Nom incontournable de la figuration académique, la défunte a su élaborer un style personnalisé marqué par la profondeur et la quête identitaire conditionnée par l'identité universelle et un retour aux sources. Hypersensible, elle gère tout un espace pictural qui nous fait penser à Fès, à Marrakech, au Rif, à Cordoue et à Séville, et ce par rapport aux diverses Andalousies.
Sa peinture allusive met en relief une nostalgie qui reflète le regard profond du Maroc pluriel via le mouvement et la vie des couleurs et des paysages. Elle a pu créer l'alchimie des couleurs et des scintillements, en donnant une âme aux personnages, et mettant en scène les détails et l'effet de miroir. Elle a exprimé sa passion pour sa terre natale qu'elle dépeint avec doigté et minutie.
Armée simplement de sa grande sensibilité et anthropologue avisée, la défunte a été un témoin de son temps dont l'œuvre demeure une plate-forme pour scénariser le pinceau, la gouache.
Meriem Mezian a été considérée comme le chantre des fresques intérieures du monde arabo-musulman, voire l'ambassadrice attitrée du Maroc, une figure illustre de sa culture et de sa civilisation. Elle incarne une culture à dimensions multiculturelles : berbère, arabe, marocaine, hispanisante, éclectique aussi dans ses choix d'artiste et tout aussi populaire dans sa générosité.
Sujets de prédilection, les femmes dégagent une intimité finement tracée et engagent une profonde quête quasi personnelle. Halo de mystère et monde visuel autonome, la peinture pour Mezian est un hymne à l'humanité dans tous ses états d'âme. Un voyage dans le temps et l'espace, l'art se veut le miroir d'une exigence : porter comme un blason, un style et une écriture limpide et pénétrante. Son nom restera gravé dans les annales de la peinture internationale, il porte la marque profonde d'une signature, d'un visage noble et rayonnant.
La peinture de Meriem est un carrefour qui nous ouvre un musée imaginaire et une voix du silence. C'est l'occasion de traduire l'émotion ressentie par les passionnés des arts plastiques après la disparition de l'un de ses membres les plus représentatifs de la peinture marocaine. C'est aussi un témoignage à la mémoire de cette artiste avec qui nous avions partagé tant d'espaces artistiques où la création était l'univers d'expression commune.
Artiste de renommée nationale et internationale, ambassadrice de la peinture marocaine durant toute sa vie artistique, Meriem bénéficie d'une haute distinction culturelle nationale et qui mérite des égards à titre posthume.
Elle est un élément de l'expression, de notre histoire culturelle qui a permis l'émergence de valeurs emblématiques dont le rayonnement a dépassé l'enceinte nationale pour imposer une forme picturale et des frontières, au-delà des océans. Sa certitude était son nomadisme bâti sur le dialogue, la défense des droits de l'Homme, la lutte contre l'exclusion, l'injustice, et l'engagement pour un monde meilleur. Meriem a travaillé sur l'univers de la beauté apparente, de l'esprit et de l'art, par un chemin enrichi d'une expérience picturale singulière continuellement remise en cause et des écrits puisés dans une réflexion évolutive.
Peintre de l'impressionnisme nostalgique, elle fut la fondatrice et la pionnière de la création au féminin qui cherche à s'affirmer et à accomplir le rôle qui incombe à la femme artiste dans la société.
De surcroît, elle n'a pas cessé, sa vie durant, de militer en s'impliquant activement dans des actions citoyennes. L'artiste a rendu l'âme. Mais ses toiles auxquelles elle a savamment mêlé poèmes et magie chromatique ainsi que ses carnets de voyage témoigneront à jamais de son incontestable talent.