Il est indispensable de veiller à la réactualisation du Code de la famille en s'alignant et sur la charia et sur la sagesse

Driss Lachguar dans l'allocution prononcée lors de la réunion du conseil national de l'OSFI


Libé
Lundi 13 Juin 2022

Il est indispensable de veiller à la réactualisation du Code de la famille en s'alignant et sur la charia et sur la sagesse
Le compte à rebours est lancé. Le 8ème Congrès national de l’Organisation socialiste des femmes ittihadies (OSFI) se tiendra à la prochaine entrée politique.

C’est ce qu’a décidé le Conseil national de l’OSFI qui s’est réuni dimanche dernier  au siège central de l’USFP à Rabat en présence notamment du Premier secrétaire du parti, Driss Lachguar.

Deux commissions ont été constituées lors de cette réunion. Une commission politique, coordonnée par Saadia Bensahli, sera chargée de préparer une plateforme pour évaluer les acquis réalisés en matière de droits des femmes et les perspectives d’avenir. Et une commission organisationnelle, coordonnée par Hanane Rihab, aura pour mission de préparer une plateforme sur les questions organisationnelles, les statuts de l’OSFI, ainsi qu’une plateforme pour le déroulement du Congrès et l’élection des congressistes.
 
Trinité : libération, égalité et justice sociale
 
«Vous êtes comme nous (les Ittihadis) garantes d’un lourd héritage, qui fait de l’appartenance à l’USFP une appartenance à une histoire, à une pensée, à des sacrifices et à un projet », a souligné d’emblée Driss Lachguar en s’adressant aux membres du Conseil national de l’OSFI, et ce dans un discours prononcé en l’occasion constituant, en fait, une feuille de route politique pour le 8ème Congrès de l’OSFI.

«Je vous propose, sur la base du contexte de l'étape actuelle, ses enjeux et ses contraintes, d'invoquer la trinité : libération, égalité et justice sociale dans les textes qui encadreront les travaux de la Commission préparatoire de votre 8ème Congrès, ainsi que les plateformes qui seront débattues et enrichies lors de ce congrès ». Et de préciser : «Dans le contexte actuel marqué par la crise économique aux niveaux local et mondial d'une part, et par la résurgence de courants de droite, régressifs et conservateurs qui prospèrent dans de telles conditions, je crois que les questions de libération, d'égalité et de justice sociale devraient occuper une place centrale dans les luttes des femmes et du courant progressiste ».

Le dirigeant ittihadi a une conception on ne peut plus claire de cette trinité. Pour lui, la libération « est une déclaration d'un parti pris clair vers le progressisme, qui constitue l’antithèse objective et pratique de toutes les tendances régressives et réactionnaires. Il constitue également un horizon pour la modernité souhaitée, qui ne sera pas complète sans la libération des femmes comme expression de la libération de la société toute entière ».
Il ne peut y avoir d’Etat social sans l’instauration effective des droits de l’Homme et leur étroite association à une totale égalité
Quant à l'égalité, elle signifie pour  Driss Lachguar «le rejet de toute discrimination de genre, que ce soit dans les lois ou les pratiques, car la plupart des pratiques d'exclusion des femmes étaient enracinées et cachées derrière des conceptions fausses et trompeuses avançant qu'il s’agit de différenciations privilégiant les hommes. Malheureusement, on a recouru et on recourt toujours à des lectures erronées de la religion pour légitimer cette discrimination » à l’égard des femmes.

Le troisième pilier de cette trinité est la justice sociale qui constitue «l’un des piliers de notre référentiel social-démocrate et progressiste ». «Nous considérons que tout progrès dans ce domaine doit garantir cette justice aux niveaux social, spatial et du genre, c'est-à-dire que la répartition équitable des richesses ne doit pas uniquement garantir la réduction des différences entre les classes et les régions, mais aussi entre les femmes et les hommes. En fait, les femmes pauvres sont doublement touchées par la vulnérabilité de leur appartenance sociale et leur genre.

Par la suite, le Premier secrétaire de l’USFP s’est livré à une sorte d’autocritique quand il a exprimé son mécontentement quant à la condition des femmes dans le Maroc d’aujourd’hui. « La source de mon mécontentement réside dans le fait  de l’insuffisance de ce qui a été réalisé par rapport aux idées que nous portons, et aux sacrifices consentis par nos militantes dans la direction et la base du parti dans des circonstances difficiles », a-t-il soutenu.

« Je ne suis pas satisfait du niveau de représentativité des femmes dans les instances dirigeantes du parti, du niveau local jusqu’au niveau national en passant par celui régional. Je ne suis pas non plus satisfait de la représentativité des femmes en général dans les institutions représentatives de notre pays », a-t-il mis en exergue.

Il a toutefois souligné que l’USFP est un parti pionnier en ce qui concerne la place importante qu’il accorde aux femmes au sein de ses instances décisionnelles par rapport aux autres formations politiques. Et afin d’étayer sa pensée, le dirigeant de l’USFP cite plusieurs exemples : « Nous avons été le premier parti à présenter des femmes candidates aux élections législatives dans une période difficile, et nous avons également été le premier parti à présenter des femmes candidates aux élections communales, ce qui a été un précédent dans notre environnement régional et pas seulement national. Nous avons été le premier parti à présenter des femmes ministres lors du gouvernement de l’Alternance consensuelle.
Mieux encore, les femmes ittihadies ont joué un rôle prépondérant dans la mobilisation, la communication et le plaidoyer au Maroc et à l'étranger pour défendre la cause de la démocratie et de  l’Etat de droit.

Et au début des années 90, les femmes ittihadies se sont mobilisées avec les militantes des autres formations de gauche pour mener la bataille du changement du Code du statut personnel. « Elles ont fait face fermement aux courants religieux extrémistes dont certains d'entre eux étaient influents même au sein de l'Etat. Les mosquées ont été instrumentalisées pour dénigrer et anathématiser les militantes dans une société qui accorde une grande valeur à la religion », a fait savoir Driss Lachguar, avant de souligner que ce discours fanatique s’est produit également au début de l’expérience de l’Alternance consensuelle lors de la bataille qui faisait rage à propos du Plan d’action national pour l’intégration de la femme.

 « Durant cette bataille, la mobilisation de la rue et l’instrumentalisation des mosquées et des associations caritatives ont pris une dimension dangereuse, à tel point que des menaces ont été proférées bafouant le droit le plus sacré, à savoir le droit à la vie », a assuré Driss Lachguar. Et d’expliquer : « Le but de leurs attaques et de leur électrisation des foules n'était pas de défendre la religion islamique. Car ce que préconisait le Plan d’action national visait avant tout à garantir l'autonomisation économique et politique des femmes. Outre le fait  que les paragraphes relatifs à la modification du Code du statut personnel n’en constituent qu'une toute petite partie, qu’ils sont discutables et au sujet desquels il y a une divergence entre les oulémas musulmans. Pour preuve, les dispositions du Code de la famille ne contredisaient pas la teneur du Plan d’action national dans les aspects liés au statut personnel ».

Selon le dirigeant ittihadi, les courants extrémistes visaient un double objectif. Ils voulaient, d’une part, entraver la marche du progrès vers l'établissement d'une égalité réelle entre les femmes et les hommes, notamment en ce qui concerne l’autonomisation économique et politique des femmes, qui constitue la porte d’entrée vers une société de dignité, d'égalité et de droits, « car cet horizon est à l'opposé de leurs projets basés sur la pérennité du modèle patriarcal» ; et ils voulaient, d’autre part, déstabiliser le gouvernement de l’Alternance consensuelle, qui s'était engagé dans une série de projets qui menaçaient les intérêts des complexes de corruption et de rente, et ce en provoquant une division au sein de la société.

«Pourquoi je rappelle tout cela aujourd’hui ? C’est pour vous montrer le chemin difficile que nous avons parcouru pour réaliser ce que nous avons atteint, même s’il reste insatisfaisant », a précisé Driss Lachguar. Ensuite, il a tiré à boulets rouges sur les courants obscurantistes qui exploitent la religion à des fins politiciennes :«Je rappelle cela, et espérons que le rappel profitera aux croyants, et même aux marchands de la foi, qui se permettent de prêcher des leçons sur ce que leur chef appelle les conspirations fomentées par l'opposition contre les gouvernements. Il courtise le gouvernement, et en même temps il attaque farouchement l'opposition, bien que son parti (PJD, NDLR) en fait partie, tout en passant sous silence le rôle qu'il a joué pour saboter l'expérience de l’Alternance consensuelle».

Tout cela fait partie de l’histoire et ce qui importe pour le dirigeant ittihadi, c’est de se projeter dans l’avenir. En ce sens, il a avancé quelques pistes de réformes nécessaires à même de promouvoir les droits des femmes au Maroc.

« Aujourd'hui, avec le retour en force du projet de l’Etat social, nous rappelons ce que nous avons toujours dit, qu'il n'y a pas d’Etat social sans l’observation effective des droits humains liés à la pleine égalité », a souligné Driss Lachguar.

A ce égard, le dirigeant de l’USFP a mis l’accent sur la nécessité d’atteindre la parité, consacrée par la Constitution de 2011. « Continuer à mener des batailles sur le front des droits civils et politiques pour atteindre la parité est une condition sine qua non », a-t-il souligné.

Il a également relevé l’existence de disparités majeures enregistrées entre les femmes et les hommes au niveau des droits économiques et sociaux.

« Nous n'exagérons pas lorsque nous disons que les femmes sont les plus grandes victimes du capitalisme sauvage, des guerres, des crises économiques, et même des crises sanitaires. Le rapport du HCP sur les répercussions du confinement (à cause de la crise sanitaire du Covid-19) sur les droits des femmes est alarmant, notamment l’augmentation des cas de violence à l'égard des femmes », a-t-il noté, tout en critiquant le gouvernement qui n’accorde pas la priorité aux droits des femmes dans ses projets et ses programmes. Pis encore, « beaucoup de mesures ont été imprégnées d’une connotation conservatrice qui ne reflétait même pas les thèses et les slogans libéraux » que le gouvernement défend, a encore martelé le dirigeant socialiste.

A ce propos, il a exhorté les parlementaires du parti « à prêter attention aux problèmes des femmes en cette circonstance de crise économique lors du contrôle de l’action du gouvernement. Vous devez être la voix des femmes marocaines marginalisées travaillant dans les domaines agricoles, les usines, ainsi que des femmes maltraitées, et sans ressources. Je m’adresse aux élus du parti dans les institutions chargées de la gestion des affaires locales et régionales pour qu’ils veillent à orienter une plus grande part de l'argent public vers le soutien de projets qui défendent les droits des femmes, en particulier celles qui vivent dans une situation précaire ».

En outre, Driss Lachguar a assuré que bon nombre de revendications portées par le mouvement féministe, soutenu par des forces progressistes, à leur tête l'USFP, demeurent toujours d’actualité, et certaines d'entre elles doivent être mises à jour en fonction des exigences du contexte actuel.

Ainsi, il a souligné la nécessité de réformer le Code de la famille pour l’harmoniser avec les mutations sociétales profondes.

Driss Lachguar a également plaidé pour une réforme en profondeur du Code pénal, dont de nombreuses dispositions sont « devenues désuètes ».

Il y a lieu de rappeler que cette séance d'ouverture, présidée par Manal Tekkal, a également été marquée par l’allocution de Khadouj Slassi, secrétaire générale de l’OSFI, dans laquelle elle a indiqué que le Conseil national tient sa réunion pour lancer les préparatifs de la tenue du prochain Congrès national de l’OSFI.

Elle a salué les positions politiques défendues par Driss Lachguar dans son allocution d’ouverture concernant un certain nombre de questions politiques et sociales liées aux droits des femmes, à la bataille de la modernisation, au développement, à la démocratie, à la liberté et à la dignité, tout en faisant remarquer que l’allocution que le Premier secrétaire du parti avait prononcée lors des préparatifs pour la tenue du 7ème Congres de l’OSFI comprenait des positions politiques audacieuses se rapportant à la question de la femme, ce qui explique la campagne rageuse menée par certains milieux extrémistes contre la direction du parti et contre les femmes itthadies.

Par ailleurs, Khadouj Slassi a affirmé que ce Conseil national s’inscrit dans la continuité des travaux réalisés lors du Conseil national précédent, qui avait approuvé un rapport détaillé sur les résultats, les réalisations et les activités de l’OSFI, ajoutant que le contexte actuel dans lequel se tiendra le 8ème Congrès national exige un redoublement d'efforts pour réaliser plus d’acquis et gagner les enjeux liés à la bataille de la modernisation, de la démocratie et du développement.

Mourad Tabet

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