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Fenêtre : N’êtreJeudi 13 Janvier 2011
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Suite à la mort d’Emmanuel Lévinas, Jacques Derrida s’est exprimé dans « Adieu » (Galilée, 1997) de la manière suivante : « Depuis longtemps, si longtemps, je redoutais d’avoir à dire Adieu à Emmanuel Lévina. » Que dire suite à la disparition d’une personne si chère que nous arrache violemment la mort ? Que dire face à la fragilité que ressent l’être dans sa nudité tragique qui n’est autre que sa vulnérabilité ? Les moments d’« Adieu » sont incontestablement les moments les plus cruels qui soient dans les relations interhumaines. L’ « Adieu » est une condamnation de l’« absence » comme structure du néant. C’est une manifestation contre le «rien», le « vide » et le « chaos » que fait surgir l’idée de la mort dans la conscience humaine. Que perd-on dans la mort d’une personne? De quoi se souvient-on après sa disparition? Tout. On perd tout et on se souvient de tout. Son visage, sa voix, son sourire, ses gestes, son allure, sa chaleur humaine, etc. Tout nous manque et tout traverse notre mémoire comme pour faire jaillir sa lumière des ténèbres de l’oubli. La mort revivifie notre amour pour une personne morte. Elle nous oblige à arracher les mots de la douleur de la tristesse pour dire notre « Amour » et notre « Amitié » pour ceux et celles que la logique illogique de la vie nous oblige à quitter. La mort enseigne la patience dès lors qu’elle complote avec le temps, lequel ne se soucie pas d’effacer la mémoire de ses traces indélébiles, mais d’apaiser le chagrin de l’âme et d’orienter l’être vers la loi/sagesse de la méditation. Ainsi, l’être médite-t-il pour fuir le sentiment d’être fini. Il médite pour échapper aux mouvements de la raison. Il médite pour vaincre sa petitesse et sa langueur. Seule la poésie et les poètes ont l’art et la manière de banaliser la mort bien qu’elle soit si terrible à assumer, en ceci qu’ils chantent la vie et jamais la mort. Mahmoud Darwich s’est montré acerbe et satirique vis-à-vis de la mort dans sa muraille (Riad El-Rayyes, 2000) ; Mohamed Loakira s’est montré téméraire et critique face à celle-ci dans « N’être. » (La Une Multimedia, 2002) Mourir n’est pas entrer en silence, ce n’est pas non plus s’éteindre comme voix ou comme signe, ce n’est pas perdre son signifié. Mourir c’est grandir davantage dans les cœurs et les âmes des autres, c’est se définir autrement, c’est être accueilli dans leur mémoire collective comme symbole dont le poétique et le mythique tracent merveilleusement les jalons d’une rencontre possible, dans un au-delà possible, avec des visages, possible, illuminés. La mort ne prive pas l’être de « demeurer » éternellement présent parmi les siens. Dans la mort il y a séparation physique mais jamais émotionnelle ou sentimentale. Dans la mort on ne se sépare pas ; on demeure dans la distance car la distance est, quoi qu’il en soit, un maintien « in-visible » des liens avec les autres. Mourir c’est renaître dans le souvenir que promettent « Amour » et « Amitié. » L’être se souvient de l’être et cultive le sens de l’attachement à la trace, car après tout la mort est un legs de quelqu’un, de quelque chose. Le mot de Sartre (Huis clos, Gallimard, 1947) est, semble-il, si adéquat pour exprimer ce sentiment qui s’empare de l’être dans des moments de faiblesse intense : « On meurt toujours trop tôt – ou trop tard. Et cependant la vie est là, terminée : le trait est tiré, il faut faire la somme. Tu n’es rien d’autre que ta vie. » Mourir c’est donc laisser toute sa vie derrière soi, et c’est de cette vie que se souviendront les autres. La mort guette l’être. Elle est là, derrière la porte, sous l’oreiller. Elle peut le surprendre à tout moment. Pourtant, l’être continue de cheminer. Le tragique dans la mort n’est pas la mort comme épreuve, c’est plutôt sa face cachée, absconse, insaisissable qui crée le mystère autour d’elle et structure l’ailleurs, le derrière, l’invisible. Ce qui déconcerte dans la mort, c’est son incompréhensibilité. D’où le chancellement psychosomatique de l’être. D’où son étonnement. La mort n’a pas de morale, elle impose la sienne. Quant à l’être, impuissant qu’il est, il continue, intrigué, d’interroger la mort dans ses énigmes et de confier son insoutenable tragédie d’être aux horizons, indécis, du fatum. Il est incapable de tricher avec la mort, car la mort n’est pas un jeu, elle est une expérience sérieuse. Toutefois, éloge de la vie oblige, il faut dire que dans la perte d’une personne, on tremble d’adieu, mais on se réjouit des retrouvailles possibles dans un autre temps et dans un autre espace. Le bonheur de la demeure chasse la douleur de l’adieu…
PAR Atmane Bissani
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