L’élection du leader de l’Istiqlal est un événement majeur de la vie politique : La majorité retient son souffle et des Istiqlaliens craignent un effet purge


Narjis Rerhaye
Mardi 25 Septembre 2012

L’élection du leader de l’Istiqlal est un événement majeur de la vie politique : La majorité retient son souffle et des Istiqlaliens craignent un effet purge
Coup de tonnerre dans le paysage politique marocain. Et dans les rangs de la majorité, l’inquiétude est perceptible. L’élection de Hamid Chabat au poste de secrétaire général de l’Istiqlal, l’une des principales forces de la coalition au pouvoir, va-t-elle remettre en cause l’équilibre déjà bien fragile d’une majorité fissurée par ses divergences ? Depuis dimanche soir, la question se fait insistante. Le nouveau leader istiqlalien est célèbre pour ses coups de gueule et ses volte-face. « Pas de chance pour Benkirane, qui n’avait pas vraiment besoin de ça. Parce que Chabat peut provoquer une crise gouvernementale, car il n’est pas homme à laisser le parti se faire phagocyter par le parti majoritaire», explique un militant de l’Istiqlal, proche de celui qui a succédé à Abbas El Fassi. Va-t-il demander un remaniement ministériel et le remplacement de certains ministres istiqlaliens ? Autre question qui taraude le landerneau politique et fait trembler quelques ministres choisis par Abbas El Fassi.
Si la majorité d’Abdelilah Benkirane risque de traverser des zones de turbulences, l’élection de Chabat à la tête du  plus vieux parti marocain, est aussi venue sonner le glas au ronronnement du consensus comme mode de gestion partisane en choisissant la compétition électorale entre deux candidats briguant l’investiture  suprême. Si l’Istiqlal s’essaie pour la première fois de son histoire à l’exercice de l’élection démocratique et des urnes transparentes, il n’a pas pour autant inauguré le système du leader élu directement par les militants. Il y a quatre ans, ceux et celles de l’Union socialiste des forces populaires devaient choisir, parmi cinq candidats, leur secrétaire général.
Il reste que l’élection de Hamid Chabat, désormais premier des Istiqlaliens, est  un événement majeur de la vie politique. C’est d’abord un syndicaliste, patron de l’UGTM, qui préside aujourd’hui aux destinées de ce parti. En leader politique, le syndicaliste trublion n’a pas d’autre choix que de procéder à une clarification entre les deux champs, politique et syndical. « Comment coupera-t-il le cordon ombilical? Y parviendra-t-il? Quel sera l’avenir de l’UGTM et  Chabat continuera-t-il à en tirer les ficelles? Ce sont toutes ces questions qui se posent maintenant avec force et auxquelles le nouveau patron de l’Istiqlal devra très vite répondre », soutient cet Istiqlalien, la voix cassée par la longue nuit d’élection, dimanche à lundi,  des membres du comité exécutif.

La réconciliation des Istiqlaliens, une mission impossible ?

Dans le monde syndical,  Hamid Chabat a su gagner ses galons. Se tailler, surtout, une solide réputation de « fort en gueule ». Ses adversaires le disent : l’homme n’hésite pas à utiliser des méthodes pas toujours recommandables pour arriver à ses fins. Mais Chabat a ses fidèles. Tous ceux qui s’opposent à lui  parlent eux de milices. De telles méthodes peuvent-elles être utilisées dans la direction et la gestion d’une formation politique, la plus ancienne du pays ?« Chabat fera son apprentissage. Il faut du temps. Combien d’hommes se sont révélés une fois au pouvoir », affirme cet homme politique de gauche tout en affirmant que « l’élection démocratique de Hamid Chabat constitue en elle-même un préjudice favorable ». D’autres politiques ne retiennent eux que la campagne musclée menée par le maire de Fès pour succéder à Abbas El Fassi. Les pro « Abdelouahad El Fassi » s’en souviendront pendant longtemps. Insultes, accusations, dérapages : les aficionados de Chabat n’auront rien épargné aux soutiens du fils d’Allal El Fassi. « Il ne faut pas oublier non plus que la désignation du secrétaire général du parti avait été reportée et n’a pas eu lieu en juin à cause des affrontements physiques provoqués par les troupes de Chabat. Une ambiance qui confinait presque à la terreur s’était installée.  Le parti était littéralement au bord de l’explosion », rappelle ce membre du conseil national.
En politique, le nouveau patron de l’Istiqlal n’a pas que des amis. Volontairement provocateur, populiste à l’envi, il cultive les petites phrases aux effets dévastateurs. La jeunesse ittihadie en sait quelque chose après l’avoir affronté au nom de la défense de la mémoire de Mehdi Ben Barka, largement bafouée par Hamid Chabat. A Fès, il est loin d’être en odeur de sainteté avec les islamistes du PJD avec qui il devra désormais composer dans le cadre de la majorité gouvernementale.  Ouvrant tous les fronts d’hostilités, il a eu aussi sa guerre avec le Parti authenticité et modernité qu’il accuse de tous les maux. «Hamid Chabat va changer. Il a gagné la bataille de son élection, il ne prendra pas le risque de perde celle de l’expérience qu’il va mener à l’Istiqlal», martèle presque dans un élan d’auto-persuasion cet Istiqlalien qui a fait très tôt le pari de Chabat.
Dès la proclamation de sa victoire, et dans ses habits neufs de leader politique, Hamid Chabat a multiplié les déclarations rassurantes. Il sera le secrétaire général de tous les Istiqlaliens, promet-il pour faire taire tous ceux qui craignent  de voir l’Istiqlal traverser une période de purge. Des craintes et des inquiétudes qui peuvent être fondées surtout lorsque l’on sait que  Hamid Chabat veut en découdre avec ce qu’il appelle « le clan El Fassi » pour que ce parti soit restitué à tous les militants.
20 voix seulement ont opposé Abdelouahd El Fassi et Hamid Chabat et fait la différence. Ce qui signifie bien que deux courants règnent au sein de cette ancienne citadelle nommée Istiqlal. Le nouveau secrétaire général a désormais l’épineuse mission de réconcilier tous les Istiqlaliens. Ce n’est pas un slogan ni une promesse de campagne, mais une véritable épreuve pour un homme qui n’a jamais redouté les ruptures.


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