120 mineurs non accompagnés arrêtés en une journée

Un record qui en dit long sur la prédisposition du Maroc de faire avec l’agenda migratoire européen


Hassan Bentaleb
Mercredi 18 Juillet 2018

Plus de 120 mineurs non accompagnés ont été appréhendés dimanche à Béni Ansar.  Il s’agit de la première vaste campagne d’arrestations opérée par les autorités marocaines depuis le début de l’année. «Ce genre de campagnes est monnaie courante dans ces zones notamment pendant cette période de l’année marquée par le retour au Maroc des MRE via le port de Béni Ansar. Mais, c’est la première fois qu’on arrête un tel nombre de mineurs au cours d’une même journée », nous a indiqué Omar Naji, président de la section AMDH-Nador. Et de poursuivre : «Le chiffre de 120 personnes prouve d’une part, que la ville compte un grand nombre de ces mineurs et d’autre part, que les autorités marocaines sont bel et bien en train d’appliquer l’agenda européen en matière de lutte contre la migration des mineurs non-accompagnés notamment celui de l’Espagne qui accuse le Maroc de laxisme dans ce dossier et cherche à l’impliquer directement dans sa gestion». 
Les autorités marocaines ont indiqué avoir pris les dispositions nécessaires afin de remettre   ces mineurs à leurs familles. Des propos auxquels Omar Naji n’accorde que peu de crédit. «Mener une telle opération est une tâche ardue. En fait, identifier plus de 120 familles en vue de leur remettre  120 mineurs demande une importante logistique et des moyens humains conséquents», nous a-t-il expliqué. Et d’ajouter: «Ceci d’autant plus que les autorités se contentent souvent de remettre ces mineurs à des chauffeurs d’autocars pour les acheminer vers leurs villes d’origine». 
Qui sont ces mineurs non-accompagnés ? «Il s’agit de personnes âgées entre 13 et 18 ans mais la moyenne d’âge le plus représentative reste 15 ans. Elles sont originaires de Nador et d’autres villes marocaines. Dernièrement,  nous avons assisté à une forte présence de mineurs en provenance du Sud-est (Tinghir, Zagora, Errachidia…)», nous a expliqué le président de l’AMDH-Nador. Et de poursuivre : «En majorité, ces jeunes ne sont pas des enfants des rues. Ils sont souvent éduqués et  issus de familles avec lesquelles ils sont en contact.  Certains sont issus de familles pauvres ou de familles à problèmes».
Notre source nous a affirmé, par ailleurs, que ces mineurs sont souvent livrés à eux-mêmes. Ils vivent dans la rue avec leurs propres moyens. «Aucune institution ou association ne les prend en charge.  Ils  vivent souvent de l’aide de bienfaiteurs et de mendicité et sont confrontés à des risques énormes. A titre d’exemple, l’un d’entre eux a perdu les deux mains lors d’une tentative de passage illégal à Mellilia dans un camion-citerne.
Notre source nous avait affirmé dans une déclaration antérieure  qu’un centre d’accueil pour les mineurs non accompagnés de l’Entraide nationale existait bel et bien dans  la commune d’Al Aroui (située à 22 km de Nador) mais qu’il était quasiment inoccupé puisque seuls 10 mineurs avaient accepté d’y résider alors que cette cité comptait près de 1.000 mineurs non-accompagnés.  Ce qui veut dire que  ces mineurs refusent catégoriquement de s’installer dans ce genre d’établissement  malgré les sollicitations des acteurs associatifs et sociaux. 
L’idée de créer un nouveau centre qui a été proposée dernièrement par l’Espagne a pris du chemin puisqu’elle a figuré à l’ordre du jour de la session du conseil communal de Béni Ansar qui s’est tenue  le 1er février dernier. Il s’agit, en effet, d’un projet qui a été proposé par le gouvernement local du préside occupé de Mellilia lors d’une réunion organisée  en janvier dernier et à laquelle ont pris part des membres des autorités locales espagnoles en présence du délégué de l’Entraide nationale à Nador et des représentants de l’Association marocaine  Sirag. Le gouvernement local de  Mellilia a annoncé qu’il était prêt à financer ce projet à hauteur de 8 millions d’euros. 
L’AMDH avait considéré  ce projet comme une manœuvre de la part des autorités ibériques pour se débarrasser de ce dossier et impliquer le Maroc dans sa gestion, tout se défaussant de leur responsabilité de garantir les droits de ces mineurs confirmés par les accords internationaux et les législations nationales. 
Ahmed Khalifa, chercheur en migration et membre de l’Association Mains solidaires, nous avait, pour sa part,  précisé que ce projet s’inscrivait dans le lot des pressions exercées sur le Maroc, notamment après les problèmes causés par des mineurs à Mellilia et Sebta. Il nous avait également précisé que certaines régions espagnoles, notamment Madrid, tentent de construire des centres au Maroc afin de renvoyer ces enfants de chez-eux. Une manière de contourner la loi puisqu’il s’agit d’un refoulement qui ne dit pas son nom. Ce projet n’a pas abouti.
 


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