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«C’est eux les chiens» raconte l’histoire de Majhoul, un sexagénaire qui vient de passer 30 ans dans les geôles marocaines pour avoir manifesté en 1981, lors des «émeutes du pain». Il retrouve la liberté en plein Printemps arabe. Une équipe de télévision en quête de sensationnel décide de le suivre dans la recherche de son passé. Ulysse moderne, Majhoul les entraîne dans une folle traversée de Casablanca, au cœur d'une société marocaine en ébullition. Ou comment un perdant magnifique se fraie un chemin pour regagner sa place dans une société arabe moderne tiraillée entre un conservatisme puissant et une soif de liberté.
«L’un des sujets du film est cette image du monde en guerre», indique Hicham Lasri dans un entretien accordé au site français spécialisé Universcine.com. « J’ai fait le choix d’être opérateur sur le film, de cadrer tous les plans pour me plonger moi et ma caméra dans le tumulte de Casablanca qui passe à certaines heures de la journée pour un champ de bataille, ajoute-t-il. On a cherché à filmer le chaos d’un pays en voie de développement, qui vit à plusieurs vitesses. Il fallait capter la poésie de ce chaos et en faire un voyage cinématographique». «On jongle et on traverse beaucoup de strates de la société marocaine», précise le réalisateur, tout en soulignant que «beaucoup de thèmes sont abordés comme les Subsahariens qui se retrouvent coincés au Maroc dans leur projet d’émigration vers l’Europe, le soulèvement populaire suscité par les Printemps arabes, etc». «Je ne les traite pas sous l’angle du militantisme, mais plus comme un match de foot, c’est-à-dire avec une certaine distance et pas mal d’ironie», explique Hicham Lasri. Et d’ajouter : «J’ai voulu traiter le repli identitaire provoqué par ces révoltes par le silence : il n’y a aucune musique dans le film, la plupart des dialogues sont hors-champ, le son est capricieux... J’avais envie de mélanger deux époques, avec pour seul commentaire que rien n’a changé au fond».
Questionné sur les méthodes suivies dans la réalisation de ce film, Hicham Lasri a affirmé être quelqu’un de très formaliste. «Ce qui m’amuse, c’est la recherche, être dans l’artisanat de la fabrication d’images étranges, inventer des émotions sans être dans une musique poussée ou des dialogues trop théâtraux, dit-il. Je crois avoir fait un film youtubien : il joue avec les codes de la téléréalité, du documentaire, de la théâtralité et avec ceux des vidéos spontanées mises en ligne, parfois très scotchantes!». «L’idée était de donner l’impression que ça se passe devant nous, ajoute Lasri. C’est la caméra de télévision qui filme. Il fallait du hors-champ et de la frénésie, cela a été un gros travail de montage pour garder cette intégrité. Sur le scénario, Nabil Ayouch, le producteur, me demandait toujours “qui filme?” alors j’ai décidé d’écrire le scénario en précisant à chaque séquence qui filme et pourquoi il filme en essayant d’y apporter des réponses logiques et précises. Cela me permettait de voir les choses plus clairement et d’être cohérent.
Interrogé sur la part de l’improvisation dans son long métrage, le réalisateur a affirmé que le comédien apporte un bagage mais il n’y avait aucune improvisation. «Il incarne les idées, même si les dialogues importent moins pour moi, c’était très écrit. Les comédiens jouent une situation mais ne sont pas conscients de l’enjeu du film dans sa globalité », indique-t-il. «Un film, c’est des petits bouts perméables à l’érosion. En improvisant, le comédien se mettrait dans sa zone de confort alors que pour moi, il est intéressant d’arriver tous ensemble sur un territoire vierge», conclut-il.