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Jusqu'à fin août, le Centre culturel Tjibaou à Nouméa, en association avec le Musée de la Nouvelle-Calédonie, consacre une exposition, intitulée "Kîbô" (serment gravé), à ces pierres incisées de graphismes courbes d'une grande variété.
Une trentaine de pièces, originaires de différentes régions de la Nouvelle-Calédonie, sont exposées au pied de panneaux pédagogiques dont l'ambition est d'en finir avec les idées reçues qui entourent cet art ancien.
"Les pétroglyphes sont le symbole de la permanence du temps, quand tout le reste a disparu. Ici, on n'a pas construit d'églises ou de châteaux forts, mais ces pierres demeurent", explique Christophe Sand, commissaire scientifique de l'exposition et directeur de l'Institut d'archéologie de Nouvelle-Calédonie et du Pacifique.
"C'est d'ailleurs pour cette raison que pendant la période coloniale, ils vont être interprétés de manière incorrecte", poursuit-il, rapporte l’AFP.
Au début du XXe siècle, un employé des postes, Marius Archambault est le premier à se passionner pour ces roches gravées, disséminées un peu partout dans l'île, et à échafauder des interprétations.
Tenant en piètre estime les Kanak, il affirme que "ces monuments ne doivent pas être attribués à la peuplade canaque qui occupe actuellement l'île", argumentant que les autochtones n'ont pas la capacité intellectuelle de réaliser de telles oeuvres.
Les pétroglyphes sont, selon lui, la marque "de précédents envahisseurs plus évolués".
En dépit d'autres recherches la contestant, cette thèse perdure presque tout au long du XXe siècle et sert d'argument politique pour contrer les velléités d'indépendance des Kanak.
"Les pétroglyphes ont longtemps été utilisés comme support pour démontrer que les Kanak n'étaient pas les premiers occupants", indique Christophe Sand. Le vrai tournant a lieu au début des années 1990, sous l'impulsion de l'équipe du département archéologie du Musée territorial dont faisait partie M. Sand, qui "veut essayer de réconcilier les Calédoniens avec leur histoire".
"Les pétroglyphes sont une tradition de toute la Mélanésie insulaire. Il y a une cohérence graphique dans les motifs que l'on trouve ici, au Vanuatu ou aux îles Salomon", observe l'archéologue.
Spirale, cercles concentriques, croix enveloppées, corps d'humains ou d'animaux, les graphismes ont été creusés dans la roche avec des cailloux pointus puis avec des objets métalliques, à la faveur des premiers contacts avec les Européens.
Très onéreuse, leur datation n'a pas encore été faite avec précision, mais les experts estiment que cet art rupestre a débuté avec le peuplement de l'archipel autour de 1050 avant J-C et a perduré jusqu'aux années 1930.
Quelque 700 sites de pétroglyphes, comprenant environ 5.000 dessins individuels, ont été recensés dans la nature calédonienne et certains peuvent être visités.
"A l'époque, on n'avait pas de stylo, ni de cahier, c'est la seule chose qui explique quel chemin nos ancêtres ont parcouru. C'est une culture-racine", observe Guillaume Bopoeboe, guide kanak dans un documentaire diffusé en marge de l'exposition.
La signification de ces ancêtres des graffitis comporte encore beaucoup de zones d'ombre même si la tradition orale a permis de collecter quelques informations.
"Un motif a la forme d'un ovale avec un trait, qui évoque clairement le sexe féminin. On peut penser qu'il marque le lieu de rituels de fertilité ou d'initiation des jeunes hommes", avance Christophe Sand.
Présents sur des lignes de crête, ils devaient aussi servir à délimiter un territoire ou baliser un chemin coutumier. Mais aucune nomenclature homogène ou facilement compréhensible n'a pu être déterminée.