Abdelilah Benkirane, deux ans à l’épreuve du pouvoir

«Le chef du gouvernement entre dans l’histoire à reculons»


Narjis Rerhaye
Mercredi 4 Décembre 2013

Abdelilah Benkirane, deux ans à l’épreuve du pouvoir
Abdelilah Benkirane s’apprête à souffler ses deux années aux commandes du pouvoir. L’heure est au bilan. Un bilan que le chef du gouvernement islamiste ne se résout toujours pas à faire, n’hésitant pas au passage à écorner la Constitution. Nommé à la tête de  l’Exécutif  en décembre 2011,  le leader du PJD s’apprête à « célébrer » ses deux ans de pouvoir, sans cotillons ni paillettes. Et pour cause ! Benkirane ne fait plus rêver. L’espoir s’est estompé depuis longtemps déjà.  La colère gronde chaque jour davantage. Les Marocains sont dans la rue, un peu partout à travers le pays, pour manifester leur ras-le-bol et  exprimer leurs doléances. « Benkirane, où sont tes promesses ? » scandent les manifestants, un peu partout. A la télévision comme au Parlement, Benkirane ne fait même plus du Benkirane. L’usure du pouvoir a mis fin au show.
Pour  l’Usfpéiste Abdelhamid Jmahri, les deux années passées à la primature  par M. Benkirane tiennent en un seul mot : ratage. « Abdelilah Benkirane n’a pas su s’inscrire dans le sens de l’histoire. Il avait la chance d’apparaître comme un homme d’Etat. Aucun homme politique avant lui n’a eu cette chance. Il ne l’a pas saisie. En fait, Benkirane a préféré entrer dans l’histoire à reculons ! », s’exclame celui qui est  membre du Bureau politique de l’Union socialiste des forces populaires.
Au Maroc, l’histoire a justement servi l’arrivée au pouvoir des islamistes, classés premiers aux législatives du 25 novembre 2011. Le Printemps arabe était surtout passé par là. «On croyait qu’on allait assister à un tournant historique dans ces pays où le printemps s’était arrêté, un peu à l’image de ce qui s’était passé en Europe de l’Est après la chute du Mur de Berlin. Il faut bien le dire, seul le Maroc a su apporter une réponse intelligente et rationnelle aux revendications citoyennes  donnant à voir les islamistes arriver au pouvoir par le vote et les urnes. Ce faisant, l’Etat a été un  outil de rationalisation et non de répression. Malheureusement, Benkirane et ses troupes n’ont pas su s’inscrire dans le sens de cette histoire», fait remarquer A. Jmahri.
Dans les états-majors de l’opposition, l’inquiétude s’est installée à tous les étages. Les critiques se bousculent. Les défaillances sont pointées. Les menaces sont énumérées. Le problème de la compétence est clairement énoncé. Au lieu de gouverner, réformer, améliorer les conditions de vie des Marocains, procéder à la relance de la machine économique, le chef du gouvernement a passé tout son temps à donner des gages de confiance et de bonne volonté au Palais. « Alors qu’il n’en avait pas besoin. La Constitution de 2011 lui donne de larges prérogatives et une marge de manœuvre inédite. Résultat, le chef du gouvernement n’a pratiquement rien entrepris. Personne ou presque n’est content, ni les riches ni les pauvres, ni les syndicats ni le patronat, ni l’opposition ni la majorité », soutient le directeur de la rédaction d’Al Ittihad Al Ichtiraki.
Au parti de la Rose, on le dit sans ambages : Benkirane s’est inventé des résistances échappées d’un imaginaire névrotique où démons et crocodiles sont invoqués souvent pour masquer une défaillance gouvernementale.

Mezouar I ou
Benkirane II ?
En fait pour ce ténor de l’USFP,  le grand ratage du chef du gouvernement, celui-là même qui est censé animer, fédérer et mobiliser une équipe ministérielle réside dans le fait qu’il n’a pas su, pas pu insuffler l’esprit et la frénésie de la Constitution de juillet 2011. «C’est ce rendez-vous que le Maroc est en train de rater après avoir en plus perdu sa souveraineté financière».
Au Parti authenticité et modernité, le verdict est sans appel : le bilan de M. Benkirane et ses troupes est bien plus que faible, inexistant. «C’est le seul gouvernement au monde qui a pour bilan injures et promesses non tenues !», s’indigne Iliass El Omari, membre du bureau politique du PAM. «Deux ans après la déclaration gouvernementale prononcée par le chef du gouvernement, rien n’a été fait. Cela fait à peine deux mois que le président du Rassemblement national des indépendants a fait la sienne. Attendons donc avant de juger ! », s’exclame ce membre fondateur du parti du tracteur donnant raison à tous ceux qui, depuis le remaniement gouvernemental préfèrent parler de « Mezouar I » plutôt que de « Benkirane II».
Mais c’est sur la question des droits des femmes  et de l’amazighité que toutes les peurs se sont cristallisées. En deux ans de gouvernement, Benkirane a réussi à se mettre à dos le mouvement féminin autant que les activistes amazighs, deux vecteurs de modernité. Depuis sa nomination, le chef du gouvernement s’est toujours abstenu de les rencontrer malgré toutes leurs demandes de rendez-vous. Et ce n’est sûrement pas un hasard…


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