"Nous avons clairement montré à de nombreuses reprises que nous respections les valeurs européennes mieux que de nombreux pays de l'UE mais nous ne constatons aucun soutien des partenaires occidentaux. Aucune promesse n'est respectée", a déclaré Erdogan lors de la conférence de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) à Istanbul.
"Il y aura demain (jeudi) une session au Parlement européen et ils vont voter sur les négociations de l'UE avec la Turquie. Quel que soit le résultat, ce vote n'aura aucune valeur à nos yeux", a-t-il poursuivi accusant également les Européens de prendre le parti d'organisations terroristes.
En effet, les eurodéputés se prononceront sur la suspension des pourparlers avec Ankara aujourd’hui au cours d'un vote en séance plénière à Strasbourg qui risque de creuser un peu plus le fossé entre Ankara et l'Union européenne mais qui n'est pas contraignant. En outre, la majeure partie des Etats membres de l'UE sont contre un arrêt de ces discussions avec la Turquie qui ont officiellement commencé en 2005, progressant depuis lentement.
Le résultat du scrutin ne fait guère de doute compte tenu du poids des partis favorables au gel, malgré l'opposition de la responsable de la diplomatie européenne Federica Mogherini.
"Nous soutenons un gel des négociations sur l'accession à l'UE", a twitté Manfred Weber, le président du groupe conservateur PPE, le plus important.
"Les négociations d'adhésion de la Turquie doivent être provisoirement gelées", les conditions ne sont pas réunies "pour aller de l'avant maintenant", a renchéri son homologue socialiste Gianni Pitella lors d’un débat largement à sens unique.
Pour M. Pitella, la suspension provisoire des pourparlers enverra un "message politique" au président Recep Tayyip Erdogan pour qu'il stoppe "les détentions de masse, la mise en accusation de dirigeants politiques et de parlementaires, la répression à l'encontre des juges et des journalistes".
Très remonté, le chef du groupe des libéraux, Guy Verhofstadt, a estimé que "prétendre que les négociations d'accession peuvent continuer dans de telles circonstances revient à tromper nos citoyens et à trahir les citoyens turcs. Trahir ceux qui regardent vers l'Europe pour leur avenir".
Ouvrant le débat, Mme Mogherini a appelé à "garder les canaux (de communication) ouverts" avec la Turquie, qualifiant le gel des relations de scénario dans lequel "tout le monde" est perdant.
Dans un communiqué, le vice-Premier ministre turc Numan Kurtulmus a d'ores et déjà jugé qu'"avec ce vote, le Parlement européen s'éloigne de tout dialogue constructif avec la Turquie et soulève de sérieuses interrogations quant à la fiabilité de l'Union européenne en tant que partenaire".
Dans un rapport publié mercredi dernier, rejeté par Ankara, la Commission européenne a critiqué le "retour en arrière" de la Turquie sur les critères d'adhésion au bloc européen, en particulier en ce qui concerne la liberté d'expression et l'Etat de droit.
Les dirigeants de plusieurs groupes au Parlement de Strasbourg ont expliqué mardi "qu'il était impossible de mener un dialogue avec la Turquie dans les circonstances actuelles".
Les députés européens s'inquiètent notamment du projet de rétablissement de la peine de mort et de la poursuite de la répression menée dans le pays depuis le putsch manqué le 15 juillet.
Plus de 125.000 personnes, militaires, policiers, magistrats mais aussi fonctionnaires ont été limogés et pour certains emprisonnés en raison de leurs liens présumés avec le prédicateur Fethullah Gülen qui vit en exil aux Etats-Unis.