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Disons tout de suite que la langue arabe classique n’a jamais été problématique ni pour le système éducatif marocain, ni pour tout autre système dans n’importe quel pays arabe. On compte vingt-quatre pays dans le monde arabe. Il n’en a jamais été question de la langue arabe, en soi, quand il s’agit de dénombrer les problèmes qui font obstacle au progrès d’un système ou d’un autre. Nous évoquons ce rapport qui nous rapproche, avec les pays arabes, justement parce que ce rapport s’établit comme un rigide handicap à tout dépassement linguistique. Ceci reste vrai quelle que soit la spécificité qui est la nôtre. Cette donne, de nature communautaire, n’est révélatrice que dans la mesure où la langue arabe classique ne présente en elle-même aucun caractère devant lequel l’élève marocain se trouve entravé dans ses apprentissages. Si tel était le cas, l’arabe classique serait morte il y a bien des siècles. Or, la généralisation de l’enseignement qui est aujourd’hui un acquis, a pu se réaliser alors que la langue de l’enseignement dans les pays du Maghreb fut et reste encore l’arabe classique. Par contre, et de tout temps, l’arabe courant n’a jamais réussi à devenir un support de savoir de connaissance, de science ou de pensée. Et si cette langue courante,»la darija», constitue aujourd’hui comme par le passé un moyen de communication, aussi réussi que celui offert par les langues amazighes, c’est grâce justement à ce fabuleux enrichissement qu’elle doit, en partie, à l’arabe dite classique. Aussi, le constat est fait aujourd’hui comme jamais auparavant, montrant ainsi que l’arabe courant a été de tout temps l’expression des arts qui ont comme base le conte. Les chansons, les pièces théâtrales de Seddiki, de Kaouti, de Berrechid, le «Zajal», le «malhoune», etc… nous présentent des modèles expressifs dans ce domaine précis. Et pourtant, la « darija » s’est toujours limitée à ce statut et ne l’a jamais dépassé pour devenir un support du savoir, le (savoir) dans son sens exact. Justement parce que toute vraie langue ne peut se suffire de l’unique communication. C’est pourquoi l’arabe courant, vu sa dimension jusqu’à nos jours uniquement communicative, ne possède pas encore les éléments qui lui permettraient d’être une langue du savoir, tous savoirs confondus. En appuyant cette langue courante sur des bases scientifiques, tâche qui revient aux spécialistes, le débat deviendra aussi utile que congru pour trouver comment nous devrons l’introduire non seulement dans l’enseignement, mais aussi dans toute la vie.
L’aspiration de l’introduire dans tous les pays du Maghreb reste et restera controversée de par les nuances combien nombreuses qui caractérisent chaque darija, dans chaque pays maghrébin. Pire, dans le même pays, plusieurs langues dialectales sont pratiquées. En faire une seule langue aussi codifiée que l’est la langue arabe classique, cela est aujourd’hui loin, très loin d’être une vraie préoccupation pour le peuple marocain, toutes ethnies confondues.
Rappelons au passage, avec l’éminent romancier marocain de langue arabe, historien et penseur, Abdellah Laroui dont beaucoup de travaux ont été rédigés, les uns en français, d’autres en arabe classique, deux faits significatifs. Le premier se rapporte à la décision du Protectorat français visant à faire de l’arabe dialectal, à côté du berbère, une langue officielle. Pour cette fin, les responsables du Protectorat ont fait appel à des linguistes parmi lesquels des spécialistes de dialectes. Tous, et à l’unanimité, ont été d’accord que le projet est un échec cuisant. Le deuxième fait est lié essentiellement à des intellectuels francophones qui revendiquent que l’arabe classique doit être remplacée par l’arabe dialectal. Laroui constate qu’ils n’ont jamais mis en application leur souhait (lire son ouvrage : «Min diwan as-siassa»). Quant à nous, nous sommes seulement surpris de constater qu’aucun de ces spécialistes dont on ne cesse, et à chaque occasion, de nous en rappeler l’existence, n’a présenté une vraie étude qui nous montrerait de quelle manière nous allons codifier cet arabe dialectal. Comment nous allons résoudre les problèmes complexes liés à la voyelle arabe, à la lettre arabe, au problème de la conceptualisation…Bref, nous sommes toujours étonnés de lire des appels lancés par des écrivains marocains en langues étrangères pour que la langue dialectale soit admise dans l’enseignement. Ils insistent à ce qu’elle remplace la langue arabe classique. Manquant d’arguments scientifiques, ils trouvent plausible de répéter qu’il ne doit pas y avoir de rupture dans la vie de l’élève. C’est le même argument que retient le comité de Noureddine Ayouche. Selon eux et pour que cette rupture n’ait pas lieu, il faut juste garder le dialectal dans le processus de l’apprentissage. Ce qu’ils oublient, c’est cette soi-disant coupure est l’une des conditions dont la nécessité n’échappe à personne, qui fait que l’école réponde à cette nouvelle donne. Sinon, pourquoi doit-on l’établir ? Si cette coupure ne se produisait pas, comment l’élève apprendrait-il ?
Pour ce faire, nous pensons que, dans l’intérêt du pays, l’on se doit de retirer cette recommandation relative à l’introduction de l’arabe dialectal dans l’enseignement.
*Ecrivain, penseur