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Benkirane fait l’amalgame entre médecine et charlatanisme


Hassan Bentaleb
Mardi 19 Avril 2016

Abdelilah Benkirane est pessimiste quant à l’avenir du secteur de la santé. Il estime que l’augmentation des ressources financières et humaines ne garantira nullement la qualité de service exigée. Le chef du gouvernement pense que la clé de la réussite du secteur de la santé tient au fait que le personnel médical se transforme en réformateur capable de faire sa propre autocritique   au lieu de se contenter de critiquer la situation actuelle du secteur, tout en précisant que l’accès à ce domaine doit avoir pour seul objectif de servir les malades et non pas l’enrichissement personnel.  Ces propos ont été tenus samedi dernier lors de la deuxième rencontre nationale de la santé organisée par les médecins et pharmaciens du PJD.  
« C’est absurde », s’est insurgé Aziz Rhali, vice-coordinateur du Collectif pour le droit à la santé au Maroc (CDSM) puisque la réussite de n’importe quel secteur dépend de l’abondance des ressources humaines et financières. « Les propos du chef de l’Exécutif consistent à dire à l’opinion publique que ce secteur est moribond et qu’il faut mettre fin à toute réforme. En d’autres termes, l’état de la santé est désespérant et il vaut mieux que l’Etat lève la main et, du coup, arrête tout effort budgétaire au profit de ce secteur ». Ce que le Collectif a déjà qualifié de « tendance à la privatisation » de  ce secteur considéré  désormais par l’Etat comme un fardeau  qu’il ne peut  plus supporter et non pas comme un droit de l’Homme.
Les propos de Benkirane n’ont rien de  nouveau, selon notre source,  puisqu’ils ont été maintes fois tenus par lui. « C’est la continuité  d’une logique qui lui est propre.  Qu’attendre alors d’un chef de  gouvernement qui ose dire que les malades n’ont pas besoin de médicaments ni de dispositifs médicaux mais d’un peu d’effort ? », s’est-elle demandée. Et d’affirmer que ces propos «s’inscrivent dans une politique rampante destinée à discréditer le secteur de la santé et de faire perdre tout espoir en la réforme de ce domaine alors que la mission du chef du gouvernement consiste d’abord à respecter ses engagements.  Tel est le cas du budget du secteur de la santé qui peine encore à  atteindre les 10% du PIB recommandés par l’OMS et le manque de personnel médical estimé à 7.000 médecins et 15.000 infermières ».  
Partant de ce constat, le vice-coordinateur du CDSM estime qu’il ne doit pas y avoir de débat sur la responsabilité du personnel médical tant que le gouvernement ne respecte pas ses engagements.  « Toute demande de reddition des comptes au personnel médical en l’absence ou plutôt en situation de déficit en ressources humaines, en infrastructures et en moyens rend le débat stérile et insensé.   Car comment peut-on demander à un infirmier lâché seul dans la nature et sans moyens d’offrir une bonne qualité de soins  dans un dispensaire perché dans un no man’s land ? Comment demander des comptes et s’attendre à une meilleure qualité de travail avec seulement 50 chirurgiens cardiaques et cardiologues  dans le secteur public alors que les maladies cardiovasculaires sont très répandues au Maroc ?  Il en va de même pour les médecins anesthésistes », nous a-t-il déclaré.
Selon le Collectif pour le droit à la santé au Maroc, l’état des lieux du secteur de la santé  est accablant et le système d’accès aux soins publics est inefficace et incapable de couvrir la totalité des besoins de la population.  Aussi dénonce-t-il le fait que le budget public alloué à la santé soit  insuffisant, que 85% des femmes âgées ne  bénéficient pas du RAMED et que seulement le tiers des femmes issues du  milieu rural bénéficient du suivi médical de la grossesse.   
Même constat de la part  du Dr. Badreddine Dassouli, président du Syndicat national des médecins du secteur libéral (SNML) qui estime que les propos du chef du gouvernement sont indignes de quelqu’un de son rang. « Il s’agit d’un chef de l’Exécutif et d’un responsable étatique dont les propos doivent être logiques et basés sur des statiques et non sur des avis personnels », nous a-t-il précisé. Pour lui, le chiffre de 14 milliards de DH alloués au secteur de la santé avancé par Benkirane ne dit rien sur les performances du secteur ou sur les réformes menées par son gouvernement.   « Ce chiffre ne signifie rien par rapport à d’autres indicateurs comme le taux de mortalité des femmes à l’accouchement qui est en augmentation et la mortalité néonatale qui demeure encore instable, le temps d’attente qui dépasse des mois et les moyens insuffisants», nous a-t-il expliqué.
Pour lui, la dégradation de ce service public est à mettre au passif du gouvernement. Notamment au niveau de son action législative. « C’est le gouvernement qui cherche à miner de l’intérieur ce secteur et à l’offrir sur un plateau  d’argent aux lobbies du secteur privé. En fait, que faut-il attendre d’un gouvernement qui a voté la  loi autorisant l’exercice de la médecine privée par les médecins spécialistes de la santé publique et les médecins enseignants ? Qui a voté la loi accordant le droit aux  sociétés privées de disposer d’établissements de santé ? Et que dire des décrets  de loi qui permettent  aux médecins étrangers d'exercer  au Maroc grâce à une autorisation délivrée par le ministère de la Santé ?», s’est-il interrogé. Et de conclure que «la responsabilité du ministère de la Santé doit être soulignée également  puisqu’il est responsable de la dilapidation  des deniers publics et de la mauvaise gestion du secteur et, du coup,  ce n’est pas le personnel médical qui doit être pointé du doigt, loin s’en faut ».



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