Fenêtres … : Littérature et Cinéma : méditations philosophiques

La littérature et le cinéma sont deux expériences artistiques qui se proposent de penser et de dire la connexité être/Monde. Si, en effet, la littérature représente cette connexité, être/monde, par le truchement du mot,  le cinéma, lui, la représente par le biais de l’image. Dans cette optique, le  point commun existant entre le dire littéraire et le dire cinématographique demeure notamment le recours aux différentes techniques et structures de narration comme moyens de représentation du réel. C’est dans le flux des idées et des émotions que recèle l’être humain, comme expérience ontologique dans sa relation problématique avec le monde, qu’interviennent la littérature et le cinéma en tant que rhétoriques interrogeant la symbolique des énigmes emblématiquement délicates combinant  la structure être/monde. La littérature et le cinéma peuvent se définir dans cette perspective comme filières ayant pour principale ambition d’interroger, tout en la re-problématisant, la contexture être-dans-le-monde. Se considérant à la fois comme prose et comme poésie de symbolisation du lien être/monde, la littérature et le cinéma creusent davantage aujourd’hui l’expérience de la connaissance humaine à partir d’un travail technique visant le jaillissement des grands thèmes litigieux définissant l’errance existentielle de l’être. Effectivement, Temps, Espace, Amour, Mort, Solitude, Identité, Altérité, Finitude et Infinitude sont autant de thématiques ne cessant de ronger, dans leur for intérieur, écrivains et cinéastes. Si, de facto, l’on parcourt les expériences avant-gardistes qu’a connues l’histoire de la littérature et du cinéma en la matière, on se rendra aisément compte de la logique fondatrice de cette réflexion, interrogation et refonte des rapports être/monde. La Nouvelle Vague en France, tout comme le Nouveau Roman d’ailleurs, avait la conviction du déchirement conscientiel de l’être dans un monde en pleine mutation et donc il y a eu tout un travail révolutionnaire non seulement au niveau des techniques de dire la filiation être/monde, mais aussi et surtout au niveau de la réflexion sur le devenir de cette corrélation comme processus inscrit dans la logique de l’Histoire.  La littérature et le cinéma pensent présentement le passage fort critique de l’être à l’étant dans un monde on ne peut plus technicisé. Qu’il s’agisse des genres dramatique, tragique ou comique, l’effort fourni par la littérature ou par le cinéma est essentiellement celui de révéler l’une des facettes, elles sont légion, cachées, de la condition humaine. La contrainte est tellement épineuse dès lors que ladite condition demeure insaisissable de par sa complexité. Sagace, la rhétorique cinématographique vient compléter la rhétorique littéraire dans une symbiose organique et enrichissante. Ceci se concrétise particulièrement dans le cinéma d’auteur, c’est-à-dire ce cinéma intellectuel et élitiste qui, comme la littérature à thèse, s’essaie à la compréhension de la chimie être/monde, et ce en la déconstruisant.
Ceci étant dit, le Festival international du film de Marrakech a bel et bien misé sur le cinéma d’auteur. N’est-il pas temps, par conséquent, de repositionner notre cinéma et notre littérature dans le contexte d’un intellectualisme capable de participer sensiblement aux grands débats de la société marocaine actuelle?