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« Ce rapatriement ne sera pas effectué d’un seul coup. Il n’y aura pas d’affrètement d’avion comme les dernières fois. Les concernés seront rapatriés par petits groupes via l'aéroport international de Tunis-Carthage. Nous avons eu l’aval des autorités tunisiennes après plusieurs interventions auprès des officiels de ce pays en vue d’accélérer le processus », nous a indiqué une source, proche du dossier sous le sceau de l’anonymat. Et d’ajouter : « Cette autorisation de passage par l’aéroport de Carthage n’a pas été facile à obtenir vu que celui-ci enregistre un flux important de touristes et de passagers ».
Les nouveaux rapatriés rejoindront ainsi les 500 jeunes Marocains candidats à l'immigration vers l’Europe qui ont été dernièrement rapatriés de Tripoli vers Casablanca. La majorité d’entre eux est originaire de Fqih Ben Saleh et de Béni Mellal. Ils ont payé plus de 20.000 DH à des passeurs pour les faire débarquer en Italie. Ces jeunes franchissent souvent la frontière tunisienne, notamment par Ras Ajdir pour débarquer en Libye alors qu’à l’instar des Egyptiens, des Bangladeshis, des Soudanais et des Syriens, ils sont déclarés persona non grata en Libye. Une décision des militaires libyens leur interdit, en effet, d’accéder à ce pays. Nombreux sont ceux d’entre eux qui ont été arrêtés dernièrement et incarcérés par les milices de lutte contre la migration irrégulière. Chanceux sont ceux d’entre eux qui ont pu disposer d’un garant ou faire appel à un passeur pour échapper à la vigilance de ces dernières. Ces candidats à l’immigration sont souvent victimes des vols commis soit par des passeurs, soit des migrants ou des miliciens. En fait, de nombreux groupes armés ont été dernièrement créés pour soi-disant lutter contre le départ d'embarcations de migrants depuis les côtes libyennes. Regroupant des civils, des policiers et des militaires, ces groupes effectuent, depuis des mois, des opérations coup de poing contre les passeurs et leurs embarcations en terre comme en mer, une mission qui ne semble guère aisée puisque le pays est divisé et en proie à une grande instabilité depuis 2011.
Notre source nous a également précisé que les autorités marocaines ne rapatrient que les personnes dont elles sont sûres de l’identité. « Ceux qui disposent de pièces d’identité marocaines sont rapatriés dans l’immédiat après une simple vérification. En cas de non possession d’un passeport ou d’une carte d’identité nationale, nous procédons à une prise d'empreintes. Une démarche difficile à entreprendre puisque le consulat du Maroc n’a pas le droit d’officier sur le territoire libyen. En fait, la situation sécuritaire dans ce pays est grave et l’accès n’y est pas facile même pour les diplomates. Ils risquent d’être kidnappés, etc.», nous a-t-elle précisé. Et de poursuivre : «Nos services sécuritaires accèdent au territoire libyen sous la supervision des autorités de ce pays. Un membre du consulat accompagne souvent les sécuritaires dans leur travail. La prise d’empreintes ne s’effectue pas facilement. L’équipe marocaine se trouve, en effet, confrontée à des problèmes de communication avec les autorités libyennes. Ceci d’autant plus qu’il n’y a pas un seul interlocuteur. En fait, celui qui gouverne Zouara n’est pas celui qui dirige Sabrata, Zaouia ou Misrata sans parler des milices. Bref, il n’y a pas d’Etat central».
En outre, notre source nous a précisé que l’opération de prise des empreintes prend beaucoup de temps puisque celles-ci sont envoyées vers le Maroc pour être vérifiées et comparées avec celles existant dans les fichiers centraux. «Le Maroc identifie scrupuleusement chaque personne avant son rapatriement puisqu’il s’agit d’un véritable enjeu sécuritaire. Aucun migrant ne peut accéder au territoire national sans certitudes sur sa nationalité et sa provenance. En effet, il y a beaucoup de migrants d’autres nationalités, notamment algériennes, qui prétendent être marocains».
D’après notre source, cette obstination du Royaume à s’assurer de l’identité des personnes rapatriées dérange les autorités libyennes qui semblent vouloir se débarrasser des migrants irréguliers coûte que coûte. « La lenteur des vérifications suscite de mauvaises réactions de la part des services libyens qui n’hésitent pas à manipuler les médias pour faire pression sur le Maroc. Nous avons assisté à une véritable campagne de désinformation. Tel est le cas des nombreuses photos et vidéos postées sur les réseaux sociaux où l’on voit un groupement de jeunes Marocains sollicitant l’intervention du Roi ou se plaignant du retard pris par le Maroc pour les rapatrier. Il y a même certaines ONG qui nous proposent des billets d’avion gratuitement pour rapatrier des migrants irréguliers mais les autorités marocaines refusent pareilles offres. Pour elles, la question de la sécurité prime», nous a-t-elle révélé. Et de conclure : « Le Royaume n’a jamais refusé de se départir l’un de ses citoyens. Des efforts gigantesques sont déployés à ce niveau mais en toute discrétion. Nous subissons des pressions alors que nous n’avons pas d’interlocuteur unique et fiable en Libye. Bref, il s’agit d’opérations délicates, complexes et humainement éprouvantes».