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Le passeport marocain donne accès à 63 destinations sans obligation de visa pour son détenteur, a indiqué récemment un communiqué du Henley Passport Index 2020, qui classe les passeports du monde en fonction du nombre de pays qui les acceptent sans visa préalable.
Basé sur des données exclusives de l'Association du transport aérien international (IATA), Henley Passport Index place le Maroc derrière la Tunisie (74ème place) et devant l’Algérie (92ème place) et la Libye (102ème). La Mauritanie arrive en 84ème place.
Au niveau du monde arabe, les pays du Moyen-Orient semblent consolider leurs bonnes positions grâce à leurs efforts visant à stimuler le commerce et le tourisme. Les Emirats arabes unis (EAU) et l'Arabie Saoudite ont gagné quatre places dans ce classement mondial, tandis qu'Oman a gravi trois marches. Les EAU ont progressé de 47 places au cours des 10 dernières années et se situent à présent à la 18ème place, avec un score de 171. L'Arabie Saoudite occupe, quant à elle, la 66ème place, ses citoyens pouvant accéder à 77 destinations dans le monde sans visa préalable, tandis qu'Oman occupe la 64ème place, avec un score de 79.
Lorraine Charles, associée de recherche au Centre for Business Research de l'Université de Cambridge, observe, cependant, que les tendances en matière de migration et de mobilité au Moyen-Orient sont largement motivées par des conflits qui devraient se poursuivre en 2020. Citant l'aggravation des conflits en Libye, en Syrie et au Yémen, et avec de nouvelles manifestations anti-gouvernementales en Egypte, en Irak et au Liban, elle note que «les déplacements forcés continueront très probablement de dominer les schémas de migration et de mobilité au Moyen-Orient».
Les pays asiatiques ont eux aussi beaucoup progressé dans ce classement. Pour la troisième année consécutive, le Japon a obtenu la première place de cet indice avec un score de 191. Singapour conserve sa deuxième place avec un score de 190, tandis que la Corée du Sud occupe la 3ème place aux côtés de l'Allemagne. Le passeport de ces deux pays donne accès à 189 destinations dans le monde.
Les Etats-Unis et le Royaume-Uni poursuivent leur régression dans le classement de cet indice tout en restant dans le Top 10 aux côtés de la Finlande et de l'Italie qui se partagent la 4ème place, avec un score de 188, tandis que le Danemark, le Luxembourg et l'Espagne occupent ensemble la 5ème place, avec un score de 187.
En bas du classement, on trouve l'Afghanistan dont les ressortissants ne peuvent visiter que 26 destinations sans visa, l’Irak (28 pays), la Syrie (29) et le Pakistan (32).
Christian H. Kaelin, président de Henley & Partners et inventeur du concept d'index des passeports, estime qu’un bon placement dans ce classement est lié aux politiques de portes ouvertes et à l’introduction d’accords commerciaux mutuellement avantageux comme c’est le cas pour les pays asiatiques. « Au cours des dernières années, nous avons vu le monde s'adapter à la mobilité comme condition permanente de la vie mondiale. Les derniers classements montrent que les pays qui adhèrent à cette réalité sont en plein essor, leurs citoyens bénéficiant d'un pouvoir de passeport toujours croissant et de la gamme d'avantages qui l'accompagnent», a-t-il affirmé.
A ce propos, Juerg Steffen, PDG de Henley & Partners, a indiqué que la demande tout comme l'offre pour les programmes de migration des investissements, tant pour les riches investisseurs que pour les pays qui les proposent, s'accélèrent et augmentent à l'échelle mondiale. « L'année dernière a montré que, de plus en plus, les nations et les individus riches voient la migration des investissements comme un avantage concurrentiel. Aujourd'hui, elle est considérée comme une exigence absolue dans un monde instable où la concurrence pour les capitaux est féroce, et il est très clair que nous en verrons davantage en 2020», a-t-il déclaré.
Le Henley Passport Index 2020 a précisé que les pays dotés de programmes de citoyenneté par investissement continuent de consolider leurs positions au niveau de cet indice. Ainsi, Malte occupe la 9ème place, avec un accès à 183 destinations dans le monde, tandis que le Monténégro conserve sa 46ème place, avec un score de 124 destinations. Dans les Caraïbes, Saint-Kitts-et-Nevis et Antigua et Barbuda ont obtenu respectivement les 27ème et 30ème places.
De leur côté, Uğur Altundal et Ömer Zarpli, chercheurs en sciences politiques, ont constaté qu'il existe une corrélation fortement positive entre la liberté de voyager et d'autres types de libertés (économiques, politiques, libertés individuelles). Ils ont souligné qu'«il existe une corrélation distincte entre la liberté de visa et la liberté d'investissement, par exemple. A l'instar de la liberté commerciale, les pays bien classés en matière de liberté d'investissement ont généralement des passeports plus solides. Des Etats européens tels que l'Autriche, Malte et la Suisse montrent clairement que les pays ayant un environnement favorable aux entreprises ont tendance à obtenir des scores élevés en matière de pouvoir des passeports. De même, en utilisant l'indice de la liberté humaine, nous avons trouvé une forte corrélation entre la liberté personnelle et la liberté de voyager».
Pourtant, certains analystes ne partagent pas cette idée de corrélation entre économie et liberté de mobilité. Ils constatent que les pays dont les économies sont les plus puissantes ne sont pas toujours ceux qui offrent le plus de possibilités à leurs citoyens. Tel est le cas du passeport indien, qui ne permet de voyager facilement que dans 50 pays, du passeport chinois (60 pays) ou du passeport saoudien (70 pays en 2018).
D’après eux, seuls les pays dont les passeports offrent les meilleures facilités d’accès à l’espace Schengen et aux Etats-Unis, deux destinations clés aussi bien pour le tourisme que pour les affaires, peuvent être considérés comme vraiment “précieux”, souligne Dimitry Kochenov, enseignant du droit constitutionnel à l’Université de Groningen, cité par le site courrierinternational.com.
Les rédacteurs du dernier rapport Henley Passport Index ont eux aussi conclu que malgré la progression de la liberté de mobilité dans le monde, cette dernière n’est pas garantie à tous et qu’un fossé croissant se creuse entre les pays en matière de liberté de voyager. Le rapport cite l’exemple des détenteurs de passeports japonais qui peuvent accéder à 165 destinations de plus que les ressortissants afghans. L’analyse des données historiques de l’indice révèle que cet énorme écart ne date pas d’aujourd’hui, mais depuis la création de l’indice en 2006.