Le nouvel opus traite de la question sensible du déracinement que l’auteur connaît sur le bout des doigts, oserons-nous dire, pour en avoir fait le thème de sa thèse, il y a 40 ans (un extrait de cet important travail de recherche paraîtra au Seuil en 1977 sous le titre « La Plus haute des solitudes »).
L’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun récidive. Presque quarante ans après sa thèse en psychologie sociale sur les troubles liés au déracinement, qui affectaient les premiers travailleurs immigrés en France, l’auteur francophone le plus traduit dans le monde a choisi de remonter le cours du passé et propose une œuvre dont la trame surfe sur les questions que se posent au quotidien nombre d’immigrés au seuil de la vie.
L’écrivain effectue là un véritable retour romanesque aux origines à travers son dernier roman au titre très évocateur, « Au pays », qui relate l’histoire de Mohamed, un travailleur immigré arrivé en France au début des années soixante.
Après une quarantaine d’années de dur labeur, celui-ci apprend que le jour de la retraite a sonné. Ne sachant quoi faire de sa nouvelle vie, Mohamed se retrouve désemparé et déprime. Et décide de rentrer au Maroc pour y construire dans son village une immense maison où chacun de ses cinq enfants aura sa chambre. « Il pense que ses enfants vont le suivre et venir vivre avec lui et leur mère dans cette maison. Il les attendra dans un vieux fauteuil au seuil de ce qu’il a fait construire. Il les attendra et ils ne viendront pas. Il en mourra».
Tahar Ben Jelloun naît à Fès le 1er décembre 1944. L’ancien élève du lycée français de Tanger a suivi des études supérieures de philosophie à l'Université Mohammed-V de Rabat. Très inspiré et passionné de poésie, il publie ses premiers poèmes en 1971 sous l’intitulé « Hommes sous linceul de silence ». Après avoir enseigné la philosophie au Maroc, il décide de poursuivre ses études en France où il obtient un doctorat de psychiatrie sociale en 1975 avant de s’y installer. 10 ans plus tard, en 1985, il publie «L'Enfant de sable» (roman) qui contribue à le rendre célèbre. Deux après, ce succès, il obtient le Prix Goncourt en 1987 avec « La Nuit sacrée ».
Ecrivain prolifique, il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, essentiellement des romans, nouvelles, recueils de poèmes et essais qui lui valent considération et beaucoup d’attention du monde de la littérature. Des œuvres souvent traduites dans de nombreuses langues, élargissant ainsi le rayonnement de l’écrivain également connu comme un pourfendeur du racisme et un défenseur des droits de l’Homme.
L’écrivain est membre du jury Goncourt depuis 2008.
Soulignons enfin que l’écrivain est attendu également le 3 avril prochain à Rome où il recevra le Prix de la Fondation DUCCI pour la paix.
Bibliographie :
-Hommes sous linceul de silence, 1971
-Les amandiers sont morts de leurs blessures, poèmes, 1976 (Prix de l'Amitié franco-arabe 1976)
-La Mémoire future, Anthologie de la nouvelle poésie du Maroc, 1976
-La Plus haute des solitudes, 1977
-Moha le fou, Moha le sage, 1978 (Prix des bibliothécaires de France, Prix Radio-Monte-Carlo 1979)
-La Prière de l'absent, 1981
-L'Enfant de sable, 1985
-La Nuit sacrée, 1987 (Prix Goncourt)
-Les Yeux baissés, roman, 1991
-Éloge de l'amitié1994
-L'Homme rompu, 1994
-Les Raisins de la galère, 1996
-La Nuit de l'erreur, roman, 1997
-Le Racisme expliqué à ma fille, 1997
-L'Auberge des pauvres, 1997
-L'Islam expliqué aux enfants, 2002
-Partir, 2006
-Yemma, 2007
-Au pays, 2009.