Le projet de réorganisation du CNDH fait débat

Des associations font dans le lobbying avant sa présentation devant la Chambre des conseillers


Hassan Bentaleb
Jeudi 8 Février 2018

 Le projet de loi n°76-15 relatif à la réorganisation du CNDH a été adopté avant-hier par la Chambre des représentants et doit passer prochainement devant la Chambre des conseillers. Pourtant, ce texte demeure au cœur d'une polémique entre le PJD et la société civile. Car si le parti de la Lampe défend une représentativité des parlementaires au sein du CNDH, les ONG sont plutôt favorables à un organe plus indépendant et plus crédible.
« Ce parti s’est toujours considéré comme exclu du CNDH. En effet, il n’a pas cessé de multiplier, depuis 2011, les déclarations et les sorties médiatiques via ses branches associatives (Mountada Al Karama et Mountada Zahra) mettant l’accent sur  son élimination du Conseil et de ses conseils régionaux au motif qu’il représente un courant politique à référence islamique. Pour le PJD, le parti doit être présent et d’une façon non formelle au sein du CNDH puisqu’il représente une partie de la société à référence religieuse », nous a expliqué Aziz Idamine, président du Centre des jeunes, des droits et des libertés (CJDL). Et de poursuivre : « Pourtant, le PJD tombe dans ses propres contradictions. En fait, la représentation au sein du CNDH ne se base pas sur des critères idéologiques ou religieux puisque les principes de Paris sur le statut des institutions nationales des droits de l’Homme préconisent que la composition de ces établissements doit comporter l’ensemble des courants de pensée et sensibilités politiques et religieuses existant dans la société. D’ailleurs, il faut préciser que le PJD a été représenté au sein du CNDH via Mountada Zahra qui a été présenté au sein du Conseil régional de Rabat. Mais, la représentante du PJD a dû se retirer suite à une décision politique du parti de la Lampe qui a demandé une large représentativité ».
Aujourd’hui, le président du CJDL estime que le PJD mène le combat de la représentativité via l’article 35 dudit projet de loi qui préconise la désignation de quatre parlementaires au sein du CNDH. « La question de désignation des parlementaires n’a pas été posée dans les perspectives de la défense des droits de l’Homme et de la collaboration entre les institutions nationales et le Parlement, mais plutôt dans un cadre purement politique et partisan », nous a-t-il précisé. Et d’ajouter : « Le PJD a imposé cette représentativité. C’est une manière de s’introduire dans le CNDH via le canal parlementaire alors que les institutions internationales ont mis en garde contre toute politisation des établissements des droits de l’Homme. En clair, la question de la représentativité des députés traduit un conflit politique plus qu’un débat d’idées sur qui a le droit ou non d’être représenté au sein du CNDH. Les principes de Paris n’excluent pas l’existence de parlementaires dans ces organes mais l’évolution des pratiques internationales exige que ces établissements soient épargnés des conflits politiques et idéologiques. Les députés sont les représentants de la nation et peuvent donc collaborer avec le CNDH autrement ».
Mais, il n’y a pas que cette désignation qui pose problème, la mise en place d’un comité composé des présidents de la Cour des comptes et de la Cour de cassation ainsi que du secrétaire général du Conseil supérieur des Oulémas l’est également. En fait, la société civile s’interroge sur la désignation de telles personnalités pour la sélection des associations qui siègeront au sein du CNDH. « Si les présidents des Cours des comptes et de cassation sont des professionnels de la justice, on se demande quelle est leur relation avec la société civile. Quelle relation entretiennent-ils avec les mouvements de défense des droits de la femme, des jeunes, des personnes en situation de handicap, etc ?». Et de poursuivre : « On s’interroge également sur la  valeur ajoutée par le Conseil supérieur des Oulémas alors qu’il s’agit d’un organe institutionnel qui n’a rien à voir avec les débats qui secouent la société marocaine (peine de mort, liberté individuelle...). La question est donc de savoir comment ce comité pourrait choisir les associations et sur quels critères. »
Aziz Idamine demande de multiplier le nombre d’associations représentées. Pour lui, le CNDH doit revoir son statut. « Il est temps que cet établissement rompe avec son rôle purement administratif et d’expertise. Nous avons des craintes que le CNDH se transforme en simple bureau d’études chargé uniquement   d’élaborer des études et des rapports », a-t-il noté. Et de conclure : « Une représentativité large des associations donnera un aspect plus politique à cet organe et insufflera un nouvel élan. L’existence au sein du CNDH d’associations connues pour leur lutte et qui jouissent d’une certaine légitimité est primordiale pour que cet organe ne soit pas isolé de la société et de l’évolution du mouvement des droits de l’Homme ».

 

Réflexion sur la mise en place du Mécanisme national de prévention de la torture au Maroc

Des membres du CNDH en conclave à Rabat

Des membres et cadres du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) ont pris part, mardi à Rabat, à une session de formation, initiée en partenariat avec le Conseil de l'Europe, dans l'optique de la mise en place au Maroc du Mécanisme national de la prévention de la torture. Animée par le président de l'Institution nationale des droits de l'Homme de la République d'Arménie, Arman Tatoyan, cette session de formation, la sixième dans le cadre d’un programme de formation en la matière, a constitué une opportunité pour les membres du CNDH d’approfondir la réflexion et le débat autour de la mise en place du Mécanisme national de prévention de la torture au Maroc.
Dans une déclaration à la presse, le directeur de l'Institut national de formation aux droits de l'Homme (INFDH), Younès Ajarrai a fait savoir que cette rencontre s'inscrit dans le cadre de la formation des membres et cadres du CNDH, en préparation de l’entrée en vigueur du Mécanisme national de la prévention contre la torture.
M. Ajarrai a souligné l'importance de la présence du président de l’institution nationale des droits de l’Homme de la République d'Arménie pour échanger les bonnes pratiques en matière de droits de l’Homme, particulièrement au niveau du Mécanisme concerné.
Plusieurs cadres et membres du CNDH ont effectué un certain nombre de visites dans plusieurs pays, notamment l’Arménie, dont l’expérience a permis de comprendre le fonctionnement de ce Mécanisme, sa gestion et son organisation, a ajouté le responsable, émettant le souhait de continuer d’établir des relations fructueuses entre le CNDH et d'autres partenaires.
Il a, par ailleurs, fait savoir que le Mécanisme national de prévention contre la torture est prévu par le projet de la loi relative au CNDH, en cours de discussion au Parlement, précisant qu'il englobe également les mécanismes de recours national accessible aux enfants victimes de ces violations, de plainte concernant les enfants victimes des violations des droits de l'enfant et de consolidation, protection et suivi de la mise en œuvre de la Convention sur les personnes en situation de handicap.
De son côté, M. Tatoyan a indiqué que l’objectif de cette formation est de discuter autour de la question de la prévention de la torture et de partager les expériences en matière de gestion du mécanisme de la prévention de la torture.
Il s’agit également d’une occasion de partager les méthodes de travail adoptées en la matière et de discuter des défis à relever, a noté M. Tatoyan, soulignant l'importance de renforcer la coopération avec plusieurs partenaires et de tirer les leçons des expériences des pays leaders en la matière.
Le responsable arménien s'est, par ailleurs, félicité de l'organisation de cette formation, qui a été l’occasion de découvrir le professionnalisme du CNDH, de se pencher sur l’expérience du Maroc en matière de droits de l'Homme et d'engager un échange d'expériences fructueux, rappelant, dans ce sens, la visite qu'ont effectuée les représentants du CNDH en Arménie en 2017. Initié par le CNDH, en partenariat avec le Conseil de l'Europe, le programme a déjà permis l'organisation de cinq sessions de formation en mars, mai, juillet, octobre et décembre 2017 et ce, afin d'approfondir la réflexion et le débat autour de la mise en place du Mécanisme national de prévention de la torture.
Les participants au programme ont visité l'Arménie, le Portugal, la Croatie, la France, les Pays-Bas et l'Autriche, afin de s'inspirer de leurs expériences, de se familiariser avec le travail des mécanismes nationaux de prévention de la torture dans ces pays et de réaliser des études comparatives.


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