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L’affaire Wiam, cette petite fille de 9 ans violée et sauvagement battue, a servi de déclencheur. « Il y a eu comme un sursaut, une prise de conscience soudaine face au calvaire qu’a enduré cette petite fille qui vit dans un douar à proximité de Sidi Kacem. C’était le viol de trop, le crime de pédophilie de trop, l’agression violente de trop. Nous ne voyions plus que ce petit corps frêle complètement fracassé, et une blessure, le viol, que cette fillette portera à jamais. Alors l’idée de l’organisation d’une marche blanche a spontanément été lancée, notamment par le présentateur télé, Rachid El Idrissi», témoigne l’un des organisateurs de cette marche contre la pédophilie.
Alors des artistes, des sportifs, des visages médiatiques célèbres, des figures de la société civile mais aussi et surtout des citoyens indignés et en colère ont spontanément adhéré au projet de mobilisation contre la délinquance sexuelle. Un collectif est né, la communauté virtuelle a fait le reste. Et grâce à l’engagement d’une actrice, Amal Essaqr, l’hospitalisation de la petite Wiam, défigurée après avoir reçu 20 coups de faucille assénés par son agresseur, a été rendue possible dans une clinique casablancaise.
Le rappeur Don Bigg, le cinéaste Nour Eddine Lakhmari, l’acteur et réalisateur Driss Roukhe, l’ancien footballeur Aziz Bouderbala, l’animateur de Radio Momo ont très vite appuyé cette initiative de marche en faveur de la protection de l’enfance violée et maltraitée. Sur le web, des spots ont été mis en ligne toute la semaine. «Non au viol de nos enfants», «Plus jamais de Wiam», «Marchons pour protéger nos enfants, marchons pour toutes les Wiam du Maroc», la marche de ce dimanche 5 mai a été conçue d’abord comme un cri d’alerte et une interpellation profonde de l’ensemble de la société.
«Nous savons tous que Wiam n'est pas la seule petite victime de ce type de crimes. Des centaines d'enfants, dont l'histoire n'est pas médiatisée, subissent régulièrement viols et violences dans un silence assourdissant, voire une indifférence qui ne peut qu'encourager la banalisation de tels actes. Ces crimes ne doivent plus se produire au Maroc», peut-on lire dans le communiqué de presse diffusé par les organisateurs de la marche blanche.
Alerter la population et les autorités sur la banalisation des actes de pédophilie
Derrière la symbolique de « Wiam », il faut aussi lire l’engagement d’artistes, de célébrités, de sportifs, plus que jamais acteurs de la cité. Des figures connues qui ont décidé de faire front commun pour défendre une cause, engager une bataille, mener un combat. Les organisateurs de cette marche blanche, pacifique, silencieuse et familiale brandissent haut et fort leurs objectifs : alerter la population et les autorités sur la banalisation de tels actes, dénoncer les violences faites aux enfants et lancer un signe tangible, concret et mobilisateur face à la violence urbaine grandissante.
Une mobilisation qui ne fait que commencer. L’objectif premier de tous ceux et celles qui sont descendus dimanche dans la rue est d’intensifier la pression pour que soit criminalisée la pédophilie, et ce à travers la promulgation d’une loi. «Nous voulons obtenir la modification de l’article 486 du Code pénal qui punit le viol et aggrave la peine pour les mineurs. Nous voulons criminaliser la pédophilie», a expliqué l’acteur associatif Ahmed El Ghayet, au site d’information «Yabiladi». Les associations de défense des droits des enfants sont encore plus précises dans leurs revendications. Pour elles, les termes de pédophilie et de tourisme sexuel doivent clairement apparaître dans les textes de loi pour être mieux sanctionnés.
On a longtemps reproché aux acteurs culturels de ce pays de ne pas s'impliquer dans les chantiers de changement menés par le Maroc, d'avoir si peu (ou si mal) accompagné la transition démocratique marocaine. Si l'engagement des intellectuels et créateurs a connu de beaux jours durant les années de braise, les héros de la culture ont comme montré des signes de fatigue et de lassitude. La démission -désillusion pointait alors à l'horizon. «La marche blanche de Casablanca serait-elle annonciatrice d’un nouvel engagement des acteurs culturels de la cité ? Les artistes, les intellectuels, les sportifs sont des vecteurs de sensibilisation essentiels. Ce sont des visages connus, familiers que le public écoute volontiers. L’affaire Wiam a probablement secoué les consciences culturelles, en plus de celles de la société civile. Et c’est tant mieux », conclut ce défenseur des droits des enfants.