Le déclin du Jbel Ayachi : Les moutons marocains sabotent une montagne


Par Michel Tarrier
Mardi 26 Juin 2012

Le déclin du Jbel Ayachi  : Les moutons marocains sabotent une montagne
Plus de 100 millions d’herbivores (moutons, chèvres, vaches, dromadaires…) ravagent les sols et les écosystèmes du Maroc, avec, semble-t-il, la bénédiction des autorités et des gestionnaires. L’entièreté du pays, par ailleurs plus fragile que d’autres puisque de nature semi-aride en majorité, est l’objet d’un véritable « dépeçage « de ses paysages et de son Vivant par la pression d’un surpâturage à nul autre pareil. On le sait, on le répète, mais c’est pire chaque saison.
Un exemple parmi d’autres est celui que vient de vivre le magnifique Jbel Ayachi qui culmine à 3757 m dans le Haut Atlas oriental. Au fil de ces dernières années, le massif a perdu la totalité de sa couverture végétale et ne montre plus qu’un sol dénudé, scalpé, squelettique. Effrayant, effarant,  irréversible. Les derniers lambeaux de la précieuse cédraie sont moribonds, les genévriers thurifères vétérans sont écimés jusqu’au trognon, la chênaie verte est ravagée, décapitée, abroutie, l’ancien cortège botanique si riche et varié n’est plus, c’est tout le paysage qui dépérit à force d’abus d’usage. Le sol désormais pulvérulent, où plus rien ne pousse et ne poussera plus jamais part en poussière au moindre vent ou se retrouve dramatiquement lessivé lors des pluies. Voici ce qu’il reste d’un manteau forestier que le premier découvreur, le Marquis de Segonzac, décrivait comme luxuriant et infranchissable en 1905, soit à peine plus d’un siècle ! Quant à la faune climacique (lion, panthère, magot, mouflon, gazelle et même antilope bubale !!) et la faunule endémique (innombrables papillons à valeur biopatrimoniale), il ne reste rien. Toutes les espèces sauvages ont été décimées, victimes de la destruction de leur niche écologique, d’éviction, quand ce n’est pas de persécution imbécile et impitoyable.
Tous sont responsables, du berger au garde forestier, mais sont surtout coupables les propriétaires absents, ces bourgeois des grandes villes qui confient des effectifs surnuméraires de moutons (oviculture de rente) à des bergers locaux et dont ils profitent des droits séculiers d’usage normalement limités à la charge modeste de troupeaux familiaux. De tels droits devraient être caduques s’ils ne profitaient pas, et ce sans la moindre traçabilité, à des gens bien placés de réaliser de gros bénéfices sur le dos de la misère et de l’ignorance, et au détriment de ressources légitimes. Et les faux reboisements, les soi-disant périmètres en défens ne sont que des effets d’annonce. L’intitulé de l’administration en charge d’écosystèmes qui ne sont plus que des fabriques de moutons est à revoir : Haut Commissariat « de la lutte contre la désertification « ne correspond absolument plus à l’objectif qui se révèle inverse à la promesse.
Et pour parler de cette montagne de l’Ayachi, qui sont ces gens de la tribu des Aït-Morrhad qui ont investi la contrée pour en détruire les espaces et les espèces ? De quel laxisme profitent-ils pour pouvoir ainsi se comporter en hors-la-loi ?
Ah ! la viande, la viande, la viande… ! Mangez-en donc tous les jours, encore et encore, jusqu’à en crever vous-même et déposséder les générations futures du moindre reste de Nature ! La Nature, quoi qu’en pensent les imbéciles, n’est pas une ressource renouvelable.
Protéger la Nature passe par la colère, une « bienveillante « dictature (un peu comme le code de la route, non ?) et un certain végétarisme. Mais à l’heure d’un écologisme de pacotille parce qu’électoraliste, bonne conscience d’un système corrompu, on ne sait plus rien de l’écologie. Nous vivons dans l’éco-inconscience. Pour le fric.
Il existe, sur les routes des Atlas, quelques auberges aux enseignes évocatrices d’un paradis perdu : «Auberge du dernier lion de l’Atlas», « … de la dernière panthère «, « … du dernier singe magot «. Annoncera-t-on les prochaines ouvertures de gîtes ruraux (c’est tendance…) aux appellations probabilistes : « … du dernier cèdre «, « … du dernier mouton «, « … du dernier touriste «, « … du dernier homme « ?!!

Co-auteur avec  Jean Delacre de l’ouvrage « Les Papillons de jour du Maroc «, paru aux éditions Biotope .


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1.Posté par LASSALE le 26/06/2012 17:26
C EST DOMMAGE J AI FAIT UNE DIZAINE DE MONTEES DU JBEL AYACH DANS LES ANNEES ENTRE 1965 ET 1973 C ETAIT BEAU A VOIR SOIT DU COTE DE ZAOUIT SIDI HAMZA OU DU
COTE DU CIRQUE DE JAAFAR ET EN DESCENDANT PAR TIZI N TSATIFT OU DE TIZI N IZDADEN
OU CARREMENT PAR IQHISS C ETAIT VRAIMENT JOLI EN SUIVANT LE FAIT DE LA MONTAGNE.
J AI FAIT LA MONTEE A PARTIR DE TATIOUINE EN CETTE ANNEE DE 2012 UN GOUFFRE DE DIFFERENCE PLUS DE 40 ANS APRES CELA EST VRAIMENT DOMAGE POUR CETTE BELLE MONTAGNE LE MARQUIS DE SEGONZAGUE QUI A ECRIT SUR LA MOULOUTCHA DOIT SE RETOURNER SUR SA TOMBE.

2.Posté par LMOUBARIKI le 27/06/2012 08:56
Quoique plein de bon sens en particulier lorsqu’il évoque l’insouciance des organismes officiels et les soi-disant actions de l’Etat pour lutter contre la désertification, il n’empêche que cet article passe en silence une donnée essentielle : l'activité pastorale est vitale pour les Ait Morghad pour ne citer que cette tribu mise à l'index par l'auteur. Déplorer la déconfiture de l’écosystème du mont El-Ayyachi est une chose mais en profiter pour « gueuler » en reprochant aux gens de manger de la viande témoigne d’une ignorance totale de la réalité locale. Le cheptel est la source de revenu de la population. La viande, ils n’en se goinfrent pas. Leur état miséreux ne leur permet guère ce luxe qui fait des ravages écologiques et sanitaires dans le nord de la planète. Les convictions écologiques ne gagnent rien en se muant en dogmes quasi religieux. Lorsqu’on ne prend pas en considération la réalité du terrain, on passe à côté de l’essentiel. C’est d’ailleurs un des reproches qu’on peut faire aux « extrémistes » de l’écologie.

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