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Pas plus tard que ce mois, l’opinion publique a largement relaté l’affaire de l’enfant violé dans une crèche à Tanger, du cas du mineur en situation de handicap qui a été agressé sexuellement à Casablanca et de l’atroce vidéo de la petite fille violentée et violée par une poignée de jeunes à Safi.
Selon des statistiques de la Coalition contre les abus sexuels sur les enfants (COCASSE), une ONG constituée de plusieurs associations des droits de l'enfant, 360 cas d’agressions sexuelles sur des mineurs ont été recensés entre 2010 et 2015 sur la base de plaintes reçues. 69% de ces enfants, généralement âgés de 5 à 14 ans, ont été abusés par des membres de leurs familles. Les voisins et les personnes inconnues arrivent en tête des agresseurs et Agadir, Marrakech, Essaouira, Tanger et Tétouan ont été considérées comme les villes les plus touchées par ce fléau, a indiqué l’ONG. Plusieurs acteurs associatifs sont unanimes à considérer que le phénomène des violences sexuelles faites aux mineurs va crescendo.
Une situation que Mohamed Rachid Cherii, président de l’Association nationale de défense des droits de l’Homme au Maroc (ANDDHM), impute à une justice qu’il accuse de prononcer des jugements cléments contre les agresseurs. «Les violences sexuelles faites aux enfants ont atteint aujourd’hui des proportions alarmantes et la responsabilité de cette situation est imputable à la justice qui ne donne pas suite à certaines affaires ou prononce des jugements cléments envers les violeurs», nous a-t-il indiqué. Et de poursuivre : «Tel est le cas d’une affaire récente à Essaouira où la justice s’est contentée, malgré les sit-in et les protestations de la société civile, de condamner trois hommes, dont un président de commune et quatre femmes, à quatre ans de prison seulement et leurs intermédiaires à cinq ans d’emprisonnement».
Notre source va plus loin. Elle estime que le châtiment stipulé par l’article 485 du Code pénal édictant la réclusion de dix à vingt ans contre tout coupable d’attentat à la pudeur consommé ou tenté avec violences contre un enfant de moins de dix-huit ans, n’a été jamais prononcé. «Le législateur a donné au juge le pouvoir discrétionnaire de choisir le peine adéquate, mais la plupart des jugements n’ont pas dépassé les cinq ans et n’ont jamais atteint les 20 ans. Il y a même eu des peines avec sursis», nous a-t-elle précisé. Et d’ajouter : «Pire, il y a des centaines d’affaires qui ne parviennent pas à la justice et qui se perdent dans les dédales des tiroirs de la police et des gendarmeries». Une situation qui est appelée à changer radicalement suite à l’annonce faite en janvier dernier par Mustapha Farès, premier président de la Cour de cassation, et affirmant que le viol de mineur avec ou sans violence sera désormais considéré comme un «crime». Un changement de taille qui devra réduire largement la marge d’appréciation des juges, souvent critiqués par les familles des victimes et les associations de protection de l’enfance. Une initiative qui exige néanmoins la révision de l’article 485 du Code pénal afin de parer à la stratégie régulièrement exploitée par les avocats de la défense prétextant le «consentement» des victimes.
L’Association nationale de défense des droits de l’Homme au Maroc estime que le viol doit être considéré comme un crime égal au meurtre puisque la victime en sera marquée à jamais au fer rouge. «C’est pourquoi on demande des peines allant jusqu’à la perpétuité afin d’endiguer ce fléau qui semble de plus en plus sévir au sein des familles et de leurs proches», a conclu le président de l’ANDDHM.