Fort investissement marocain dans les renouvelables: Le coût, c’est là que le bât blesse

Seuls 23 % des 25,7 milliards de dollars requis pour l'Afrique du Nord à horizon 2030 ont été investis


Hassan Bentaleb
Mardi 28 Janvier 2025

Fort investissement marocain dans les renouvelables: Le coût, c’est là que le bât blesse
« Pendant le mandat de l'actuel Exécutif, 56 projets ont été autorisés, contre 14 entre 2011 et 2020. Au total 1.991,5 mégawatts d’énergies renouvelables ont été autorisés durant ce mandat contre 1.139 mégawatts entre 2011 et 2020.

Par ailleurs, l’actuel gouvernement a validé des investissements d'une valeur de 25,3 milliards de dirhams dans le secteur des énergies renouvelables, contre 17,5 milliards de dirhams entre 2011 et 2020 ». Tel est le bilan dressé dernièrement par la ministre de la Transition énergétique  et du Développement durable devant les membres de la Chambre des représentants, concernant les énergies renouvelables.

Cependant, Mme la ministre ne pipe pas mot sur les difficultés liées au financement de la transition énergétique.  En effet, malgré son vaste potentiel en ressources énergétiques renouvelables, le Maroc, à l’instar de plusieurs pays d’Afrique, peine encore à mobiliser les investissements nécessaires pour déployer les technologies indispensables à sa transition énergétique.
 
Des coûts prohibitifs

Un récent rapport du Forum économique mondial intitulé "Financing the Energy Transition: Meeting a Rapidly Evolving Electricity Demand", publié en janvier 2025, révèle que sur les 25,7 milliards de dollars nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques à l’horizon 2030 en Afrique du Nord, seuls 23% de ce montant sont actuellement investis.

L'une des principales barrières à la transition énergétique est le coût élevé du capital. En Afrique du Nord, explique le rapport, les technologies liées aux énergies renouvelables restent trop coûteuses pour les consommateurs, ce qui freine l'adoption à grande échelle. De plus, le rapport du WEF souligne que, depuis 2022, les coûts des projets ont considérablement augmenté en raison de deux facteurs majeurs : les perturbations dans les chaînes d'approvisionnement mondiales et les taux d'intérêt élevés. Ces conditions économiques ont non seulement ralenti la mise en œuvre de projets, mais ont également conduit à l'annulation de nombreux investissements déjà planifiés. Les économies africaines sont donc confrontées à une double contrainte : des besoins d'investissements massifs pour moderniser leurs infrastructures énergétiques tout en étant limitées par des coûts prohibitifs.

Sur le plan global, les investissements dans la transition énergétique ont atteint 2.000 milliards de dollars en 2024, un montant presque deux fois supérieur à celui investi dans les énergies fossiles. Toutefois, pour se conformer aux objectifs climatiques de 2050, ces investissements doivent encore doubler pour atteindre 4.500 milliards de dollars par an d’ici 2030, selon l’Agence internationale de l'énergie (AIE).
 
Des progrès insuffisants

Le Maroc se distingue en Afrique en occupant la deuxième position en termes d'investissements mobilisés pour le développement des énergies renouvelables, avec un total de 9,36 milliards de dollars entre 2010 et 2021. Selon une analyse du groupe de recherche international Zero Carbon Analytics, l'Afrique du Sud reste leader dans ce domaine avec 23 milliards de dollars d'investissements, suivie par l'Egypte et le Kenya, respectivement avec 7,14 milliards et 6,69 milliards de dollars.

L’étude met en lumière les tendances positives des investissements dans les énergies renouvelables à l'échelle continentale. En effet, entre 2010 et 2020, l'Afrique australe a dirigé 86% de ses investissements privés dans l’énergie vers les énergies renouvelables, un taux qui s'élève à 82% pour l'Afrique de l'Est et à 67% pour l'Afrique du Nord. Ces tendances sont d'autant plus significatives au regard des investissements cumulés sur la période 2000-2020, qui ont décuplé, passant de moins de 500 millions de dollars par an à environ 5 milliards de dollars. Néanmoins, ces investissements restent insuffisants, représentant seulement 2% des investissements mondiaux dans le secteur des énergies renouvelables.

Sur le plan technique, la capacité éolienne en Afrique connaît une forte dynamique de croissance, avec une moyenne de plus de 800 mégawatts (MW) installés chaque année entre 2014 et 2022. L'Afrique du Sud demeure leader en termes de capacité éolienne installée, représentant 41% du total, suivie par le Maroc avec 22% et l'Egypte avec 21%.

Le solaire, quant à lui, émerge comme la source d'énergie renouvelable à la croissance la plus rapide en Afrique. Entre 2011 et 2021, la capacité solaire a crû à un taux annuel moyen de 89%, ce qui souligne l'énorme potentiel du continent dans ce domaine. L'Afrique détient environ 60% des ressources solaires mondiales, mais n'implante qu'environ 1% de la capacité solaire photovoltaïque mondiale. Selon les estimations, le potentiel technique solaire du continent pourrait atteindre 7.900 GW, bien au-delà des capacités installées actuelles. En 2021, l'Afrique du Sud détenait la plus grande capacité solaire, avec 5,3 GW, suivie du Maroc avec 2 GW et de l'Egypte avec 1,3 GW. Ensemble, ces trois pays représentent 65% de la capacité solaire installée en Afrique.

L'analyse souligne également un retard notable dans la mise en place de nouvelles capacités renouvelables ces dernières années, avec une période d’attente de près de 11 ans pour certains projets. Cela reflète des défis structurels, notamment la complexité des financements, la lenteur administrative, et la nécessité de renforcer les infrastructures de transmission et de distribution d’électricité. De plus, bien que le solaire et l’éolien représentent ensemble environ 87% des investissements dans les énergies renouvelables depuis 2010, les progrès restent insuffisants pour répondre aux besoins croissants de l'Afrique en matière d’énergie durable.

Partenariats internationaux et locaux

Pour accélérer la transition énergétique et répondre aux objectifs climatiques mondiaux, selon les experts, « il est essentiel que les pays africains renforcent les partenariats internationaux et locaux, développent des politiques incitatives plus claires, et simplifient les processus administratifs ». « De plus, soutiennent-ils, un meilleur accès au financement à faible coût de capital est crucial pour que ces pays puissent concrétiser leurs ambitions en matière de développement des énergies renouvelables ».

Hassan Bentaleb


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