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El Houssein Arjdal : Le terme Imaâchar provient de Tamaâchourt : mot qui désigne en berbère le grand feu allumé dans les ruelles des villages pour fêter l’avènement de cette date historique qui mémorise ce rituel traditionnel. Mais actuellement, ce vocable englobe dans son acception toute une série de cérémonies populaires d’un spectacle collectif. Dont la plus significative est le port de masques et peaux d’animaux lors de la procession officielle qui fait le tour des divers quartiers et anciennes venelles de la ville.
Revenons à la dimension historique de ce rituel !
D’abord c’est une tradition populaire ; un patrimoine vieux de plusieurs siècles. Quant à son origine, les supputations vont bon train. Certains chercheurs disent que c’est un héritage de la culture judaïque berbère; d’autres soutiennent qu’il est issu des croyances antiques où s’entremêlent les substrats culturels et à caractère religieux, chrétien, musulman et païen. Mais je pense c’est un peu tout cela en fait, faute d’une interprétation historiquement objective. Cette manifestation coïncide habituellement avec l’Aâchoura fêté par la communauté musulmane. Si l’on regarde du côté de sa morale en tant que phénomène de croyance social, c’est en quelque sorte un genre de catharsis qui permet de faire son mea culpa et dénoncer en même temps tous les travers de la société. Le port de masques est nécessaire car il empêche le dénonciateur de se faire connaître aux yeux des spectateurs. Tous les villageois peuvent participer à cette opération, pourvu que soient respectés les rituels et autres gesticulations et répliques de ce spectacle qui est en fait une pièce théâtrale jouée en plein public.
Dans quelle mesure cette manifestation peut-elle contribuer à la mémorisation et la préservation du patrimoine immatériel dans la région de Tiznit ?
D’abord, je veux souligner que ce carnaval et toutes les activités qui se font en parallèle ont pour objectif premier de réhabiliter cette tradition. Certes elle n’est pas l’apanage de Tiznit toute seule : elle est fêtée également dans la région limitrophe d’Ifrane, Aglou, etc. ; mais elle est actuellement en déperdition et son abandon est un fait dans ces contrées. C’est pour cette raison que l’Association Issmoun s’est efforcée de faire sortir cette fête populaire de son aspect purement folklorique et historique réducteur. Et ce, en exploitant sa symbolique et sa valeur morale en l’inscrivant dans une large dimension culturelle. On a constaté que les jeunes pratiquaient avant cette tradition dans un sens qui compromet sa vraie valeur, sans encadrement et dans l’ignorance de ses vertus en tant que phénomène sociétal « salubre ». Elle était une occasion pour la collecte de l’aumône par les enfants. Et c’est en partant de ce constat que les Associations Issmoun, Amoudou, Tamaynout…et tant d’autres ont pensé redonner son vrai sens à cette tradition et créer autour un événement à même d’explorer, de faire connaître et tirer profit du patrimoine culturel immatériel local, pour mieux le protéger et le pérenniser dans la mémoire collective.
(idriss-ouchagour@yahoo.fr)