Le chef de l'armée soudanaise retrouve son quartier général à Khartoum


Libé
Lundi 27 Janvier 2025

Le chef de l'armée soudanaise, le général Abdel Fattah al-Burhane, a retrouvé dimanche son quartier général à Khartoum, qu'il avait dû abandonner en août 2023 à ses rivaux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Ce retour intervient deux jours après une attaque sanglante de drone contre le principal hôpital d'El-Facher -la capitale du Darfour-nord, dans l'ouest, assiégée par les FSR, qui a suscité l'indignation des Nations unies et de l'Arabie Saoudite qui finance cet établissement.

"Nos forces sont au meilleur de leur forme", a déclaré le général Burhane dans le quartier général, selon une vidéo diffusée par l'armée. Il a ajouté que les FSR de son rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, étaient "condamnées à disparaître".

La reconquête du QG est la plus grande victoire de l'armée dans la capitale depuis la reprise d'Omdurman, ville jumelle de Khartoum sur la rive ouest du Nil, il y a près d'un an.
L'armée soudanaise contrôle, selon des témoins, la majeure partie de Bahri (Khartoum-Nord), ainsi que le nord et centre d'Omdurman. Dans le sud de Khartoum, elle tient aussi la base du Corps blindé.

Au début du conflit, l'armée avait perdu Khartoum et Omdurman. Encerclé dans son quartier général, le général Burhane s'était échappé en hélicoptère en août 2023 pour Port-Soudan, devenu la capitale de facto du pays.

Dans un communiqué vendredi, l'armée avait déclaré avoir fait la jonction entre ses troupes à Khartoum-Nord et Omdurman et celles à proximité du quartier général.
L'armée avait ajouté avoir "expulsé" les FSR de la raffinerie de Jaili, au nord de la capitale, la plus grande du pays, dont les paramilitaires revendiquaient le contrôle depuis le début de la guerre.

Il y a deux semaines, elle avait repris le contrôle de Wad Madani, au sud de Khartoum, sécurisant un carrefour clé avec les États environnants.
Le conflit, déclenché en avril 2023, a tué des dizaines de milliers de personnes et déraciné plus de 12 millions d'habitants au Soudan, où la famine sévit dans certaines régions.

Le pape François a déploré dimanche que le pays soit le théâtre de "la plus grave crise humanitaire au monde". Il a appelé à la fin des hostilités et la communauté internationale à fournir de l'aide humanitaire et "aider les belligérants à trouver rapidement le chemin de la paix".

Au Darfour-Nord, l'attaque visant l'hôpital saoudien d'El-Facher a fait 70 morts et 19 blessés parmi les patients et leurs accompagnants, a indiqué le chef de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, sur X. "L'effroyable attaque a eu lieu alors que l'hôpital était plein de patients recevant des soins", a-t-il ajouté.

La coordinatrice de l'agence d'action humanitaire des Nations Unies (OCHA) au Soudan a affirmé que l'attaque -dont l'AFP n'a pu vérifier l'origine de manière indépendante- "aurait été menée par les FSR".
Clementine Nkweta-Salami a condamné "dans les termes les plus forts" cette "violation choquante du droit international humanitaire".

Les FSR ont accusé dimanche l'armée et ses alliés d'avoir frappé l'hôpital. L'attaque de drone survenue vendredi soir a détruit le bâtiment des urgences de l'hôpital, a indiqué à l'AFP une source médicale.
Dans une rare déclaration sur le conflit, l'Arabie saoudite a aussi dénoncé dimanche une "violation du droit international humanitaire".

Les FSR, qui contrôlent la majorité du Darfour, assiègent El-Facher depuis mai.
Selon des militants locaux, les FSR avaient exigé que l'armée et ses alliés quittent la ville avant mercredi, en prévision d'une offensive.

Des combats intermittents y sont signalés depuis, notamment des tirs d'artillerie des FSR sur le camp de déplacés d'Abou Chouk, touché par la famine et où des bombardements ont tué huit personnes vendredi, selon une organisation de la société civile.

Selon une source médicale, les urgences de l'hôpital saoudien avaient déjà été ciblées par un drone des FSR "il y a quelques semaines".
Selon l'OMS, un autre établissement à Al-Malha, au nord d'El-Facher, a également été attaqué.

Les deux camps, contre lesquels les Etats-Unis ont annoncé des sanctions, sont accusés de cibler des civils et bombarder sans discrimination des zones résidentielles, les FSR étant spécifiquement accusées de nettoyage ethnique, violences sexuelles systématiques et de siège de villes entières.
Jusqu'à 80% des établissements de santé du pays sont hors service, selon les chiffres officiels.

"Nous continuons d'appeler à la cessation de toutes les attaques contre les soins de santé et à permettre un accès complet pour la restauration rapide des installations endommagées", a souligné M. Ghebreyesus. "Par-dessus tout, le peuple soudanais a besoin de paix. Le meilleur remède est la paix", a-t-il ajouté.


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