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Personnage oublié de l’Histoire, Chocolat est campé par le fameux Omar Sy, récompensé
en 2012 par le César du meilleur acteur
pour son rôle dans «Intouchables».
Après «Mauvaise foi», «Omar m'a tué» et «Bodybuilder», le célèbre acteur maroco-français Roschdy Zem passe, pour la quatrième fois, derrière la caméra à travers «Chocolat», un film aussi bouleversant qu’émouvant. Cette fois, Roschdy s'attaque au destin hors du commun du premier artiste noir de la scène française, Rafaël Padilla alias Chocolat, campé par le brillantissime Omar Sy. Librement inspiré de sa vie, le film retrace donc l’histoire de Padilla et de son précieux acolyte Tudor Hall, alias «Footit», avant une violente séparation. Chocolat et Footit ont connu un succès phénoménal sur la scène parisienne, de la fin des années 1800 jusqu'en 1910. L'argent, le succès, la célébrité et les discriminations ont malheureusement fini par faire voler en éclats la complicité entre les deux artistes faisant retomber Chocolat dans un total anonymat, oublié de tous jusqu'à sa mort en 1917 à Bordeaux.
Né esclave à Cuba, vendu à 8 ans à un marchand espagnol, il fuira avant de faire ses débuts dans l’univers du cirque. Il formera avec le célèbre clown George Footit, un duo qui tiendra le haut de l’affiche et sera la coqueluche du Tout Paris pendant plus de 15 ans. C’est dans une France coloniale et xénophobe que Chocolat va pourtant connaître l’apogée de son succès.
Chocolat c'est le clown auguste, souffre-douleur et binôme de Footit, clown blanc sadique, «totalement différents mais indissociables, les deux faces d’une même pièce», comme le dit Chocolat. Et pourtant, dans l’ascension fulgurante du duo, Chocolat se perd. «Le nègre qui se fait botter les fesses tous les soirs par un petit blanc» va sombrer doucement dans les paradis artificiels, les jeux d’argent et les conquêtes d’un soir. Mais ce qui le fera réellement basculer, c’est la honte, celle de faire rire des préjugés racistes et de n’être aux yeux des autres que le faire-valoir de Footit.
Esthétique et soignée, la mise en scène de Roschdy Zem installe une harmonie parfaite. Véritable voyage à la «Belle époque», des belles façades de cirque, des décors aux costumes, tout est là pour faire rêver le public ! Le film offre même de véritables scènes de spectacle de cirque imaginées par James Thierrée, interprète de Footit.
Devoir de mémoire
Aussi bien pour le réalisateur Roschdy Zem que pour Omar Sy, il fallait réhabiliter Chocolat, que «son histoire, son travail et son talent soient reconnus». Un travail de réhabilitation, amorcé par l’historien Gérard Noiriel, auteur de «Chocolat clown nègre, l’histoire oubliée du premier artiste noir de la scène française», qui s’est révélé fastidieux. Les archives et la documentation étant difficilement trouvables, la France, pays des droits de l’Homme, honteuse d’avoir ri de préjugés racistes préférant jeter le clown Chocolat aux oubliettes de l’Histoire.
Mais, il faut dire que les efforts de toute l’équipe du film ont fini par porter leurs fruits, puisqu’une plaque en la mémoire de Chocolat a été inaugurée, le 20 janvier dernier devant l’ancien cirque des Champs-Elysées, en présence d'Omar Sy et de la maire de Paris, Anne Hidalgo.
Un boycott légitime
Notons, dans un tout autre registre, que de nouvelles voix se joignent, chaque jour, au concert de protestations contre les Oscars «trop blancs». Le cinéaste Roschdy Zem et l'acteur Omar Sy ont, eux aussi, estimé que le boycott de la cérémonie des Oscars par des artistes comme Spike Lee, Jada Pinkett Smith ou encore George Clooney, pour protester contre l'absence d'acteurs noirs, allait «dans le bon sens» et «était légitime».
La polémique représente «un élan dans le bon sens, dans l'envie de rééquilibrer les choses» comme le «film sur le parcours du clown Chocolat», a soulignré Omar Sy, dans un entretien accordé à l’AFP.
«Ce boycott des Américains, je le trouve légitime, au même titre que le boycott des dessinateurs à Angoulême parce qu'il n'y avait pas de femmes en compétition», a déclaré, de son côté, Roschdy Zem, faisant référence au tollé suscité en France par l'absence de femmes parmi les nommés pour le Grand Prix du Festival de BD d'Angoulême.
«A chaque fois qu'une communauté, qu'une minorité sera exclue pour une raison qu'on a du mal à expliquer pour le même travail et le même talent, et parfois même plus de talent, il faudra boycotter, ils ont raison», a ajouté Roschdy Zem, soulignant qu'«il faut se manifester quand on se sent exclu».
«C'est ce genre de combat qu'il faut mener, parce que ça interpelle». «Je crois qu'en France, on est un peu plus attentifs à ça», a-t-il cependant dit, rappelant qu'aux Césars, «le film de Sissako, «Timbuktu», et les films d'Abdellatif Kechiche ont bel et bien été récompensés».