Dans une déclaration publique, Mme Ortega, seule voix discordante dans le camp présidentiel, a indiqué que 52 civils et trois membres des forces de l'ordre (policiers ou gardes militarisés) étaient décédés depuis le début de cette vague de manifestations, qui a aussi fait un millier de blessés, 771 civils et 229 agents des forces de l'ordre.
"Plus de la moitié des blessés sont dus à l'action des forces de sécurité. Cette exacerbation de la violence est inquiétante", a déclaré la procureure générale.
Le bilan est passé peu après à 56 morts avec l'annonce du décès d'un manifestant atteint par une balle dans la tête lors de troubles dans l'Etat de Bolivar, dans le sud-est, selon le parquet.
Selon Mme Ortega, le décès de Juan Pernalete, étudiant de 20 ans tué lors d'une manifestation à Caracas le 26 avril, est dû à un membre de la garde nationale militarisée.
Le jeune homme est mort d'un "choc cardiaque dû à un traumatisme au thorax. Il a été touché par un objet comme celui-ci", a-t-elle dit en montrant une grenade lacrymogène. Le gouvernement avait affirmé que le manifestant était décédé après avoir été touché par un objet métallique.
"Nous rejetons la violence, d'où qu'elle vienne", a-t-elle insisté, condamnant aussi les débordements de l'opposition: "Les manifestations doivent être pacifiques. C'est un droit que l'Etat doit garantir. Si l'on commence à mener des actions violentes, on perd ce droit".
Quelques heures plus tard, le ministre de l'Intérieur et de la Justice, le général Nestor Reverol, a répliqué à Mme Ortega en justifiant l'action des forces armées et en accusant le parquet d'"inaction" face à des manifestants impliqués dans des actes de violence.
Le ministre a dénoncé l'action de "bandes armées délinquantes". "Cette spirale de violence a créé un climat d'impunité favorisé par le parquet qui par son inaction n'a pas garanti l'application correcte de la justice", a-t-il déclaré.
La procureure générale de la Nation apparaît comme la seule voix critique au sein du camp présidentiel: elle s'était élevée contre la décision fin mars de la Cour suprême, réputée proche du chef de l'Etat, de s'octroyer brièvement les pouvoirs du Parlement, seule institution contrôlée par l'opposition.
Cette manœuvre avait été l'étincelle déclenchant la vague de manifestations et de violences pour obtenir le départ du président socialiste Nicolas Maduro.
Mme Ortega a aussi dénoncé le recours aux tribunaux militaires à l'encontre des civils arrêtés lors des protestations et critiqué le projet du chef de l'Etat de réformer la Constitution.