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Mais quatre de ces établissements scolaires ont réussi à moderniser leurs cursus au niveau du primaire, de l’enseignement collégial et du secondaire. Il s’agit des écoles coraniques d’Ighechane dans la région de Tafraout (où sont scolarisé 56 Talebs), celle de Rassmouka près de Tiznit (80 Talebs) celle d’Ibdi (74 Talebs) et celle de Tafraout’lmouloud à Anzi (82 Talebs).
S’il existe un exemple de réussite qu’il faut mettre en lumière, celui de l’école coranique de Lalla Mammas Ali à Tassrirt mérite toutes les attentions. Créée au milieu du 17ème siècle et située à une vingtaine de kilomètres au Sud de Tafraout, cette école a troqué ses nattes, ses planchettes et ânonnements d’antan contre des salles de classe, des tables, des tableaux et des cours identiques à ceux de tous les établissements scolaires marocains.
En sus des traditionnelles leçons de théologie, de grammaire, de lexicologie, de dialectique, et de rhétorique, ils apprennent la langue et la grammaire françaises, les mathématiques, l’histoire, la géographie, les sciences, la chimie et la physique.
Afin de réussir son challenge de mise à niveau de l’ensemble des Médersas de la province, le ministère des Habous a mobilisé près 120 enseignants exerçant dans les collèges et lycées publics en plus de plusieurs dizaines de lauréats des Instituts des sciences théologiques. Cerise sur le gâteau, des cours d’initiation à l’informatique ont été introduits dans les cursus afin d’assurer aux Tolbas un enseignement moderne à même de leur conférer une formation capable de leur garantir une meilleure insertion sociale et professionnelle.
Ecole coranique de Lalla Mammas Ali à Tassrirt, à une vingtaine de kilomètres au Sud de Tafraout. Il est 5 heures du matin. A la médersa de Tagrramt, chaque jour, la journée commence très tôt par l'habituel «branle-bas» matinal qui précède la prière d'Al fajr. Ici, la discipline est rigoureuse. Tous les tolbas (étudiants) sont tenus de faire preuve d'assiduité et de respecter les horaires d'accomplissement des cinq prières du jour. Une fois achevés ce devoir religieux et la rituelle psalmodie matinale du Coran, commencent aussitôt les cours. Il faut dire que depuis que cette école coranique créée au milieu du 17ème siècle a été placée sous la tutelle du ministère des Habous et des Affaires islamiques, elle arbore un nouveau visage. Finies les nattes sur lesquelles s'asseyaient les tolbas et les planchettes en bois. La grande salle tenant lieu de salle de classe n'a rien à envier aux écoles d'enseignement moderne : tables, chaises, tableau, bibliothèque … Et «les cours sont désormais retranscrits sur cahiers», se plait à nous lancer Abdellah Lajhad, l'imam de cet établissement religieux. C'est lui qui veille au bon fonctionnement et à la gestion des lieux. Il est chargé également de dispenser les cours d'enseignement originel aux trente tolbas que compte l'école coranique. «Les enfants débutent par l'apprentissage de la parole divine; une fois les versets coraniques» appris par cœur, ils entament l'exégèse et le Hadith (paroles du prophète Sidna Mohammed). Après, ils peuvent verser dans les études approfondies de la théologie, de la grammaire et du lexique, de la dialectique et de la rhétorique. Toutefois, depuis qu'elle est soumise à l'encadrement pédagogique du ministère des Habous, la médersa dispose désormais d'un programme unifié agréé par le ministère de tutelle et utilise une méthodologie pédagogique moderne. Sans, bien entendu, se «dévoyer» de sa vocation d'antan, à savoir la propagation et l'approfondissement de la foi. Pour ce faire, deux enseignants, lauréats de l'école de formation des instituteurs, sont chargés par le ministère d'y dispenser des cours. « On nous apprend toutes les matières enseignées dans les écoles publiques : la langue française, les mathématiques, l'histoire-géo, les sciences pratiques, les sciences naturelles, la physique, etc», se réjouit un étudiant.
La médersa, précise l'imam, s'aligne sur le modèle de l'enseignement public. Les cours y sont donnés selon six niveaux scolaires s'étalant de la première jusqu'à la sixième année scolaire. « Exactement comme dans une école normale », souligne A. Lajhad.
En principe, une fois les études primaires terminées, les tolbas peuvent poursuivre leur scolarité dans les classes secondaires, explique notre interlocuteur. Et d’ajouter, la fin de chaque cycle scolaire est désormais dûment sanctionnée par un certificat d’études que les « lauréats » peuvent faire valoir afin d'accéder à d'autres établissements scolaires supérieurs pour poursuivre leur scolarité ou postuler à un poste de travail. Au début du lancement de cette opération d'encadrement des écoles coraniques de la région par le département des Habous et des Affaires islamiques, les habitants qui y voyaient une «mainmise» malvenue, ne cachaient pas leur inquiétude, craignant un détournement de ces écoles de leur rôle traditionnel de propagation de la foi et de rayonnement de la culture islamique. Auprès des tolbas et imams, cela n'a pas manqué de susciter aussi des a priori. Mais les appréhensions se sont vite dissipées. «L'expérience s'est révélée fructueuse. C'est pour nous comme une brèche ouverte sur un autre monde. Se suffire à une seule culture, c'est cultiver un esprit borné et étroit», reconnaissent les étudiants en chœur.
Pour Mohamed, originaire de la région de Taroudant, étudiant à la cinquième année à Tagrramt, «déjà, je me sens mieux outillé en terme de bagage linguistique pour manipuler un téléphone portable, un ordinateur…; du coup, cela m'a permis de découvrir Internet et de l'utiliser pour approfondir mes connaissances et mieux comprendre le monde qui nous entoure. Quant aux matières scientifiques, ajoute son camarade, on a vite constaté combien elles vous mettent en contact direct avec la réalité et cultivent la logique et le raisonnement, loin des méthodes privilégiant le gavage mnémonique de connaissances immuables et figées. C'est par ailleurs le meilleur rempart contre l'extrémisme qu’alimentent la réclusion et le refus de la modernité, farouches ennemis de l'ouverture sur les autres cultures, reconnaît-on auprès des tolbas.
Aussi, forte de ces réformes, la médersa de Tagrramt jouit aujourd'hui d'une bonne réputation dans la région. En atteste le nombre de plus en plus croissant de jeunes en quête de savoir en provenance de régions lointaines comme Elhouz, Haha, Tiznit et Taroudant.