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Le Mali a la
particularité d’avoir des frontières
communes avec sept Etats d’Afrique… Autant dire que ce qui le touche, touche,
a minima, sept pays
de la région. Il faut
se représenter le Mali comme une mer
intérieure dont les
tempêtes peuvent être dévastatrices pour toute l’Afrique
de l’Ouest.
Ce territoire immense est aujourd’hui
littéralement coupé en deux et il n’y a plus dans ce pays ni
président élu, ni
institutions
républicaines crédibles, ni véritable hiérarchie militaire.
En outre, la situation qui prévaut
actuellement au
Nord du Mali n’a rien de surprenant, les germes de la discorde datant de
l’indépendance
de l’ex-Soudan français, devenu la République du Mali en 1960.
Trois grandes régions composent l’Azawad : Gao, Tombouctou et Kidal.
Seule Kidal est peuplée de Touaregs et d’Arabes, ce qui explique sans doute la forte propension de ses habitants à être les détonateurs des différentes rébellions.
Gao et Tombouctou sont des zones de brassage, de métissage entre les Sonrhaïs, les Touaregs, les Arabes, les Peuhls, les Bozos. La population est polyglotte et les limites territoriales entre familles et tribus sont floues.
Ces populations ont vécu en symbiose depuis la nuit des temps, elles témoignent de l’universalité africaine, à telle enseigne que les noms de familles ne permettent plus d’identifier leur appartenance à telle ou telle ethnie.
A titre d’exemple, des Arabes Kountas et Ehel Arawane portent les noms
Adiawyakoye et Koyrakoye qui veulent dire en langue Sonrhaï respectivement «maître coranique» et «maître de la ville».
La ville de Gao, la plus grande et la plus peuplée du Nord, a été la capitale de l’Empire Sonrhaï, s’y trouve la pyramide des Askia, tombeau de l’empereur l’Askia Mohamed, classée patrimoine de l’humanité.
La prière du vendredi à Tombouctou est faite à la mosquée Djingaré Ber (grande mosquée en Sonrhaï) et les imams sont toujours des Sonrhaï, signe de leur forte présence dans la ville la plus illustre et la plus cosmopolite de tout le Mali…
Les Sonrhaïs et les Peuhl, peuples noirs, sont très nombreux sur toutes les berges du fleuve Niger, ce grand cours d’eau qui est l’élément nourricier de tout le Mali. Ils ne sont pas de la rébellion.
Les tribus arabes Beydanes ont eux aussi une forte présence, surtout au niveau des deux grandes régions de Gao et Tombouctou. Leur position par rapport à la question reste floue et dépendante de leurs cousins de Mauritanie…
Cette communauté connaît d’ailleurs une rivalité meurtrière qui oppose depuis de longues années les tribus Kountas et Lamhars à Gao.
A Tombouctou les tribus Brabiches, Ehel Arawane, Termouz, Tajakanet, Legwanine, Aarib, El Wesre, Idelbe, sont loin d’être unies et solidaires…
Les Touaregs de la souche négro-africaine, appelés «Bélas», d’anciens esclaves nombreux sur les terres arables du fleuve et des lacs Faguibine, Télé, Horo, n’ont jamais pris part de manière tranchée aux différentes rebellions, bien au contraire, ils ont souvent été les auxiliaires de l’armée malienne dans les précédents soulèvements…
L’ossature principale de la présente révolte est constituée des Ifogas, des Idnans et des Chamanammes (région de Kidal).
La plus nombreuse et puissante tribu Touareg Imghad, apparentée aux Imouchagh, la souche originelle des Touaregs, est restée au début en dehors du conflit, pour ne pas dire du côté du pouvoir de Bamako.
La grande et influente tribu Kelentessar, pépinière de cadres touaregs, qui peuple la partie Sud de la région de Tombouctou et la bande frontalière de la Mauritanie, n’était pas engagée dans la révolte actuelle à ses premières heures…
Les exactions de Bamako contre les Touaregs ont poussé dans les bras de la rébellion des tribus qui n’avaient ni l’envie ni la conviction nécessaires pour s’embarquer dans cette aventure récurrente.
C’est à la suite de ces bavures restées impunies, qui n’ont pas épargné de grands dignitaires de l’Etat, que le Mali s’est vidé de sa population blanche originaire du Nord et que les ralliements se sont généralisés…
Une partition improbable
Compte tenu de tous ces éléments et de la réalité géopolitique régionale, l’indépendance de l’Azawad est-elle possible ?
Quatre arguments majeurs rendent la probabilité d’une indépendance acceptée et cautionnée par la communauté internationale, faible.
Le premier argument, à mon sens, réside dans le concept même de l’indépendance. Les défis de la mondialisation, le développement spectaculaire des communications, ont rendu les frontières, toutes les frontières, virtuelles, et changé la perception que les hommes ont du contenu de ce mot.
Notre monde tend à l’universalisme et le combat est désormais contre le sous-développement dans toutes ses formes, le titre de voyage que l’on détient devient subsidiaire.
La création d’un Etat demande du temps, beaucoup de ressources humaines et matérielles, des procédures interminables et fastidieuses, de la sueur et des larmes. Sans le soutien de la communauté internationale, le coût de ce luxueux exercice de haute voltige serait hors de portée des populations concernées.
La récente partition du Soudan avec ses problèmes inextricables et leurs conséquences désastreuses, est de nature à ne pas encourager une solution de même type au Mali.
Le second argument est l’atomisation de la population de l’Azawad en ethnies, tribus et groupes indépendants, rivaux, antagonistes et parfois hostiles entre eux. Les Azawadis ne regardent, hélas, pas dans la même direction, n’ont pas un objectif commun appelé « Indépendance ».
On ne peut pas faire l’impasse sur l’assentiment des populations concernées qui à ce jour n’ont ni le même discours, ni un idéal commun ayant pour nom : « Partition » !
Troisième et non des moindres est la présence parmi les combattants du Nord de la nébuleuse Aqmi et autres groupes armés terroristes traqués par la communauté internationale. La zone est devenue un espace de non-droit, le terrain de prédilection du terrorisme, du commerce des otages et du narcotrafic. Tout ceci détruit l’éventualité d’une reconnaissance d’indépendance sur la scène internationale.
L’indulgence avec laquelle la rébellion était observée de l’extérieur, s’est vite dissipée à l’apparition au grand jour des émirs d’Aqmi dans les rues et mosquées de Tombouctou et Gao, aux côtés de certains chefs militaires touaregs.
Une impression forte s’est incrustée dans les esprits des observateurs, celle de la création d’un Etat islamo-terroriste et narcotrafiquant dans la zone désertique et poreuse du Sahel.
Le quatrième obstacle est celui du risque de contagion que les voisins et la communauté internationale ne prendront jamais. Il serait désastreux pour la stabilité des pays voisins du Mali et poserait un cas de jurisprudence pouvant déréguler le monde, en commençant par l’Afrique.
Les difficultés du monde actuel liées à la globalisation, imposent les unions, la création de grands ensembles qui dissolvent les souverainetés. Redessiner les frontières, c’est ramer à contre-courant des réalités du monde actuel.
On s’achemine en toute logique vers une solution de raison et de réalisme politique mais qui doit de manière impérative sauvegarder les droits des peuples.
L’autonomie comme solution
L’indépendance de l’Azawad, pour les raisons précitées, semble peu raisonnable. Elle est peu réaliste et techniquement difficile à mettre en œuvre, ne serait-ce que pour des raisons de délimitation des zones d’influence eu égard aux osmoses ethniques.
La solution la plus réaliste serait une large autonomie du Nord dont les contours doivent être scrupuleusement étudiés, négociés et dont les accords doivent être bien appliqués le moment venu.
Cette solution sauvegarde l’essentiel des intérêts de toutes les parties concernées ; de plus elle est dans l’air du temps.
La globalisation écrase toutes les petites entités. Notre monde a changé, le village mondial s’est rétréci et la tendance dans le monde post-moderne, ce « chaos rangé » et qui bénéficie d’une bonne ingénierie démocratique, est de développer des régions très autonomes qui gèrent leur commerce, leurs transactions et la vie de leurs concitoyens.
Face à la complexité et la multiplicité des échanges, l'Union européenne a en effet fait le choix de l'échelle régionale, il se révèle très pertinent. Les exemples sont nombreux et peuvent éclairer. La régionalisation avancée est imminente au Maroc ; en Europe, elle est en marche depuis longtemps. Les régions créent de la fertilisation croisée, de la richesse et des emplois…Le Danemark et la Suède ont même créé une région transfrontalière, l’Oresund, un des plus grands pôles universitaires d’Europe.
Le niveau le plus pertinent de développement et d’échanges devient celui de la région…
L’offre de cette solution d’autonomie régionale, doit venir de ceux qui détiendront le pouvoir légitime à Bamako, sans complexe et sans complaisance. Cette solution ne doit pas être perçue comme une prime à la révolte, elle s’impose comme solution médiane, une option de salut.
Cette autonomie doit être garantie, soutenue et accompagnée par une implication forte de la communauté internationale et celle des voisins du Mali, incontournables dans la recherche d’une solution pérenne.
Il restera à l’élite du Nord, des défis à relever comme gage de leur aptitude à s’autogérer. Le premier est celui du rassemblement et de l’unité solennelle. Il faut se débarrasser au plus vite des sectarismes primaires. Une autonomie avec ses zones ethniques bunkérisées, ses féodalités tribales et ses petits clans guerriers à la nuisance autodestructrice, serait un désastre pire que la situation antérieure.
Le Mali peut devenir un laboratoire pour toute la région, car c’est de l’ampleur de cette crise que peut naître le salut, avec un nécessaire sursaut des consciences, beaucoup de réalisme et de clairvoyance.
Le plus grand défi, très attendu et urgent celui-là, sera l’éradication du terrorisme, de l’obscurantisme et du grand banditisme.
Les populations du Nord du Mali ont le devoir et la responsabilité d’aseptiser et de sécuriser leur territoire. Ils sont les seuls à pouvoir le faire et doivent donner au monde extérieur les preuves de leur engagement à assumer cette mission. C’est à ce prix qu’ils seront crédibles, écoutés et soutenus dans leur lutte pour une autonomie large et contre le sous-développement.
En dernier ressort, nous devons aider les Maliens à chercher en eux les solutions à leur problème. Ils détiennent des secrets de lien social, de concertation, de recherche du consensus. Il va falloir qu’ils les utilisent et appliquent en urgence la sagesse africaine : «L’homme est le médicament de l’homme!»
Enfin, la pauvreté n’est pas une fatalité, le Mali est non seulement riche de sa diversité, mais regorge de potentialités.
Avec le concours de ses frères et amis dont le Maroc est au premier rang, tous les obstacles sur le chemin de la prospérité peuvent être surmontés. Mais paix sociale et sécurité sont le substrat de tout développement humain, c’est donc par là qu’il faut commencer.
Le Maroc et le Mali partagent un florissant passé commun. Ce qui se passe au Mali nous concerne au premier chef en raison de l’histoire, des liens de sang, et des enjeux d’avenir. Ce laboratoire vivant, conservatoire de cultures et de traditions, gardien d’une partie de notre mémoire, interpelle en nous nos meilleurs sentiments d’entraide et de fraternité.
Nous ne pouvons démissionner de notre responsabilité, le Sahel nous concerne quoi que nous fassions. Il est notre prolongement historique.
En secret, les racines poursuivent leur puissant dialogue avec l’arbre, depuis des millénaires…
particularité d’avoir des frontières
communes avec sept Etats d’Afrique… Autant dire que ce qui le touche, touche,
a minima, sept pays
de la région. Il faut
se représenter le Mali comme une mer
intérieure dont les
tempêtes peuvent être dévastatrices pour toute l’Afrique
de l’Ouest.
Ce territoire immense est aujourd’hui
littéralement coupé en deux et il n’y a plus dans ce pays ni
président élu, ni
institutions
républicaines crédibles, ni véritable hiérarchie militaire.
En outre, la situation qui prévaut
actuellement au
Nord du Mali n’a rien de surprenant, les germes de la discorde datant de
l’indépendance
de l’ex-Soudan français, devenu la République du Mali en 1960.
Trois grandes régions composent l’Azawad : Gao, Tombouctou et Kidal.
Seule Kidal est peuplée de Touaregs et d’Arabes, ce qui explique sans doute la forte propension de ses habitants à être les détonateurs des différentes rébellions.
Gao et Tombouctou sont des zones de brassage, de métissage entre les Sonrhaïs, les Touaregs, les Arabes, les Peuhls, les Bozos. La population est polyglotte et les limites territoriales entre familles et tribus sont floues.
Ces populations ont vécu en symbiose depuis la nuit des temps, elles témoignent de l’universalité africaine, à telle enseigne que les noms de familles ne permettent plus d’identifier leur appartenance à telle ou telle ethnie.
A titre d’exemple, des Arabes Kountas et Ehel Arawane portent les noms
Adiawyakoye et Koyrakoye qui veulent dire en langue Sonrhaï respectivement «maître coranique» et «maître de la ville».
La ville de Gao, la plus grande et la plus peuplée du Nord, a été la capitale de l’Empire Sonrhaï, s’y trouve la pyramide des Askia, tombeau de l’empereur l’Askia Mohamed, classée patrimoine de l’humanité.
La prière du vendredi à Tombouctou est faite à la mosquée Djingaré Ber (grande mosquée en Sonrhaï) et les imams sont toujours des Sonrhaï, signe de leur forte présence dans la ville la plus illustre et la plus cosmopolite de tout le Mali…
Les Sonrhaïs et les Peuhl, peuples noirs, sont très nombreux sur toutes les berges du fleuve Niger, ce grand cours d’eau qui est l’élément nourricier de tout le Mali. Ils ne sont pas de la rébellion.
Les tribus arabes Beydanes ont eux aussi une forte présence, surtout au niveau des deux grandes régions de Gao et Tombouctou. Leur position par rapport à la question reste floue et dépendante de leurs cousins de Mauritanie…
Cette communauté connaît d’ailleurs une rivalité meurtrière qui oppose depuis de longues années les tribus Kountas et Lamhars à Gao.
A Tombouctou les tribus Brabiches, Ehel Arawane, Termouz, Tajakanet, Legwanine, Aarib, El Wesre, Idelbe, sont loin d’être unies et solidaires…
Les Touaregs de la souche négro-africaine, appelés «Bélas», d’anciens esclaves nombreux sur les terres arables du fleuve et des lacs Faguibine, Télé, Horo, n’ont jamais pris part de manière tranchée aux différentes rebellions, bien au contraire, ils ont souvent été les auxiliaires de l’armée malienne dans les précédents soulèvements…
L’ossature principale de la présente révolte est constituée des Ifogas, des Idnans et des Chamanammes (région de Kidal).
La plus nombreuse et puissante tribu Touareg Imghad, apparentée aux Imouchagh, la souche originelle des Touaregs, est restée au début en dehors du conflit, pour ne pas dire du côté du pouvoir de Bamako.
La grande et influente tribu Kelentessar, pépinière de cadres touaregs, qui peuple la partie Sud de la région de Tombouctou et la bande frontalière de la Mauritanie, n’était pas engagée dans la révolte actuelle à ses premières heures…
Les exactions de Bamako contre les Touaregs ont poussé dans les bras de la rébellion des tribus qui n’avaient ni l’envie ni la conviction nécessaires pour s’embarquer dans cette aventure récurrente.
C’est à la suite de ces bavures restées impunies, qui n’ont pas épargné de grands dignitaires de l’Etat, que le Mali s’est vidé de sa population blanche originaire du Nord et que les ralliements se sont généralisés…
Une partition improbable
Compte tenu de tous ces éléments et de la réalité géopolitique régionale, l’indépendance de l’Azawad est-elle possible ?
Quatre arguments majeurs rendent la probabilité d’une indépendance acceptée et cautionnée par la communauté internationale, faible.
Le premier argument, à mon sens, réside dans le concept même de l’indépendance. Les défis de la mondialisation, le développement spectaculaire des communications, ont rendu les frontières, toutes les frontières, virtuelles, et changé la perception que les hommes ont du contenu de ce mot.
Notre monde tend à l’universalisme et le combat est désormais contre le sous-développement dans toutes ses formes, le titre de voyage que l’on détient devient subsidiaire.
La création d’un Etat demande du temps, beaucoup de ressources humaines et matérielles, des procédures interminables et fastidieuses, de la sueur et des larmes. Sans le soutien de la communauté internationale, le coût de ce luxueux exercice de haute voltige serait hors de portée des populations concernées.
La récente partition du Soudan avec ses problèmes inextricables et leurs conséquences désastreuses, est de nature à ne pas encourager une solution de même type au Mali.
Le second argument est l’atomisation de la population de l’Azawad en ethnies, tribus et groupes indépendants, rivaux, antagonistes et parfois hostiles entre eux. Les Azawadis ne regardent, hélas, pas dans la même direction, n’ont pas un objectif commun appelé « Indépendance ».
On ne peut pas faire l’impasse sur l’assentiment des populations concernées qui à ce jour n’ont ni le même discours, ni un idéal commun ayant pour nom : « Partition » !
Troisième et non des moindres est la présence parmi les combattants du Nord de la nébuleuse Aqmi et autres groupes armés terroristes traqués par la communauté internationale. La zone est devenue un espace de non-droit, le terrain de prédilection du terrorisme, du commerce des otages et du narcotrafic. Tout ceci détruit l’éventualité d’une reconnaissance d’indépendance sur la scène internationale.
L’indulgence avec laquelle la rébellion était observée de l’extérieur, s’est vite dissipée à l’apparition au grand jour des émirs d’Aqmi dans les rues et mosquées de Tombouctou et Gao, aux côtés de certains chefs militaires touaregs.
Une impression forte s’est incrustée dans les esprits des observateurs, celle de la création d’un Etat islamo-terroriste et narcotrafiquant dans la zone désertique et poreuse du Sahel.
Le quatrième obstacle est celui du risque de contagion que les voisins et la communauté internationale ne prendront jamais. Il serait désastreux pour la stabilité des pays voisins du Mali et poserait un cas de jurisprudence pouvant déréguler le monde, en commençant par l’Afrique.
Les difficultés du monde actuel liées à la globalisation, imposent les unions, la création de grands ensembles qui dissolvent les souverainetés. Redessiner les frontières, c’est ramer à contre-courant des réalités du monde actuel.
On s’achemine en toute logique vers une solution de raison et de réalisme politique mais qui doit de manière impérative sauvegarder les droits des peuples.
L’autonomie comme solution
L’indépendance de l’Azawad, pour les raisons précitées, semble peu raisonnable. Elle est peu réaliste et techniquement difficile à mettre en œuvre, ne serait-ce que pour des raisons de délimitation des zones d’influence eu égard aux osmoses ethniques.
La solution la plus réaliste serait une large autonomie du Nord dont les contours doivent être scrupuleusement étudiés, négociés et dont les accords doivent être bien appliqués le moment venu.
Cette solution sauvegarde l’essentiel des intérêts de toutes les parties concernées ; de plus elle est dans l’air du temps.
La globalisation écrase toutes les petites entités. Notre monde a changé, le village mondial s’est rétréci et la tendance dans le monde post-moderne, ce « chaos rangé » et qui bénéficie d’une bonne ingénierie démocratique, est de développer des régions très autonomes qui gèrent leur commerce, leurs transactions et la vie de leurs concitoyens.
Face à la complexité et la multiplicité des échanges, l'Union européenne a en effet fait le choix de l'échelle régionale, il se révèle très pertinent. Les exemples sont nombreux et peuvent éclairer. La régionalisation avancée est imminente au Maroc ; en Europe, elle est en marche depuis longtemps. Les régions créent de la fertilisation croisée, de la richesse et des emplois…Le Danemark et la Suède ont même créé une région transfrontalière, l’Oresund, un des plus grands pôles universitaires d’Europe.
Le niveau le plus pertinent de développement et d’échanges devient celui de la région…
L’offre de cette solution d’autonomie régionale, doit venir de ceux qui détiendront le pouvoir légitime à Bamako, sans complexe et sans complaisance. Cette solution ne doit pas être perçue comme une prime à la révolte, elle s’impose comme solution médiane, une option de salut.
Cette autonomie doit être garantie, soutenue et accompagnée par une implication forte de la communauté internationale et celle des voisins du Mali, incontournables dans la recherche d’une solution pérenne.
Il restera à l’élite du Nord, des défis à relever comme gage de leur aptitude à s’autogérer. Le premier est celui du rassemblement et de l’unité solennelle. Il faut se débarrasser au plus vite des sectarismes primaires. Une autonomie avec ses zones ethniques bunkérisées, ses féodalités tribales et ses petits clans guerriers à la nuisance autodestructrice, serait un désastre pire que la situation antérieure.
Le Mali peut devenir un laboratoire pour toute la région, car c’est de l’ampleur de cette crise que peut naître le salut, avec un nécessaire sursaut des consciences, beaucoup de réalisme et de clairvoyance.
Le plus grand défi, très attendu et urgent celui-là, sera l’éradication du terrorisme, de l’obscurantisme et du grand banditisme.
Les populations du Nord du Mali ont le devoir et la responsabilité d’aseptiser et de sécuriser leur territoire. Ils sont les seuls à pouvoir le faire et doivent donner au monde extérieur les preuves de leur engagement à assumer cette mission. C’est à ce prix qu’ils seront crédibles, écoutés et soutenus dans leur lutte pour une autonomie large et contre le sous-développement.
En dernier ressort, nous devons aider les Maliens à chercher en eux les solutions à leur problème. Ils détiennent des secrets de lien social, de concertation, de recherche du consensus. Il va falloir qu’ils les utilisent et appliquent en urgence la sagesse africaine : «L’homme est le médicament de l’homme!»
Enfin, la pauvreté n’est pas une fatalité, le Mali est non seulement riche de sa diversité, mais regorge de potentialités.
Avec le concours de ses frères et amis dont le Maroc est au premier rang, tous les obstacles sur le chemin de la prospérité peuvent être surmontés. Mais paix sociale et sécurité sont le substrat de tout développement humain, c’est donc par là qu’il faut commencer.
Le Maroc et le Mali partagent un florissant passé commun. Ce qui se passe au Mali nous concerne au premier chef en raison de l’histoire, des liens de sang, et des enjeux d’avenir. Ce laboratoire vivant, conservatoire de cultures et de traditions, gardien d’une partie de notre mémoire, interpelle en nous nos meilleurs sentiments d’entraide et de fraternité.
Nous ne pouvons démissionner de notre responsabilité, le Sahel nous concerne quoi que nous fassions. Il est notre prolongement historique.
En secret, les racines poursuivent leur puissant dialogue avec l’arbre, depuis des millénaires…