Le Festival bat son plein. Déjà, plus de 70 films ont été projetés dans la série longs-métrages, courts-métrages et documentaires dont la moitié est en lice pour décrocher une consécration samedi 4 avril, jour de la clôture de cette 15ème édition…
Ce Festival s’est distingué par deux moments forts : des hommages posthumes rendus à deux artistes arabes. Le premier est Egyptien, le second, Marocain et tous les deux nous ont quittés il y a huit mois à peine.
Après l’hommage rendu à Youssef Chahine, dimanche dernier, c’était au tour de Hassan Skalli d’être mis à l’honneur, mercredi 1er avril, à la Maison de la Culture de Tétouan qui a réuni cinéastes, artistes et critiques cinématographiques marocains. C’est notamment en présence de son épouse, Najat Skalli, que les participants à cette rencontre - Mohamed Afifi, le compagnon de route de Skalli, Mohamed Soukri, l’ami de l’artiste et Hassan Hamidi - ont évoqué tour à tour, «Hassan, l’homme » et «Skalli, l’acteur».
Pour Soukri, Hassan Skalli se distinguait indéniablement par son extrême gentillesse et son respect de l’autre ; deux caractéristiques, dit-il, qui n’ont plus droit de cité dans notre société actuelle… «Tu théâtralises tout le temps ta vie », aimait-il rappeler à cet acteur dont la vie était loin d’être monotone et pour laquelle il aimait cultiver le sens de la contradiction. Vivait-il sa vie ou la théâtralisait-il? Vivait-il sa vie comme une pièce de théâtre? C’est très certainement à sa compagne de tous les jours, Najat Skalli, qu’il fallait le demander…. Non sans une grande émotion, elle a évoqué, larmes aux yeux, tantôt l’ami, tantôt l’époux et tantôt l’amant.
Elle a tenu à confier au public ses souvenirs indélébiles d’une vie partagée à distance de la routine conjugale avec un homme qu’elle aimait appeler à juste titre « Sidi Hassan » ou « Chrif » et qui nourrissait le respect, l’écoute et l’humilité. Mohamed Afifi a présenté, quant à lui, une autre facette de l’homme patriote et militant en déroulant le fil de l’histoire par sa rencontre avec Skalli en 1945, marquée par la fin de la deuxième Guerre mondiale, la période de son penchant pour le football, son activité commerciale au sein de l’OCE puis les débuts dans le théâtre de « Ba Hassan ».
Hassan Hamidi, celui qui a appris le décès de son ami Skalli à l’heure de la naissance de son premier fils a, quant à lui, mis en exergue cette identité double et ce paradoxe qui caractérisaient Hassan Skalli. «Je ne l’ai pas beaucoup côtoyé mais je l’ai rencontré» nous confie-t-il, exprimant ainsi l’intensité de son rapport avec Skalli le personnage et l’acteur. Du côté du public, les témoignages d’amour et de respect se sont succédé, tous emprunts d’une grande émotion pour Hassan Skalli chez qui l’on pouvait déceler «ce grain de folie », précise l’un de ses amis avant d’ajouter : « On ne peut arriver à aimer quelqu’un si l’on ne peut déceler chez lui ce grain de folie.»
La carrière de Hassan Skallli est marquée par de nombreuses réalisations, dont son rôle dans l’un des tout premiers films tournés au Maroc après l’indépendance : «Brahim ou le collier des beignets» en 1956.
Le comédien est unanimement connu pour le charisme qui a fait la force de l’ensemble de sa filmographie : «Les amis d’hier» de Hassan Benjelloun, «Adieu forain» de Daoud Aoulad Syad, «Le Regard» de Nour-Eddine Lakhmari, et «Wake up Morocco» de Narjiss Nejjar, entre autres… Il fera sa dernière apparition dans le dernier film de Jérôme Cohen-Olivar «Kandisha», inspiré de la légende marocaine de Aïcha Kandisha, et dans lequel Hassan Skalli incarne le rôle d’un juge. Il s’est éteint à Rabat en août 2008 en laissant dans nos mémoires un visage, une voix et une présence sur l’écran rarement égalée dans le cinéma marocain.