Des demi-mesures en trompe-l’oeil


Hassan Bentaleb
Mercredi 8 Juin 2022

Un dialogue social historique, inédit…, se gargarise le ministre de l'Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l'Emploi et des Compétences

Des demi-mesures en trompe-l’oeil
Abdelhamid Fatihi: Rien de concret ni de consistant à se mettre sous la dent

Younes Sekkouri, ministre de l'Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l'Emploi et des Compétences, est un homme qui croit dur comme fer que l’accord social et la Charte nationale sur le dialogue social signés le 30 avril dernier par le gouvernement, la CGEM et certains syndicats sont des «accords historiques et inédits» dans l’histoire contemporaine de notre pays. Intervenant lundi lors de la séance des questions orales à la Chambre des représentants, le ministre n’a pas hésité à souligner que l’Exécutif a bien assuré sa mission et est parvenu à conclure « un accord sans précédent » qui englobe plusieurs mesures et procédures pratiques ainsi que l’objectif d’institutionnalisation du dialogue social. Pour lui, le succès de cette entreprise est dû, avant tout, à la méthode et à l’état d’esprit du gouvernement qui ont permis la conclusion d’un accord et l’introduction d’un nouveau concept, à savoir celui de «l’année sociale» dont l’une de ces manifestations est la réunion, deux fois par an, entre le chef du gouvernement et les syndicats, pour examiner l’avancée des engagements pris. A ce propos, il a annoncé que tous les 15 jours, chaque ministre doit présenter le bilan de son travail devant le chef du gouvernement qui doit, à son tour, le présenter devant les syndicats. Et qu’en est-il des grandes reformes qui suscitent débat et divergence entre partenaires sociaux, à savoir le droit de grève, le Code du travail, le prolongement de l’âge de la retraite, etc.? Le ministre a indiqué que le gouvernement a déjà conçu sa vision des réformes à entreprendre mais il ne veut rien dévoiler pour l’instant puisqu’il est en train de chercher la bonne méthode de travail avec les syndicats. Pour Abdelhamid Fatihi, secrétaire général de la Fédération démocratique du travail (FDT), les propos du ministre ne sont que de la communication politique. En effet, l’accord social et la Charte nationale sur le dialogue social n’ont rien porté de nouveau ni de meilleur pour améliorer la situation des fonctionnaires ou celle des salariés du privé. « L’Exécutif prétend réaliser un exploit, mais la réalité est autre puisque nous sommes face à des mesures à faible impact sur les conditions de vie des travailleurs ou des mesures anciennes remises au goût du jour », a-t-il souligné. Et de nous préciser : «Tel est le cas de l’augmentation du Smig pour le secteur public à 3.500 DH par mois au lieu des 3000 DH qui ne concerne qu’un faible nombre de fonctionnaires. Idem pour la suppression de l’échelle 7 pour les fonctionnaires appartenant aux catégories d'adjoints administratifs et d’assistants techniques dont l’opérationnalisation ne coûtera pas cher au budget de l’Etat ». Pis, estime le SG de la FDT, le gouvernement a intégré les promotions des fonctionnaires dans le bilan de l’accord alors qu’il s’agit d’un droit qui a été gelé lors des deux dernières années. Au sujet de de l'institutionnalisation du dialogue social, Abdelhamid Fatihi soutient qu’il n’y a rien non plus d’original concernant ce volet puisqu’il s’agit d’une traduction pratique de ce qui a été décidé lors du gouvernement Jettou, à savoir la mise en place de deux rounds de négociation (en avril et septembre) ainsi que l’instauration d’une Haute commission de dialogue et des sous-commissions dans les secteurs public et privé. « Donc, tout avait été décidé auparavant. La nouveauté, c’est de transformer ce qui a été de l’ordre de convenu au format d’un accord écrit », nous at-il précisé. Touchant le secteur privé, notre interlocuteur nous a expliqué que l’augmentation du Smig pour les secteurs de l’industrie, du commerce et des services, de 10% sur deux ans, est un vrai piège puisque la deuxième augmentation de 5% censée avoir lieu en septembre 2023 sera conditionnée par la promulgation de la loi sur la grève et la modification du Code du travail en introduisant la clause de flexibilité. « Du coup, l’application de 5% restera tributaire des négociations qui s’annoncent difficiles et rien ne garantit que ladite hausse sera opérationnelle», nous a-t-il indiqué. Et de conclure : « Bref, rien de nouveau n’a été mis en place. Pis, rien de concret n’a été entrepris au niveau de la promulgation des décrets en relation avec le dialogue social puisqu’aucun texte n’a été discuté ou voté ». Des propos que partagent certains parlementaires qui soutiennent que ledit accord n’a rien d’exceptionnel ni d’intéressant pour les travailleurs. Selon eux, ledit accord n’est qu’une série de promesses et d’échéances à venir. Pire, ils estiment que ces promesses n’ont rien de concret ni de consistant pour améliorer le pouvoir d’achat des fonctionnaires et des employés. Certains estiment que ces promesses vont rejoindre celles lancées pendant la campagne électorale, tel est le cas d’embaucher des enseignants contractuels avec des salaires de 7500 DH, d’accorder une aide de 1000 DH aux personnes âgées ou la promotion de la classe moyenne. Certains députés vont plus loin. Ils se demandent pourquoi les syndicats ont accepté l’offre du gouvernement Akhannouch alors que l’offre présentée par les deux gouvernements précédents a été plus alléchante.


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