique poétique et l’assertion prosaïque. De faire don, à la tribu des lecteurs en voie d’extinction, d’une félicité générée par le passage d’un genre à l’autre, en adoptant une démarche itinérante et un style qu’Abdellatif Laabi qualifie d’ « itinéraire ».
En effet, le terreau « Errances » est enluminé par des souffles poétiques nacrés, en vers ou en prose, où la musicalité et la rythmique s’autoproclament souveraines sans partage :
« Les mots vibrent
Les pensées se livrentLes yeux rêventEt les vers se lèvent » (p : 50).
Le mot « souffle » est, évidemment, entendu, ici, dans le sens de Heidegger : «Le souffle… signifie le verbe et l’essence de la langue. Ceux qui risquent ce souffle s’exposent au risque de la langue. Ils sont les disants qui disent plus. Car ce souffle dont ils sont les plus risquants n’est pas le dire en général ; ce souffle est un autre souffle, un autre dire que le dire ordinaire des hommes. »
Nour-Eddine Fahmi, à travers « Errances », appartient bel et bien à ces « disants qui disent plus » et, de ses passages poétiques, émanent les effluves de « ce souffle » qui « est un autre souffle » :
« Absence Apreté de l’exil Tourment de l’ombre esseulée
Avec tes profondes rides Tu accuses l’insolite Et moi
Dévoré par le vide J’attends avec espéranceLe retout d’un regard mutilé » (p : 79).
Mais sur ce terreau cohabite, avec ces souffles poétiques, comme le Yin et le Yang de la culture chinoise, la prose réflexive et discursive. Le questionnement, non dépourvu de tension, du « Je », qui est, simultanément « soi » et « un autre », de l’Autre, et du monde :
« Vivre non loin d’un éclat frémissant et déguster avec sublimité les sonorités vides retentissantes d’un chant, d’un vent, d’une pluie… Telle est ma devise pour tourner le dos à tout passé fané » (p : 18).
L’interpellation, tantôt dégressive, tantôt progressive, du silence, de l’écriture, du désarroi, de l’espérance, de l’amour en tant qu’errance merveilleuse, du vide et de moult thèmes qui fondent, tous, une vision dualiste des êtres et des choses singulière à la voix de Fahmi.
Néanmoins, la terre d’ « Errances », dans ses composantes poétique et prosaïque, est fondamentalement poétique. Car elle s’approprie, avec grâce et élégance, la prophétique phrase de Kenji Mizoguchi qui édicte qu’ « Il faut habiter la terre poétiquement ».
(*) : Lecture présentée à Ben Slimane, le 23 février 2013, lors d’une manifestation culturelle organisée par le Cercle Culturel Espace Boulhaut et le forum « Bac ».