Au CNDH, la question de l’abolition divise les membres : Mobilisation marocaine contre la peine de mort


Narjis Rerhaye
Mercredi 10 Octobre 2012

Au CNDH, la question de l’abolition divise les membres  : Mobilisation marocaine contre la peine de mort
Cette année, c’est dans un contexte propice à la mobilisation que les activistes de l’abolition de la peine de mort célèbrent aujourd’hui 10 octobre  la Journée mondiale contre ce châtiment
Les activistes se sentent pousser des ailes. Les clameurs de la suppression de cette sentence, cruelle et inhumaine, seront-elles entendues par un gouvernement dirigé par le PJD, un parti résolument anti-abolitionniste ? Au Conseil national des droits de l’Homme, c’est la circonspection qui est de mise. L’abolition de la peine de mort est une question sensible  et délicate, y explique-t-on. «Comme toute question de société qui touche à la foi. Il faut bien l’admettre,  la problématique de la peine de mort divise la société marocaine. Une partie très importante de la société  est en faveur de ce châtiment. C’est pourquoi il est important d’engager un débat public et pluraliste sur cette question sachant que la peine de mort n’est pas un châtiment exemplaire, qu’elle ne fait pas reculer le crime et qu’elle rabaisse la société au niveau du criminel qui ôte la vie», explique Driss El Yazami, le président du Conseil national des droits de l’Homme. «C’est par le débat et la conviction et non par un oukaze que nous pouvons avancer. D’autant qu’en matière de peine de mort, on n’est jamais à l’abri d’une erreur judiciaire», poursuit celui qui était membre de l’Instance équité et réconciliation, une instance qui a recommandé l’abolition de la peine capitale dans son rapport final.
«Ce 10 octobre n’est pas une journée comme les autres. Plus que jamais, la mobilisation doit être forte. Pas question de faire taire nos revendications. Les couloirs de la mort doivent disparaître et la peine capitale doit disparaître du Code pénal». Ce militant, passionné de la vie et membre de la Coalition marocaine  contre la peine de mort, veut y croire. Le droit à la vie doit l’emporter sur la sanction  définitive et irrémédiable de mort prononcée par les magistrats. Un optimisme pas vraiment béat. Au pays de la symbolique, on veut décrypter les signes qui sont autant de raisons d’y croire.  Le congrès régional contre la peine de mort qu’organise «Ensemble contre la peine de mort» se tient à Rabat, ces 19 et 20 octobre en fait partie. Et dans la série des bonnes nouvelles, le président et le Secrétaire général du Conseil national des droits de l’Homme soutiennent activement et officiellement cette rencontre des abolitionnistes de la région.
Les abolitionnistes ont-ils pour autant le vent en poupe en terre marocaine ? Ce 10 octobre, la Coalition marocaine contre la peine de mort  que composent l’Association des barreaux du Maroc, la section marocaine d’Amnesty International, l’Observatoire marocain des Prisons, l’Organisation marocaine des droits humains, le Forum vérité et justice et le Centre des droits des gens, se mobilise autour de la thématique d’«abolir la peine de mort pour un monde meilleur» et rencontre ce même jour la presse pour évoquer «les derniers développements de la question de la peine capitale et les perspectives de son abolition».  Leur plaidoyer sera-t-il entendu par l’instance nationale de la réforme de la justice ? Difficile d’apporter une réponse à une question qui à l’évidence dérange…

La Constitution et l’abolition

La section marocaine d’Amnesty International  poursuit, elle, sa lutte en faveur du droit à la vie et de la suppression de la peine de mort.  A la veille de la Journée mondiale contre la peine de mort, Amnesty International Rabat a lancé un double appel au gouvernement Benkirane : le  vote du Maroc en faveur du  moratoire sur la suppression du châtiment suprême qui sera soumis en décembre prochain à la 67ème Assemblée générale des Nations unies  et l’application de la nouvelle Constitution du pays qui consacre le droit à la vie et ce, en procédant à la révision de tout l’arsenal juridique autorisant la sentence de la peine de mort.  «En parallèle, des activités de mobilisation sont organisées par la section marocaine d’Amnesty International.  Dès aujourd’hui, nous lançons des journées de sensibilisation dans plusieurs écoles, au niveau national. Une table ronde sur la problématique de la peine de mort est également organisée demain 11 octobre  à Casablanca. Le 16 octobre, le théâtre de rue mettra en scène la cruauté de la peine de mort, à Rabat sur l’avenue Mohammed V. Et bien évidemment, nous participerons aux travaux du congrès régional contre la peine de mort», annonce  un activiste de la section marocaine d’A.I.
A cette mobilisation marocaine s’ajoute le soutien de la France aux abolitionnistes d’ici, placés sous la bannière de «Ensemble contre la peine de mort». En septembre 2011, leur mouvement s’est vu accorder par Paris une subvention de 200.000 euros. «Fort du moratoire de fait qu’il applique depuis 1993, dans une région «Afrique du Nord/Moyen-Orient» marquée par le plus fort taux d’exécution par habitant dans le monde, le Maroc constitue aux yeux de la France, un partenaire précieux pour avancer sur le chemin de l’abolition universelle de la peine de mort», rappelle un communiqué de l’ambassade de France au Maroc.
L’abolition de la peine de mort est-elle au menu  des réformes que le gouvernement Benkirane a l’intention d’engager ?  Pas si sûr. «La Constitution adoptée en juillet 2011 n’a pas interdit expressément ce châtiment suprême. D’ailleurs, un débat sur la question a divisé les membres de la commission consultative en charge de la réforme constitutionnelle. Ceux qui étaient contre l’abolition l’ont emporté. Certes, la Constitution consacre le droit à la vie. C’est un principe général que l’Etat doit garantir au quotidien et qu’il ne faut pas interpréter de manière stricto sensu», conclut un membre de la commission en charge de la réforme de la Constitution.


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