-
Les traces d'un rituel aborigène vieux de 12.000 ans découvertes en Australie
-
Aux Etats-Unis, la guerre des mangeurs de hot dogs bat son plein
-
Séparée de sa famille, elle retrouve ses deux sœurs 56 ans après
-
A l'Opéra Bastille, une pièce aux mille choristes amateurs inspirée du monde sportif
-
Comment restaurer les récifs coralliens peut contribuer à les préserver
![Le poulet, un autre signe de "l'époque de l'humain" Le poulet, un autre signe de "l'époque de l'humain"](https://www.libe.ma/photo/art/default/74054989-51505912.jpg?v=1689367556)
C'est la conclusion à laquelle sont parvenus des scientifiques qui ont documenté l'avènement de l'Anthropocène - une proposition de nouvelle époque géologique physiquement marquée par l'empreinte de l'homme sur la planète, dont les systèmes naturels ont été rapidement et radicalement bouleversés au siècle dernier.
D'autres traces, peut-être plus spectaculaires en apparence, témoigneront de cette rupture: la hausse soudaine du CO2 ou du méthane, les retombées radioactives de tests nucléaires, des microplastiques omniprésents ou le développement d'espèces invasives...
Mais les os de poulet sont parmi les plus révélateurs de l'empreinte laissée par l'humanité, à plus d'un titre.
Pour commencer, il s'agit d'une invention humaine... "La viande du poulet moderne est méconnaissable par rapport à celle de ses ancêtres ou de ses équivalents sauvages", souligne la géologue Carys Bennett, autrice d'une étude sur le sujet.
"La taille du corps, la forme du squelette, la chimie des os, la génétique: tout est différent", remarque-t-elle.
En d'autres termes, le poulet moderne est la preuve de la capacité de l'humain à modifier la nature.
Ses origines remontent aux jungles de l'Asie du Sud-Est, où le coq sauvage (gallus gallus) a été domestiqué il y a quelque 8.000 ans.
L'espèce a longtemps été recherchée pour sa viande et ses oeufs mais sa transformation accélérée pour devenir la créature qui peuple les supermarchés du monde entier n'a commencé qu'après la Seconde Guerre mondiale.
"L'évolution prend habituellement des millions d'années mais dans ce cas précis le processus a mis seulement quelques décennies pour produire une nouvelle forme d'animal", remarque Jan Zalasiewicz, professeur de paléobiologie à l'Université de Leicester.
Ce scientifique a présidé le groupe de travail sur l'Anthropocène, qui a conclu que cette époque géologique avait succédé au milieu du XXe siècle à l'Holocène, commencée il y a 11.700 ans à la fin de la dernière époque glaciaire.
L'omniprésence des poulets fournit un autre indice de ces bouleversements: partout où se trouvent des humains, on retrouve les restes de leur source préférée de protéine animale.
On compte aujourd'hui quelque 33 milliards de ces volatiles, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). La biomasse des poulets domestiqués pèse plus de trois fois celle de toutes les espèces d'oiseaux sauvages combinées.
Au moins 25 millions sont tués chaque jour pour devenir du poulet tikka au Penjab, des yakitoris au Japon, un yassa au Sénégal ou des nuggets dans les KFC ou autres McDonald's du monde entier.
Contrairement au boeuf ou au porc, qui font l'objet d'interdits dans certaines religions, le poulet est quasi-universel.
"Les poulets sont un symbole de la manière dont notre biosphère a changé et est désormais dominée par la consommation et l'utilisation des ressources au profit des humains", résume Carys Bennett, qui a quitté l'université pour rejoindre l'association de défense des droits des animaux PETA.
"La masse énorme des os de poulet jetés dans le monde entier laissera une trace évidente dans les analyses géologiques du futur", conclut-elle.