La Grèce en grève contre la réforme des retraites


Vendredi 5 Février 2016

"Ils ont massacré ma génération" : Dina, 32 ans, a pour la première fois jeudi fermé son magasin de lingerie pour participer à la grève générale en Grèce, contre une réforme des retraites voulue par les créanciers du pays et soutenue par Alexis Tsipras.
Un nombre record de corporations était appelé à descendre dans la rue, donnant une ampleur particulière à cette journée de protestation. Assureurs, vétérinaires, avocats ou médecins manifestaient ainsi dans les rues du pays aux côtés des fonctionnaires, des agriculteurs et de nombreux salariés du privé.
Selon la police, 30.000 personnes défilaient à la mi-journée dans le centre d'Athènes et 14.000 à Thessalonique.
C'est la troisième fois que le Premier ministre de gauche, élu il y a un an sur la promesse d'en finir avec les plans d'aide aux pays, assortis de réformes difficiles, essuie une grève générale, après avoir dû accepter lui-même en juillet un de ces plans, contre 86 milliards d'euros de prêts.
Plusieurs cortèges étaient organisés à Athènes, celui du PAME proche du parti communiste, le plus important en nombre, mais aussi une manifestation commune des grands syndicats du public et du privé Adedy-GSEE et une autre de la gauche radicale.
La capitale était également plongée dans un calme inhabituel à cause de la grève observée aussi par les centaines de taxis de la ville.
De nombreux commerces étaient fermés pour dénoncer une réforme qui touche aussi beaucoup les travailleurs indépendants ou les agriculteurs. Ces derniers ont organisé de nombreux blocages de routes ces dernières semaines.
"Nous les salariés accueillons cette fois les agriculteurs, les professions libérales, unis par une revendication commune", observait un responsable de la GSEE.
La réforme vise, aux yeux des créanciers du pays (UE et FMI), à dégager 1,8 milliard d'euros d'économies pour l'Etat (environ 1% du PIB grec) dans un pays où, selon le ministère de l'Emploi, 17,5% du PIB est consacré aux retraites contre 11,5% en moyenne en Europe.
Elle prévoit notamment d'abaisser le plafond des retraites de 2.700 à 2.300 euros, d'unifier les régimes, ou de créer une retraite minimum de 384 euros, tout en relevant les cotisations sociales.
Dina, elle, "n'en peut plus" : "On paye plus d'impôts qu'on ne gagne, on ne travaille que pour l'Etat, on ne peut même plus dégager de salaire", assure-t-elle à l'AFP.
"+Ils+ ont massacré ma génération, ajoute-t-elle, on ne peut pas se marier, on ne peut pas avoir d'enfants, mes parents ont travaillé tout une vie et ce qu'ils me laissent, c'est : rien".
"Retraites de 300 euros à 80 ans, qu'est-ce que c'est bien le capitalisme!", clamaient certains manifestants.
Thomas Karachristos, avocat d'affaires, souhaite pour sa part "que l'Europe nous entende, parce que nous avons besoin d'un répit pour repartir", après six ans de récession.
L'avocat admet que le système de cotisations actuel est assez injuste "et doit être réformé". Mais pour lui, la réforme prévue "ne peut pas rendre le système viable".
Il a ainsi calculé qu'entre les impôts et les cotisations, il va devoir céder 88% de ses gains l'an prochain, au risque de devoir licencier parmi ses quatre collaborateurs.
Cette réforme est de surcroît peut-être la dixième depuis le début de la crise, il y a six ans.
Alexis Tsipras, accusé par beaucoup de Grecs de les avoir "trahis", a pris le parti de défendre cette réforme, au risque de voir "le système s'écrouler", tout en promettant de tout faire pour épargner les plus faibles.
Il souhaite ainsi obtenir des créanciers le satisfecit qui permettrait d'ouvrir enfin les nouvelles négociations espérées sur un allègement de la dette grecque (près de 200% du PIB).
Il lui faut d'abord obtenir du Parlement le vote de cette réforme, en milieu de mois, alors que sa majorité est très juste (153 députés sur 300), même s'il semble la tenir assez fermement.

 


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