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Dans le monde de Choumicha, la mort est collée à la vie des gens comme les puces le sont à un chien ou le noyau à l’olive : «Le silence blanc, c’est la mort. Le silence blanc vient doucement, entre dans les maisons et met sa main sur la bouche des enfants. Les enfants deviennent blancs et montent rapidement chez Rebbi». Le fait que ce soit avec les mots de l’enfant que l’écrivain raconte cette histoire brise le carcan naturaliste. Comme nous l’a dit Mokhtar Chaoui lui-même, le village de Choumicha n’existe pas : «Je n’ai pas voulu préciser le lieu afin que le village soit le symbole de tous les villages oubliés du Maroc». Les yeux de ces enfants vivant là ne sont pas ceux qui brillent de mille feux dans les dessins animés.
Parfois, Choumicha se réfugie dans son arbre. Elle entend des animaux qui viennent lui parler le langage de l’universel, le langage que les adultes ne peuvent pas entendre, le langage de l’amour authentique. Ils essaient de la réconforter, de la soutenir, de lui offrir un peu de chaleur humaine. Mais les événements traumatiques continuent d’accompagner Choumicha, vendue par ses parents à la présidente d’une association d’aide à l’enfance démunie.
Investie publiquement d’une mission noble et récompensée par la Kh’missa, cette femme est en réalité un monstre qui rentre soûle tous les soirs et écrase ses cigarettes sur la peau de Choumicha. L’association n’est qu’un prétexte pour obtenir des financements et vivre ignominieusement de ces fonds en se fichant complètement du bonheur des enfants. Le récit en profite pour donner une charge salutaire contre les logiques néo-coloniales et dévoiler les pires infamies des adultes. Même si son roman n’a strictement rien d’érotique, Mokhtar Chaoui est néanmoins très proche du Marquis de Sade quant à la restitution de la cruauté. Le salut est-il possible? Se fera-t-il lors de la rencontre à Tanger avec un peintre français venu au Maroc chercher une nouvelle source d’inspiration, un nouveau rapport à la pureté? Les sombres périples de l’existence sont parsemés par-ci par-là de brillants soleils.
*Enseignant chercheur CRESC/EGE
Rabat, Cercle de Littérature contemporaire