Légalement, un tel référendum n'est possible qu'à la mi-mandat, et d'ores et déjà l'opposition s'impatiente.
Aujourd’hui, elle organise une manifestation pour exiger du Conseil national électoral (CNE) qu'il active la procédure. Cette semaine ses députés approuveront une loi pour rendre plus facile ce référendum, tout en présentant un amendement constitutionnel pour réduire le mandat présidentiel, actuellement de six ans.
Mais les analystes tempèrent cet enthousiasme, rappelant à quel point la situation politique est bloquée.
Cent jours après la victoire historique de l'opposition aux élections législatives, cinq lois ont été approuvées, mais aucune appliquée. De nombreuses décisions du Parlement se sont heurtées au mur du Tribunal suprême de justice (TSJ), proche du gouvernement.
Dans cette guerre de tranchées, chaque camp est persuadé d'avoir l'avantage: "L'oligarchie est désespérée", raille le président Maduro. "C'est le gouvernement qui est cerné", rétorque le chef des députés de la coalition d'opposition, la Table pour l'unité démocratique (MUD), Julio Borges.
Une chose est sûre, ce marasme politique se rajoute à celui de l'économie. Autrefois riche pays pétrolier, le Venezuela est plongé dans une grave crise avec la chute des cours du brut, qui le prive de devises étrangères pour payer ses importations.
Au quotidien, les habitants souffrent de files d'attente interminables face aux supermarchés, dont la plupart des rayons sont vides, et de la pire inflation au monde, à 180,9% par an en 2015. Ils subissent régulièrement des coupures d'eau et d'électricité.
"Cela n'a pas été facile, nous avons passé trois années compliquées", a reconnu cette semaine le président de 53 ans, affirmant que la pénurie est organisée par la droite, qui mène une "guerre économique".
"Mais je vous promets que les trois prochaines années seront des années de croissance et de construction de socialisme", a-t-il ajouté.
Elles pourraient aussi être des années de guerre juridique: ces derniers mois, le TSJ a retoqué la loi emblématique de la MUD, qui voulait amnistier les prisonniers politiques, ainsi que sa réforme pour reprendre le contrôle de la Banque centrale.
Le Tribunal a par ailleurs validé le décret instituant l'état d'urgence économique, qui confère des pouvoirs étendus à M. Maduro, faisant fi des protestations du Parlement, à qui il a enlevé la faculté de contrôler le pouvoir judiciaire.
Difficile, donc, d'imaginer un sort heureux pour la loi pro-référendum que veut approuver l'opposition, ni pour la réforme qu'elle souhaite faire passer au TSJ pour avoir plus de juges au Tribunal constitutionnel et obtenir ainsi la majorité.
"La solution ne peut être juridique ni constitutionnelle, car le gouvernement s'est emparé du terrain institutionnel", observe le constitutionnaliste Juan Manuel Raffalli, qui prévoit une "réponse politico-électorale" du camp adverse à Nicolas Maduro.
Même opinion chez José Ignacio Hernandez, autre spécialiste du droit constitutionnel, pour qui l'Assemblée "brûle ses dernières cartouches", car toutes ses nouvelles propositions "seront annulées par le Tribunal constitutionnel".
L'opposition semble pourtant vouloir garder la même tactique.
"Nous devons continuer ainsi (...). Nous ne pouvons abandonner nos devoirs. L'unique espace institutionnel qui nous reste, c'est l'Assemblée", a affirmé le président du Parlement, Henry Ramos Allup.
En face, Nicolas Maduro se veut offensif. Il a menacé de raccourcir le mandat des députés si ceux-ci s'obstinent à vouloir faire de même avec son mandat. "Que l'Assemblée nationale prépare ses valises, car son heure viendra", a-t-il lancé en guise de provocation.
L'appel au dialogue du pape François, il y a deux semaines, n'a eu aucun effet.