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Quelques laboratoires sont spécialisés dans la fabrication de ces prothèses oculaires, descendantes de l’antique oeil de verre, que portent des dizaines de milliers de personnes à travers le monde à la suite d’accidents. Comme à Lyon, où la peinture minutieuse de l’iris est confiée à un artiste.
“Comment recréer le pétillant d’un regard?”, se demande Dominique Charles-Messance, qui revendique la dimension artisanale de sa profession d’”oculariste”, organisée en France au sein d’une Union des ocularistes français (UDOF).
Il reçoit ce jour-là Jonathan, patient de 23 ans qu’il suit depuis plusieurs années, venu refaire faire sa prothèse, entièrement prise en charge par la Sécurité sociale.
Le jeune homme, privé d’un oeil depuis une chute à neuf ans, rend hommage au “réalisme” de son oeil factice, réalisé en résine comme toutes les prothèses faites en France. “J’ai mis un certain temps à le dire à ma petite amie”, qui n’avait rien remarqué, explique-t-il.
Mais comme tous les porteurs de prothèse oculaire, il doit la refaire au bout de quelques années. Dès son arrivée au laboratoire, l’oculariste prend une empreinte de son orbite, en y injectant du silicone médical. A partir de cette empreinte, il fabrique la prothèse, cuite au four avant un long polissage manuel.
Pendant ce temps, dans la pièce d’à côté, Philippe Jacquin-Ravot, diplômé des Beaux-Arts de Lyon, s’attelle à la peinture de l’iris de Jonathan, qui sera ensuite fixée sur sa nouvelle prothèse.
Il travaille à partir d’une photo de son oeil sain, posée au milieu des pigments de couleur et des pinceaux fins. Pour un peu, on penserait être dans un atelier de peintre classique, si ce n’étaient les fils de laine rouge, dont les filaments imitent à la perfection les vaisseaux sanguins du blanc de l’oeil.
Il s’aide aussi d’un “teintier”, boîte de bois contenant 80 nuances de bleu et de marron à partir desquelles il va recréer les subtilités de chaque iris.
Car, même pour les renouvellements de prothèse, tout est à reprendre, les yeux s’éclaircissant avec l’âge. “Et il y a jusqu’à sept couleurs dans un iris”, explique le peintre, dont l’oeuvre personnelle est ultra-réaliste, avec des feuillages d’arbres d’une extrême précision, telles les stries d’un iris.
“Il s’agit de reproduire la trame de l’iris, différent chez chacun”, explique Dominique Charles-Messance. Il a créé lui-même son teintier, qui l’accompagne dans ses rendez-vous dans les hôpitaux de Besançon, Dijon ou Lausanne.
L’homme n’aime pas l’expression d’”oeil de verre”, qui renvoie à tous les clichés véhiculés dans des films comme “Peur sur la ville”, où Jean-Paul Belmondo poursuit sur un toit un psychopathe qui perd son oeil de verre en glissant. L’oeil de verre rappelle aussi l’image des “gueules cassées” par la guerre. Or aujourd’hui, les prothèses sont à peine distinguables d’un vrai oeil, si ce n’est leur moindre mobilité. A visée uniquement esthétique, elles équipent toutes les strates de la population, de l’enfant atteint d’une tumeur de la rétine à l’étudiant qui perd son oeil dans une bagarre.
Les accidents domestiques, comme un jet de détergent dans l’oeil ou un enfant qui court avec un crayon à la main, sont également fréquents, explique l’oculariste, dont les tarifs sont fixés par la Sécurité sociale (moins de 900 euros pour une prothèse complète, en cas d’énucléation, un peu plus si elle est posée sur un oeil aveugle disgracieux comme celui de Jonathan).