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L'écriture poétique d’Abdelghani Fennane se nourrit de son destin, du feu de l'œuvre inachevée. Sa phrase poétique, qui reconstruit l'imaginaire du drame et de la défaite de l'homme face au monde, s'achemine à "pas sourds" et "aveugles" vers l'irréparable, l'invisible et l'indicible. C'est pourquoi, dans son expérience poétique, la plupart de ses vers s'achèvent, soit par un jet de lumière aveuglant soit par une blessure ou une cicatrice ou finissent par s'évanouir dans l'absence à l'image de ces" jouissances occultes", "cette offrande en sang", "cette joie guettée par l'anxiété" ou encore à l'image de "cette mémoire endeuillée". Le périple prophétique auquel nous invite le recueil est marqué par l'idée de l'éloge de la souffrance et de la douleur comme si la poésie était là pour parachever le monde et pour transformer la douleur du deuil en liesse.
“J'ai donné la douleur au chant / confié leur union au labeur savant des jours/.../Et au cycle infaillible des saisons/.../ La graine a mûri/ Goûte donc ces fruits de la patience / Goûte leur chair nocturne / Leur péché / entre dans leurs noces secrètes / n'es-tu pas l'Initié des jouissances occultes / L'hôte élu de cette offrande en sang”.
Pris au piège de l'écriture, le poète poursuit, donc, son errance dans le Signe. Il tend son oreille à la voix profonde et mystérieuse de la poésie. L'éternel chant de l'Intérieur mais également de l'Ailleurs.
Il est sur le chemin de sa transfiguration vers son propre accomplissement
Qui le fera confronter l'indicible.
La géographie de la passion amoureuse, la demeure fragile du poète, l'état orgiaque de la langue, le printemps de la lumière et le péché originel qui serpente la pomme sont autant d'expériences poétiques vécues à la limite par le poète exilé, errant, patient et vertueux. La métaphore de l'homme-signe dans le désert qui expérimente la malédiction de l'écriture cristallise cette pensée de l'incomplétude dans l'univers poétique d’Abdelghani Fennane. Toutefois, cet homme-graphe, comme il aime l'appeler lui-même, refuse la soumission et la sujétion. Son désir fervent change, comme par l'alchimie du verbe, son destin en destinée et son errance imposée en une errance convoitée.
Cette métamorphose de parcours ontologiques est vécue dans le texte à travers deux procédés essentiels. Le premier se manifeste par une volonté auto-démiurgique. Le poète désire, sans doute, se réinventer grâce à son propre imaginaire et s'auto-procurer grâce à sa propre langue poétique. Le second procédé c'est le choix d'une stratégie visionnaire. En effet, le Silence, dans le recueil, réincarne l'Oracle, c'est-à-dire celui qui voit les yeux clos. Le poète pose sa main sur l'épaule du Silence et part à la quête de la lumière salvatrice et de la sagesse libératrice pareil à "un chasseur de l'éclair au milieu de la nuit". L'éclair, il faut l'entendre ici, bien évidemment, comme une langue à l'état nu ; une fenêtre entrouverte sur l'invisible ; comme un moment qui précède la création ; un moment d'illumination au sens rimbaldien du terme.
Le recueil “Je ne mourrai pas avant le printemps” avec cette soif qui plane dessus et cet accent de défi lancé contre la mort semble une réflexion poétique sur la rhétorique du silence (le silence qui précède la lumière ; le silence qui accompagne l'émerveillement ; le silence d'avant le péché qui habite l'Arbre; le silence de la page blanche qui hante le poète ; le silence en tant que nudité du corps aimé). De deuil en deuil, le poète essaye de récupérer le silence de la mort puisque ce qui est pénible dans l'expérience de la mort et y compris celle de l'écriture, ce n'est point la perte du sens et d'un visage aimé mais surtout le silence intriguant que nous laissons derrière nous quand nous partons. Nous écrivons parce que nous aimons sauver notre silence du bruissement du monde.
Martin Heidegger, disait, et je vais conclure là dessus, la langue est la demeure de l'être. Ce recueil nous enseigne qu'il n'y rien de plus fragile que la demeure du poète peuplée par le silence et hantée par l’ailleurs. Le philosophe allemand disait également: "La langue est la fleur de la bouche". Ce recueil nous parle également de " la fleur-blessure" C'est vrai d'abord pour sa beauté, emblème du jardin secret jalousement gardé au fond de la nuit de chaque poète, mais également par sa vulnérabilité. La preuve, il existe des fleurs disséminées dans l'imaginaire de chaque texte d’Abdelghani Fennane.